Le Qur’ān expliqué: Les femmes dans le Qur’ān

 » Coran, Inscription Thuluth. Signé par al-Haj Muhammad, découvert à Sheikh Safi, Datation : 14ème siècle. « 
Musée national d’Iran. Photo Vigi-Sectes

Le Qur’ān est la source de toutes les lois sur le statut des personnes, dans les pays islāmiques. Par conséquent, les règles de jurisprudence religieuse concernant la position et le traitement des femmes sont également fondées sur le Qur’ān. Afin de bien comprendre la position des femmes dans l’Islām, il faut d’abord examiner les règles coraniques les concernant.

L’image coranique de la femme

Le Qur’ān fournit de nombreuses descriptions provocantes concernant la nature des femmes et leur valeur intrinsèque par rapport aux hommes :

A. Les êtres malfaisants

Le Qur’ān traite les femmes avec une attitude de suspicion. Il les présente comme une source de danger pour les hommes. Dans l’histoire de Joseph, le Qur’ān décrit les femmes comme possédant une grande malice ou kayd ( « ruses » ) :

«  …en vérité, vos ruses sont puissantes ! » (Q 12.28).

D’autre part, le Qu’ran utilise un langage similaire pour décrire Satan :

«  …en vérité, les ruses de Satan sont faibles » (Q 4.76).

Il est important de noter que le mot kayd n’est pas toujours utilisé comme une insulte. Cependant, la description des femmes dans Q 12, les décrivant comme possédant kayd, est clairement utilisée dans le contexte d’une insulte. Ce mot apparaît trois fois (versets 33, 34 et 50). Sur la base de ces trois versets, on peut conclure que le kayd inné et malicieux des femmes provient de leur « nature et tempérament ». Ainsi, leur innocence est une façade qui cache le mal ou la ruse qui est en eux. De plus, ce kayd les occupe à ourdir des complots. 1

B. Les êtres incomplets

Selon le Qur’ān, la femme est un être incomplet. Cette représentation est illustrée par les lois suivantes :

Tout d’abord, le Qur’ān dicte que la part d’un héritage revenant à une femme ne doit représenter que la moitié de ce que reçoit un homme :

« Dieu vous instruit au sujet de vos enfants; pour un mâle, l’équivalent de la part de deux femmes. … ». (Q 4.11, 176)

Deuxièmement, le témoignage d’une femme dans un tribunal n’a pas autant de poids que celui d’un homme. Au contraire, son témoignage est évalué à la moitié de celui d’un homme. En fait, ses déclarations juridiques ne peuvent même pas être acceptées comme vraies à moins que deux femmes ne témoignent. En outre, le Qur’ān dicte que lorsqu’une transaction commerciale a lieu entre deux personnes, deux hommes doivent en être témoins, ou un homme et deux femmes. De cette façon, si l’une des femmes oublie ce qui s’est passé,…

« la seconde des deux peut le rappeler à l’autre … » (Q 2.282).

Non seulement les capacités mentales de la femme sont considérées comme faibles, mais le Qur’ān la compare à un homme au raisonnement faible et incapable d’argumenter :

« Quoi! Cet être (la fille) élevé au milieu des parures et qui, dans la dispute, est incapable de se défendre par une argumentation claire et convaincante? ». (Q 43.18).

Les commentateurs du Qur’ān voient dans ces versets une preuve de

« la faiblesse mentale des femmes et de leurs déficiences, par rapport aux instincts des hommes. Il est dit que lorsqu’une femme prend la parole pour présenter sa cause, elle présente la cause contre elle-même ».2

Ils estiment que les femmes sont incapables d’engager une discussion raisonnable.

Si une femme « devait argumenter et se battre, elle en serait incapable [de le faire], et ne l’emporterait pas. Cela est dû à la faiblesse de sa langue, à sa déficience mentale et à son tempérament ennuyeux» 3.

De plus, les commentateurs musulmans affirment que la femme comprend qu’elle est un être – incomplet. C’est pourquoi elle essaie de renforcer sa confiance en elle …

« en se parant de breloque et autres, afin de compenser ce qui est déficient en elle » 4.

En outre, les commentateurs affirment que les hommes surpassent les femmes même dans les tâches qui « sont exclusivement effectuées par les femmes, [même si] leur part de celles-ci a été plus grande et a commencé beaucoup plus tôt que celle d’un homme ». Par conséquent, même si les femmes ont été occupées depuis le début de l’histoire à apprendre comment préparer correctement les aliments, une femme ne peut jamais espérer atteindre la compétence d’un homme « qui n’y consacre que quelques années ».5 Les hommes sont encore meilleurs que les femmes dans la conception et la broderie des tissus. Dans le domaine de la danse, les hommes sont considérés comme des professionnels, alors que la danse des femmes tend à être basée sur la performance plutôt que sur l’originalité. 6 Les femmes qui sont des génies dans un domaine donné et celles qui ont été reines au cours de l’histoire sont des cas exceptionnels qui ne changent pas cette règle. 7

la décision du Qur’ān sur le voile

Le port du voile est largement pratiqué par les femmes de la péninsule arabique depuis avant l’Islām. Les femmes portaient des foulards et laissaient la partie supérieure de leur poitrine, ainsi que leur cou et leurs oreilles, découverts. 8 Telle était l’apparence de la femme lorsqu’elle se trouvait en public devant les hommes, y compris les musulmanes qui avaient initialement conservé leurs vêtements traditionnels. 9

Cependant, les changements sociaux survenus à Médine ont convaincu Muḥammad qu’il devait rendre obligatoire le port du voile. Lorsque les femmes, y compris les épouses de Muḥammad, sortaient la nuit pour se soulager entre les palmiers et les champs, « les jeunes et les opportunistes » avaient l’habitude de harceler les femmes esclaves qui sortaient pour répondre à l’appel de la nature. Parfois, ils s’approchaient même d’une femme libre et la harcelaient, prétendant qu’ils ne pouvaient pas faire la différence entre elle et une esclave. Les femmes se rendirent donc chez Muḥammad pour se plaindre de cette situation. 10 Et c’est ainsi qu’il ordonna aux femmes libres de porter un voile, ce qui les distinguerait des esclaves :

« O Prophète! Dis à tes épouses, à tes filles, et aux femmes des croyants, de ramener sur elles leurs grands voiles: elles en seront plus vite reconnues et éviteront d’être offensées. … ». (Q 33.59). 11

D’après le commentaire d’Ibn Kathīr, cet effort fut couronné de succès. Il affirme que certains des « fornicateurs du peuple de Médine » qui avaient l’habitude de rôder la nuit pour accoster les femmes ne dérangeaient plus les libres. En fait, « s’ils voyaient une femme portant un ḥijāb [couvre-tête] complet, ils disaient : « C’est une femme libre » et ne la harcelaient pas. Mais s’ils voyaient une femme qui n’en portait pas, ils disaient : « C’est une femme esclave », et ils se jetaient sur elle. 12.

Par conséquent, Muḥammad a déclaré dans Q 33.59 qu’une distinction pouvait être faite entre une femme libre et une femme esclave. Cette distinction permettrait d’arrêter ceux qui pourraient accidentellement harceler les femmes libres. 13 Parce que le fait d’être dévoilée est devenu l’une des caractéristiques des femmes esclaves, ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb leur a interdit de porter un voile :

« S’il voyait une esclave voilée, il la battait avec un fouet pour préserver les vêtements des femmes libres » 14

Les règles du Qur’ān sur le mariage

Le Qur’ān utilise le terme al-nikāḥ pour le mariage (Q 33.49). Bien que le Qur’ān ne fixe pas de limite minimale à l’âge du mariage pour les femmes, il indique clairement qu’il est permis de donner une jeûne fille en mariage avant qu’elle n’atteigne l’âge adulte. Cette décision est mise en évidence par le verset qui traite de la période d’attente prescrite, ou ‘iddaD, pour une jeûne femme divorcée qui n’a pas encore commencé ses menstruations. Sa période d’attente est fixée à trois mois (Q 65.4). Le texte suivant permet de mieux comprendre la relation conjugale en Islām et les principes sur lesquels elle est fondée.

A – L’autorité suprême de l’homme

Le Qur’ān donne à l’homme une autorité complète dans le mariage : « L’homme est supérieur à la femme … » (Q 4.34). Le Qur’ān justifie le fait de donner cette autorité à l’homme pour les raisons suivantes :

Premièrement, la préférence lui est donnée par nature : « Dieu a préféré certains d’entre eux à d’autres … » (Q 4.34).

Deuxièmement, la préférence lui est donnée en raison de sa capacité financière : « et en ce qu’ils dépensent de leurs richesses … » (Q 4.34).

Cette position supérieure de l’homme ne change pas, même si

« une femme a assez d’argent pour subvenir à ses besoins sans qu’il ait besoin de dépenser de l’argent pour elle, ou même si elle a tellement d’argent qu’elle peut le dépenser pour lui ».15

Cette préférence est due au fait que l’homme a l’autorité sur la femme selon le Qur’ān, quelle que soit sa situation économique. Les grandes autorités de l’Islām affirment que cette règle du Qur’ān est éternelle :

« Elle précède le développement des civilisations et des législations générales et les dépasse » 16.

En outre,

« parmi les preuves instinctives et naturelles du rôle de l’homme en tant que leader, on trouve les sentiments de privation, de manque, d’inquiétude et de perte de bonheur que ressent la femme lorsqu’elle vit avec un homme qui n’assume pas ses responsabilités de leader et qui n’a pas les caractéristiques de leadership nécessaires » 17.

B – La relation entre l’épouse et le mari

Dans l’Islām, la femme est l’esclave de son mari. Muḥammad a attribué cette caractérisation aux femmes lors d’un discours prononcé pendant son dernier pèlerinage. Lorsqu’il a abordé le sujet des femmes, il a dit aux hommes que les femmes sont ‘awān, ce qui signifie qu’elles sont équivalentes à des captives. 18

La sunnaD (actions et coutumes prescrites) de Muḥammad souligne qu’une femme doit obéir aux ordres de son mari. On raconte l’histoire d’un homme qui avait ordonné à sa femme de ne pas quitter la maison pendant qu’il était en voyage. Pendant son absence, son père tomba malade, elle envoya donc demander à Muḥammad la permission d’aller voir son père. Muḥammad lui répondit :

« Obéis à ton mari ». Son père mourut, elle demanda alors à Muḥammad la permission d’aller voir le corps de son père avant l’enterrement. Il lui répondit à nouveau : « Obéis à ton mari. » Lorsque son père fut enterré, Muḥammad lui envoya un message disant :

« Allah a pardonné à son père en raison de son obéissance à son mari. » 19

En plus de l’obéissance absolue, une femme doit vénérer son mari, car Muḥammad a déclaré :

« Si une femme connaissait le droit de son mari, elle ne s’assiérait pas à l’heure du déjeuner et du souper avant qu’il n’ait fini. » 20

Une fois, une femme est venue voir Muḥammad pour lui demander quelles étaient ses obligations envers son mari. Il a répondu :

« S’il avait du pus de la racine des cheveux jusqu’au pied [de la tête aux pieds] et que vous le léchiez, vous ne lui auriez pas montré assez de gratitude. » 21

De plus, dans une autre source, Muḥammad a dit :

« S’il avait un ulcère et qu’elle le léchait, ou si du pus et du sang commençaient à sortir de son nez et qu’elle le léchait, elle ne remplirait ainsi pas son obligation envers lui. » 22

Cet ḥadīth (ou récit) est répété dans plusieurs sources et sous plusieurs variantes.

Un autre ḥadīth rapporte la déclaration suivante de Muḥammad :

« Il est du droit du mari que sa femme, si son nez devait couler de sang et de pus et que sa femme le léchait avec sa langue, elle ne remplirait pas son obligation envers lui. S’il était demandé à un humain de se prosterner devant un autre humain, j’aurais décrété que la femme se prosterne devant son mari, lorsqu’il vient à elle. C’est à cause de la grâce qu‘Allah a eue pour elle. » 23

L’obéissance et la révérence envers son mari sont deux des devoirs de l’épouse. Ces devoirs constituent pour elle un élément d’adoration. Comme l’a dit Muḥammad,

« Si une femme accomplit ses cinq prières, jeûne le mois de jeûne, garde sa chasteté et obéit à son mari, elle entrera au paradis de son Seigneur. » 24

En outre, Allah n’acceptera pas la prière d’une femme si son mari est en colère contre elle. 25

C. Le droit du mari de punir sa femme

Le Qur’ān donne au mari le droit de punir sa femme si elle sort des paramètres qu’il lui a tracés. Il donne des instructions aux hommes :

« Mais celles dont vous craignez la perversité, réprimandez-les, retirez-les dans des chambres à coucher et battez-les ; mais si elles se soumettent à vous, alors ne cherchez pas de moyen contre elles … » (Q 4.34).

Si une femme exprime son désaccord sur un sujet, refuse d’avoir des rapports sexuels avec son mari, ou quitte la maison sans la permission de son mari, elle est considérée comme déloyale. 26 L’homme doit traiter la « désobéissance » sexuelle et comportementale avec les « outils chirurgicaux » que lui donnent les règles du Qur’ān : instruire, punir sexuellement et battre.

1. Instruire

Au début du mariage, le mari rappelle à sa femme les droits qui lui sont conférés par la sharī‘a (lois islāmiques). Il peut lui dire : « Crains Allah ! J’ai des droits qui me sont dus par toi. Repens-toi de ce que tu fais. Sache que l’obéissance à mon égard fait partie de tes obligations. » 27 Si la femme refuse de satisfaire les désirs sexuels de son mari, alors il doit lui rappeler ses droits sur son corps. 28

2. La punition sexuelle (al-Hajr)

Ce mot a deux interprétations :

  • Désertion

Si une femme reste « désobéissante », son mari doit l’ignorer. Cela signifie qu’il doit cesser de lui parler et de partager son lit. 29 Certaines sources ont inclus l’abstention de rapports sexuels avec elle dans cette phase de la punition. 30 Cependant, l’opinion commune des savants musulmans est que le fait d’ignorer ou d’abandonner signifie qu’il ne doit pas lui parler, mais qu’il peut toujours avoir des relations sexuelles avec elle. Ainsi, selon la sharī‘a, un mari peut maltraiter verbalement sa femme sans renoncer à son « droit légalement donné » sur son corps. « Il la déserte [verbalement] avec sa langue et la maltraite, mais ne s’abstient pas d’avoir des rapports sexuels avec elle » 31.

  • Rapports sexuels forcés ( « serrer les liens » )

Une autre forme de discipline est donnée dans Q 4.34. Ce verset prescrit le hajr comme moyen approprié de traiter une épouse insubordonnée. Bien que hajr soit interprété comme signifiant « refuser de partager leur lit », le mot hajr a plusieurs significations. L’une de ces significations indique le hajr du chameau lorsque le propriétaire lie l’animal avec un hijār, ou corde. Un hijār est attaché aux pattes avant et arrière d’un côté de l’animal pour entraver son mouvement. 32 Cette interprétation signifie que le terme wa’hjurūhunna dans Q 4.34 ( « refuser de partager leur lit » ) signifie en fait resserrer les liens de la femme et la forcer à avoir des rapports sexuels. Ce sens est l’opinion adoptée par al-Ṭabarī, car il fonde le sens de hijār comme étant la liaison d’un chameau avec un hijār. 33 D’autres savants, qui soutiennent également cette interprétation, affirment que :

« cela signifie les attacher et les forcer à avoir des rapports [sexuels] » 34.

Le principe coranique du droit de l’homme sur le corps de la femme n’est pas ouvert à la discussion. Quel que soit son état psychologique ou physique, elle doit obéir à l’ordre de l’homme de s’allonger dans le lit et d’avoir des relations sexuelles avec lui. Muḥammad a fait des déclarations répétées en faveur de ce point de vue :

L’un des droits du mari sur sa femme est que si elle était à dos de chameau et qu’il s’approchait d’elle avec des désirs sexuels, elle ne devrait pas le refuser. 35

Si un homme appelle sa femme dans son lit, qu’elle ne vient pas et qu’il se couche en colère contre elle, les anges la maudiront jusqu’au matin. 36

3. Battre

Si les méthodes précédentes, y compris l’instruction et la violence verbale, ne parviennent pas à corriger le comportement de la femme, le mari a le droit de battre sa femme. Le verset Q 4.34 ne précise pas le mode ou la limite des coups. Cependant, on pense que Muḥammad a posé une condition à ces coups, les qualifiant de

« non excessifs ».38

Lorsqu’il s’agit d’interpréter l’expression « pas de coups excessifs », les spécialistes proposent les lignes directrices suivantes :

Évitez de frapper le visage de la femme. 39

Ne brise aucun des os de la femme. 40

Utiliser des instruments non mortels ou la force physique :41

al-siwāk (un rameau de l’arbre Salvadora persica), ou des lacets de chaussures, etc.
la main, etc. [frapper, gifler, frapper le cou et la poitrine, etc.]

La femme peut être battue pour chaque comportement qui provoque la colère de son mari ou pour chaque acte que son mari n’aime pas. 42 La littérature islāmique actuelle soutient la légitimité des coups et leur bénéfice pour « l’éducation ». Par exemple, l’érudit égyptien Muḥammad Mitwallī al-Sha’rāwī (1911-1998), considéré comme l’un des meilleurs penseurs musulmans du vingtième siècle, fait part de sa position43.

Battre n’est pas un signe de haine. Ça peut être un signe d’amour. Tant qu’elle n’est pas excessive, elle ne cause qu’une petite douleur. Une personne peut avoir recours à des coups légers sur l’être aimé parce qu’elle désire ce qui est dans son intérêt et parce qu’elle se soucie de cette personne. Une femme, par sa nature même, comprend cela, venant de son mari. Elle sait que la colère qu’il éprouve à son égard et qu’il la punit … disparaîtra bientôt et que les causes de cette disparition disparaîtront avec elle. Par conséquent, ils restent dans leur relation comme si rien ne s’était passé.

D. Les droits du mari sur le corps de la femme

Le Qur’ān considère le rapport sexuel comme un acte de l’homme que la femme reçoit. Elle n’est qu’un objet utilisé pour sa jouissance : « Vos femmes sont votre labour, venez donc dans votre labour comme vous voulez … ». (Q 2.223).

Parce qu’un mari a le droit de contrôler le corps de sa femme, comme un fermier avec sa charrue, les érudits musulmans ont entamé une discussion sur le sens du terme annā, traduit dans le verset ci-dessus par « comment ». Ce mot peut également signifier « où », « quand » et « cependant ». Par conséquent, ils ont déterminé que ce verset indique les droits sexuels suivants d’un mari sur sa femme :

  1. Il a le droit de choisir la position sexuelle qu’il désire.44
  2. Il a le droit d’avoir des relations sexuelles quand il en a envie, sauf pendant les menstruations.45
  3. Il a le droit d’avoir des relations sexuelles où il le souhaite. Par conséquent, certains prétendent que ce verset autorise les relations sexuelles anales, une opinion qui a été soutenue par les Compagnons et certains savants religieux médinois. 46 (Voir le commentaire sur Q 2.223.)

Selon le Qur’ān, l’épouse n’a aucun droit sur son propre corps. Elle est simplement comme 47 les terres agricoles que son mari laboure, selon la description d’un exégète.

E. Polygamie

Le Qur’ān autorise la polygamie. Q 4.3 dit « alors épousez ce qui vous semble bon parmi les femmes, par deux, ou trois, ou quatre, » à condition qu’elles soient traitées équitablement. Les commentateurs expliquent que « être équitable » signifie que le mari doit avoir un désir égal envers toutes ses femmes. 48 De plus, avec toutes ses femmes, il doit être juste dans « les rapports, la communion et la répartition ».49 En d’autres termes, il ne doit pas passer une quantité excessive de temps avec une femme, négligeant ainsi les autres.

La polygamie était connue dans la période précédant l’Islām, où le nombre d’épouses était illimité. Cependant, l’Islām limite le nombre d’épouses à quatre à la fois. 50 Certains interprètent la phrase « par deux, trois ou quatre » comme autorisant jusqu’à neuf épouses en prenant Muḥammad comme exemple (puisqu’il a eu, à certains moments, neuf épouses en même temps). Cependant, cette interprétation est rejetée par la majorité des commentateurs qui considèrent Muḥammad comme un cas particulier. 51 (Comparer avec le commentaire sur Q 4.2-3.)

Même si Muḥammad autorisait la polygamie, il s’y opposait lorsqu’il s’agissait pour son gendre d’épouser une autre femme. Lorsque ‘Alī Ibn Abī Ṭālib (mari de la fille de Muḥammad, Fāṭima) a voulu prendre une seconde épouse, Fāṭima et son père se sont mis en colère contre lui. 52 Muḥammad fut « blessé que sa fille la plus aimée soit intimidée par une épouse rivale. Il avait pitié d’elle et ne voulait pas qu’elle vive une expérience aussi dure ».53 Ainsi, Muḥammad avertit publiquement ‘Alī que s’il voulait se remarier, il devrait divorcer de sa femme, la fille de Muḥammad. 54

Dans l’ensemble, la polygamie a renforcé la capacité d’invasion des musulmans. Elle est devenue une sorte de machine à produire pour renforcer les armées musulmanes avec des hordes d’hommes capables d’aller au combat. Aujourd’hui encore, les auteurs musulmans considèrent la polygamie sous l’angle de l’invasion. Un auteur moderne propose ce qui suit au sujet de la polygamie et de son importance pour la propagation de l’Islām par le pouvoir de la puissance accrue :55

La polygamie est le meilleur moyen d’augmenter le taux de natalité dans les milieux qui ont besoin de beaucoup de bras pour la guerre ou pour le travail, comme dans les terres agricoles. Les musulmans sont chargés du jihād dans le but de répandre la bonne nouvelle de l’Islām et d’inviter les autres à accepter l’Islām. Par conséquent, la polygamie est capable de remplacer ce qui a été perdu dans le jihād et compense de nombreuses femmes pour la perte de leurs maris dans la guerre.

F. Divorce et remariage

Le Qur’ān approuve une méthode de divorce selon laquelle un mari a le droit de divorcer de sa femme deux fois. Cependant, il stipule qu’après la troisième fois, une femme divorcée n’est pas autorisée à retourner auprès de son premier mari

« jusqu’à ce qu’elle épouse un autre mari » (Q 2.230).

Les sources islāmiques mentionnent que le Qur’ān a institué cette règle pour renverser une pratique sociétale qui donnait au mari le droit de retourner auprès de la femme qu’il avait divorcée, tant qu’elle était dans la période d’attente prescrite (‘idda). Ainsi, certains hommes utilisaient cette pratique pour torturer leurs femmes en revenant vers elles avant la fin de la période d’attente prescrite, puis en divorçant à nouveau immédiatement. 56

Par conséquent, la législation du Qur’ān a mis fin à cette activité en exigeant qu’une femme divorcée se remarie et ait des rapports sexuels avec son nouveau mari avant de pouvoir retourner auprès de son premier mari. Dans le cas où une femme est divorcée pour la troisième fois par son mari, elle doit alors épouser un autre homme avant de pouvoir retourner auprès de son premier mari. Les étapes suivantes doivent être franchies avant qu’elle puisse retourner auprès de son premier mari, à condition qu’elle soit divorcée par son nouveau mari :

  1. Attente pendant la période prescrite (‘idda) avant le prochain mariage ;
  2. épouser un second mari (mariage contractuel);
  3. Avoir des rapports sexuels avec son nouveau mari ;
  4. Elle a obtenu le divorce de son second mari ;
  5. En revenant à son premier mari.

(Voir le commentaire sur Q 2.229-231.)

G. Période d’attente prescrite

En cas de décès de son mari, la femme a pour instruction de rester prisonnière dans sa propre maison pendant quatre mois et dix jours. Elle n’a pas le droit de se parer. Une fois cette période terminée, elle a alors le droit de quitter sa maison et de se marier (Q 2.234).

En cas de divorce, la femme doit respecter le délai d’attente prescrit. Pour une femme âgée qui est ménopausée et pour une jeûne femme qui n’a pas encore commencé ses menstruations, la durée de cette période est de trois mois. La période d’attente pour une femme enceinte correspond au reste de sa grossesse (Q 65.4).

L’islām a repris ces dispositions des Arabes pré-islāmiques et les a modifiées. La période d’attente prescrite pour une veuve était auparavant d’une année complète.57 Cependant, sous l’Islām, elle est devenue quatre mois et dix jours. Quant à la femme divorcée, elle n’avait pas de période d’attente prescrite avant l’Islām et avait le droit de se marier quand elle le voulait. Le Qur’ān, cependant, lui a imposé une période d’attente prescrite. 58

Les règles du Qur’ān sur le mariage temporaire (al-Mut’a)

Le mariage de jouissance (al-mut’a) est un mariage temporaire similaire à un mariage normal en ce qu’il est basé sur un contrat, mais il en diffère en ce que le divorce intervient automatiquement à la fin de la période convenue dans le contrat.

Ce type de mariage était pratiqué avant l’Islām. 59 Très souvent, les enfants d’al-mut’a sont attribués généalogiquement à leur mère car le père n’était souvent qu’un passant dans la ville de la mère. Les contacts entre le père et la mère cessaient souvent à la fin du contrat, et les enfants prenaient le nom de la mère et de sa tribu. 60 Muḥammad a intégré cette pratique dans l’Islām, comme le montre ce verset : « … mais ceux d’entre eux dont vous avez joui, donnez-leur leur salaire comme un dû légal … ». (Q 4.24).

Il n’y a aucune mention d’une abrogation de ce verset qui fait référence à al-mut’a. Cependant, les musulmans sunnī croient que Muḥammad a abrogé al-mut‘a. 61

L’histoire désigne ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb comme étant le premier à interdire ce type de mariage. 62 Ibn Ḥabīb mentionne les noms d’autres compagnons de Muḥammad qui ont soutenu la poursuite de la pratique d’al-mut’a:63

  • Khālid Ibn ‘Abd Allah al-Anṣarī
  • Zayd Ibn Thābit al-Anṣarī
  • Salma Ibn al-Akwa’ al-Aslamī
  • ‘Umrān Ibn al-Ḥuṣn al-Khuzā’ī
  • ‘Abd Allah Ibn al-‘Abbās Ibn ‘Abd al-Muṭṭalib

Aujourd’hui, les musulmans chiites continuent de s’en tenir à la légalité de l’al-mut’a.

Le nombre d’épouses dans al-mut’a n’est pas limité à quatre, comme dans un mariage permanent. Lorsque Ja’far al-Ṣādiq a été interrogé sur le nombre d’épouses autorisées dans al-mut’a, et s’il était limité à quatre, il a répondu :

« Non, même pas soixante-dix ».

En fait, il a dit qu’il était illimité. Il a conseillé à un autre :

« Épousez-en mille ».

Et lorsqu’on demanda à al-Hādī s’il y avait une limite spécifique au nombre d’épouses qu’un homme pouvait avoir dans al-mut’a, il répondit lui aussi qu’il n’y avait « aucune limite » 64.

Femmes esclaves « que ta main droite possède »

Le Qur’ān traite d’une autre catégorie de femmes : les femmes esclaves. Le Qur’ān donne à un homme le droit de jouir sexuellement de ses esclaves féminines sans tenir compte de leur statut familial avant leur captivité, c’est-à-dire qu’elles soient mariées ou non (Q 4.3, 24). Parce que le Qur’ān considère la femme esclave comme une propriété, elle doit obéir à tous les ordres de son propriétaire.

Étant donné que le Qur’ān considère l’esclave mâle comme une propriété, le propriétaire musulman a le droit de traiter le lien conjugal de son esclave mâle. L’une des sources de droit chiite stipule que si un propriétaire marie son esclave mâle à son esclave femelle, mais qu’ensuite le propriétaire la désire, il peut ordonner à l’esclave mâle de renoncer à elle. Si elle a terminé sa période de menstruation, le propriétaire peut alors coucher avec elle.

La jurisprudence chiite autorise également une pratique appelée « prêt du pudendum ». Cette pratique permet au propriétaire de prêter son esclave féminine à un parent ou à un ami pour le plaisir sexuel. Lorsqu’il en a fini avec elle, le parent ou l’ami la rend à son propriétaire. Encore une fois, comme une femme esclave est considérée comme un bien, son propriétaire a le droit légal de la prêter à qui il veut. 65

En outre, les règles chiites autorisent la pratique d’al-fahr, qui permet à un homme d’avoir des rapports sexuels avec deux femmes esclaves simultanément. Il peut également avoir des rapports sexuels avec l’une pendant que l’autre observe. 66 Outre d’autres variantes de rapports sexuels à trois, il semble que l’al-fahr ait été pratiqué chez les Arabes. En arabe, il est dit que

« l’homme, fait afhar, s’il s’écarte de son esclave féminine, pour assouvir son besoin avec une autre de ses esclaves féminines avec lui à la maison, et après qu’il ait fini avec la première, c’est-à-dire qu’il l’ait pénétrée mais n’ait pas éjaculé, il pénètre alors l’autre et éjacule en elle » 67.

Les érudits musulmans modernes refusent de critiquer ce traitement des femmes esclaves ; non seulement cela, mais ils l’acceptent même en théorie. Bien que les conditions politiques et internationales modernes ne permettent pas aux armées musulmanes d’envahir librement ou d’autoriser la prise de captives comme concubines, nous trouvons l’un des principaux érudits égyptiens défendant cette pratique, la considérant comme une forme de mariage. 68

Al-Sha’rāwī estime que même s’il n’est plus possible d’acheter des esclaves, cela

« n’indique pas un affaiblissement du texte. Le texte légal est toujours valide. Si un cas se présente auquel il peut être appliqué, alors il sera valide. S’il n’y a pas de cas actuel, alors le concept est toujours permis et peut être appliqué, lorsque qu’une situation se présentera».69

Quant à la société actuelle, les érudits musulmans modernes considèrent les traités internationaux concernant le traitement des captifs comme le résultat de législations terrestres, auxquelles les musulmans ne devraient pas se soumettre.

Conclusion

Cet article a examiné les règles du Qur’ān relatives au statut des femmes, ainsi que les paroles de Muḥammad utilisées par les spécialistes pour interpréter les textes coraniques. Deux facteurs dictent la position des femmes dans l’Islām.

  • Le premier est ce qui est rapporté par écrit dans le Qur’ān, et dans les paroles de Muḥammad telles qu’elles sont rassemblées dans les ḥadīths. Ces sources sont permanentes, et restent inchangées dans le temps et les lieux.
  • La seconde est l’environnement social. Ce dernier facteur peut changer en fonction du contexte historique et de la culture.

La littérature islāmique affirme que l’Islām a amélioré la position des femmes dans la péninsule arabique et qu’il est la seule doctrine religieuse qui honore les femmes. L’histoire montre que l’Islām a effectivement amélioré la situation des femmes au cours du septième siècle sous certains aspects. Par exemple, la limitation du nombre d’épouses à quatre était un changement positif par rapport aux pratiques de l’époque dans la péninsule arabique.

Une autre législation positive concernait les règles régissant l’héritage. Pendant la jāhilīya, l’ère préislāmique, les lois de l’héritage étaient très défavorables aux femmes. L’héritage n’appartenait qu’aux hommes âgés, mais pas aux femmes, tant que l’héritier mâle était capable de combattre. Par conséquent, les femmes et les jeunes hommes n’avaient pas le droit de réclamer leur héritage légitime. 70 Bien que cette pratique ne soit pas répandue dans toute la péninsule arabique, et que les femmes soient autorisées à hériter dans certaines régions de la péninsule, l’Islām donne le droit d’hériter à tous les enfants, sans condition de capacité à combattre. L’islām a également accordé aux femmes la moitié de l’héritage des hommes. Par conséquent, par rapport à la pratique de l’époque, il s’agissait d’une législation positive. Cependant, l’élargissement des droits d’héritage ne date pas de l’Islām. Il existe des exemples pré-islāmiques connus où certaines tribus arabes ont décrété qu’un homme hériterait « de la même chose que deux femmes » 71 .

À l’opposé de cela, nombre des changements implémenté par l’Islām ne sont pas positifs. Le Qur’ān autorise les hommes à battre leurs femmes, faisant de la violence domestique un acte divinement permis plutôt qu’un simple comportement individuel. En outre, l’Islām permet à un homme d’avoir des relations sexuelles, même non consenties, avec ses esclaves féminines, tolérant ainsi l’acte de viol, et le rendant même sacré.

Dans diverses sociétés anciennes et tout au long de l’histoire de l’humanité, les femmes ont vécu sous l’oppression de l’injustice sociale. Mais la différence entre la position des femmes dans l’Islām et celle des autres sociétés et cultures est que l’Islām est considéré comme la religion finale et la source de loi par ses adeptes. Par conséquent, la position des femmes est fixée, et les règles, telles que le sort des femmes dans l’héritage, doivent rester en place comme spécifiées par le Qur’ān. Bien que dans la société moderne, une femme puisse travailler et partager les charges financières de la vie, elle sera toujours privée de l’égalité dans l’héritage parce que le Qur’ān l’ordonne ainsi. Bien que de nombreux hommes musulmans modernes ne pratiquent pas la polygamie, il n’en demeure pas moins qu’un homme a toujours le droit légal d’épouser une deuxième, une troisième, voire une quatrième femme.

Dans l’ensemble, les règles coraniques concernant le traitement des femmes peuvent encore être utilisées aujourd’hui comme des outils d’oppression dans la main de l’homme musulman. Selon toute vraisemblance, les femmes musulmanes n’obtiendront jamais les mêmes droits que les hommes, car les penseurs musulmans affirment, encore aujourd’hui, que :

« la seule occupation d’une femme est de se marier et de fonder une famille. Tout autre effort qu’elle déploie n’a aucune valeur » 72.


Notes

  1. al-‘Aqqād 4 : 407.
  2. al-Zamakhshari 5 : 433 ; comparer avec al-Qurṭubi 19 : 20.
  3. al-Rāzi, Tafsir 27 : 203.
  1. Ibn Kathir 12 : 306.
  2. al-‘Aqqād 4 : 399.
  3. Ibid. 4 : 400.
  4. Ibid. 4 : 401.
  5. al-Qurṭubi 15 : 215.
  6. Ibn Kathir 10 : 217.
  7. al-Qurṭubi 17 : 230.
  8. al-Zamakhshari 5 : 98.
  9. Ibn Kathir 11 : 243.
  10. al-Ṭabari 19:181, 183 ; Ibn Kathir 11 : 243.
  11. al-Qurṭubi 17 : 233.
  12. al-‘Aqqād 4 : 398.
  13. Ibid.
  14. Abū Khalil 234.
  15. al-Qurṭubi 6 : 286.
  16. al-Ghazāli 69.
  17. al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 391.
  18. al-Ghazāli 70.
  19. al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 399 ; comparer avec Kishk 96, 97.
  20. al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 388, 392, et 397-398.
  21. al-Ghazāli 69 ; comparer avec al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 390 et Ibn Kathir 4 : 23.
  22. al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 393, 398 ; Kishk 100.
  23. al-Rāzi, Tafsīr 3 : 238 ; comparer avec al-Ṭabari 6 : 696-697.
  24. al-Rāzi, Tafsīr 10 : 93.
  25. al-Ṭabari 6 : 698 ; al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 397.
  26. al-Ṭabari 6 : 701 ; Ibn Kathir 4 : 25.
  27. Ibn al-‘Arabi 1 : 533.
  28. al-Ṭabari 6 : 704 ; comparer avec al-Qurṭubi 6 : 284 et al-Suyūṭi, al-Durr al-Manthūr 4 : 403.
  29. al-Ṭabari 6 : 705
  30. Ibid. 6 : 707 ; al-Qurṭubi 6 : 285.
  31. al-Zamakhshari 2 : 70.
  32. al-Ghazāli 71.
  33. Kishk 100.
  34. Ibn Kathir 4 : 25.
  35. al-Ṭabari 6 : 709-710.
  36. Ibid. 6 : 708.
  37. Ibid. 6 : 711.
  38. al-Ṭabari 6 : 711-712 ; al-Tha‘ālibi 2 : 230 ; al-Qurṭubi 6 : 285.
  39. al-Qurṭubi 6 : 286.
  40. al-Sha‘rāwi 98.
  41. al-Ṭabari 3 : 748.
  42. al-Qurṭubi 4 : 8.
  43. Ibid. et Ibn Kathir 2 : 312.
  44. al-Ṭabari 3 : 745.
  45. Ibid. 7 : 569.
  46. al-Qurṭubi 6 : 37.
  47. ‘Ali 5 : 547.
  48. al-Qurṭubi 6 : 33.
  49. Abd al-Raḥmān (Bint al-Shāṭi’) 605.
  50. Ibid. 606.
  51. Ibid. 609.
  52. Abū Khalil 229.
  53. al-Suyūṭi, Asbāb al-Nuzùl 44.
  54. ‘Ali 5 : 557.
  55. Ibid. 5 : 556.
  56. Ibid. 5 : 536.
  57. Ibid. 5 : 537.
  58. Ibn al-Jawzi, Nawāsikh 271 ; al-Makki 230.
  59. Ibn al-Jawzi, Nawāsikh 270 ; al-Suyūṭi, Tārīkh al-Khulafā’ 165.
  60. al-Baghdādi 289.
  61. Calder 57-58.
  62. al-‘Alawi, Fuṣùl ‘An al-Mar’a 54.
  63. Ibid. 54.
  64. Ibn Manẓūr 3479.
  65. al-Sha‘rāwi 57-58.
  66. Ibid. 59.
  67. ‘Ali 5 : 562.
  68. Ibid. 5 : 563, 565.
  69. Abū Khalil 241.

TheQ Dilemma English Book

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Tous droits réservés. Groupe TheQuran.com. Imprimé à l’origine en anglais, ISBN 978-1-935577-05-8

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Le Qur’ān expliqué: Séquence chronologique du Qur’ān

 » Coran, Ecrits Naskh. Signé par Ahmad al-Neyrizi, Datation : 1716. »
Musée national d’Iran. Photo Vigi-Sectes

L’une des difficultés auxquelles se heurte l’étudiant du Qur’ān est que son ordre ne repose pas sur le principe de la séquence chronologique. En raison de sa relation avec les questions théologiques, les savants musulmans ont accordé une attention particulière à la question de l’arrangement du texte du Qur’ān. Par exemple, dans le domaine de l’abrogation, on ne peut pas déterminer le verset qui en abroge un autre sans préciser l’ordre chronologique des versets.

La plus ancienne tentative d’enchaînement chronologique est attribuée à Ibn ‘AbbāsN (m. 68 H./ 688 J.-C.), le père traditionnel de l’exégèse. Al-Bayd. āwi (d. 716 H./ 1316 J.-C.) a souligné ce point dans son commentaire. La recherche islāmique sur le Qur’ān a atteint l’apogée de son développement entre les mains d’al-Suyūtī (m. 911/AD 1505) dans son livre al-Itqān fī ‘Ulùm al-Qur’ān, qui est devenu le point de départ de l’étude occidentale en ce qui concerne l’arrangement du Qur’ān. 1

À l’époque moderne, un savant musulman nommé Muḥammad al-Ṭāhir Ibn ‘Āshūr, dans son commentaire al-Taḥ rīr wa al-Tanwīr, reprit la question du classement des textes en tentant de régler le problème de la séquence chronologique au début de chaque surā.

L’étude de l’agencement des textes coraniques s’inscrit dans un champ de recherche de l’étude du Qur’ān connu sous le nom de M’arifat al-Makkī wa al-Madanī ( « Connaître le Mecquois et le Médinois » ). Les spécialistes musulmans du Qur’ān ont inventé les termes Mecquois et Médinois et leur ont donné trois définitions distinctes2.

  1. Mecquois : La partie du Qur’ān révélée à la Mecque avant et après l’Hégire. Médinoise : La partie du Qur’ān révélée à Médine.
  2. La Mecque : Chaque discours adressé aux habitants de la Mecque. Médinois : Chaque discours adressé aux habitants de Médine.
  3. Mecquois : La partie du Qur’ān révélée à la Mecque avant la migration. Médinois : La partie du Qur’ān révélée après la migration, que ce soit à Médine, ou à la Mecque, ou dans tout autre endroit pendant les raids de Muḥammad.

Cette dernière définition (numéro trois) est la plus populaire et est adoptée par la majorité des spécialistes musulmans du Qur’ān, ainsi que par les orientalistes, les spécialistes occidentaux des études du Moyen-Orient. Nous utiliserons donc cette dernière définition parce qu’elle permet de définir la succession chronologique, contrairement aux deux premières définitions qui ne comportent pas de séquence chronologique. Nous avons également choisi cette troisième définition parce que la première définition n’est liée à la révélation qu’en termes de géographie, et que la deuxième ne concerne que l’identité de l’auditoire de Muḥammad.

Lorsque l’on examine l’agencement du Qur’ān, trois questions majeures doivent être prises en compte : l’agencement des sūras, l’agencement des versets à l’intérieur des sūras, et la datation du texte coranique. La maîtrise de ces trois questions est cruciale pour comprendre la discontinuité du Qur’ān. Il est également important d’examiner le manque d’arrangement des versets à l’intérieur d’une même surā, l’entremêlement des versets qui appartiennent à des périodes différentes, et l’incohérence de la succession des versets à l’intérieur du texte ‘Utḥmānic, comme l’ont noté les savants chiites.

Disposition des Sūras

Selon un récit attribué à Ibn ‘Abbās, la partie mecquoise du Qur’ān comprend quatre-vingt-cinq sūras, tandis que la partie médinoise en compte vingt-huit. 3 Il est à noter que le total d’Ibn ‘Abbās n’est que de 113 et non de 114 sūras. Il se peut que la source de ce point de vue ait laissé tomber al-Fātiḥa (Q 1) de son décompte, ou que son décompte se soit appuyé sur une certaine copie qui combinait deux sūras. Dans certains codices, les sūras al-Ḍuḥa (Q 93) et al-Sharh. (Q 94) sont combinées en une seule surā. 4 En fait, il y a encore aujourd’hui un débat sur les origines mecquoises ou médinoises de dix-sept sūras:5

al-Ra’d (Q 13)al-Muṭaffifīn (Q 83)al-Takāthur (Q 102)
Muḥammad (Q 47)al-Tīn (Q 95)al-Mā’ùn (Q 107)
al-Raḥmān (Q 55)al-Qadr (Q 97)al-Ikhlā (Q 112)
al-Hādīd (Q 57)al-Bayyina (Q 98)al-Falaq (Q 113)
al-Ṣaff (Q 61)al-Zalzala (Q 99)al-Nās (Q 114)
al-Taghābun (Q 64)al-‘Âdiyāt (Q 100)
Dix-sept Sūras aux origines discutables.

En ce qui concerne la disposition du Qur’ān, les savants islāmic ont présenté deux opinions :

  • L’arrangement du Qur’ān est « institué », c’est-à-dire par l’ordre et la direction de Muḥammad.
  • L’arrangement du Qur’ān est « adaptable », en fonction des travaux des comités de compilation.

Un groupe de savants islāmic affirme également que l’arrangement de la plupart des sūras est institué. 6

Cependant, l’examen académique du Qur’ān révèle que le Qur’ān a subi un arrangement systémique simple. Après avoir rassemblé les versets dans une surā indépendante, les collecteurs ont décidé d’établir un arrangement simple basé sur une base quantitative – du plus long au plus court. La répartition actuelle du Qur’ān est basée sur quatre catégories:7

  1. Les sūras « longues » (al-ṭuwāl)-longues (plus de 100 versets).
  2. Les « cent » (al-ma’ūn) – qui suivent les sept sūras les plus longues, chacune contenant environ 100 versets.
  3. Les « doubles chiffres « (al-mathānī) – qui suivent les cent et contiennent moins de cent versets chacun.
  4. Les « sectionnés » (al-mufaṣṣal ) suivant les chiffres doubles. Ce sont les plus courtes des sūras. Les savants ont dit que cette partie est nommée al-mufaṣṣal pour les nombreuses divisions parmi les sūras. D’autres disent qu’elle a été nommée ainsi parce que ces sūras contiennent moins d’abrogations.

Arrangements coraniques alternatifs

Il est important de noter que la disposition actuelle du Qur’ān n’est pas la seule et que la disposition globale du Qur’ān – ses sūras, ses versets et parfois même la disposition des mots à l’intérieur des versets – semblait avoir peu d’importance pour Muḥammad.

En plus du texte adopté et arrangé par le comité de ‘Utḥmān, certaines références nous donnent une liste d’autres arrangements. Le tableau suivant présentera la séquence des quinze premières et des dernières sūras du Qur’ān telles qu’elles ont été arrangées par Ibn Mas‘ūd et Ibn Ka‘b :

Arrangements alternatifs des Sūra

Actuel
Qur’ūn
Codex (muṣḥāf)
d’Ibn Mas‘ūd*
Codex (muṣḥāf)
d‘Ubayy Ibn Ka‘b*
al-Fātiḥa (Q 1)al-Baqara(Q 2)al-Fātiḥ a(Q 1)
al-Baqara (Q 2)al-Nisā'(Q 4)al-Baqara(Q 2)
Āl-i ‘Imrān (Q 3)Āl-i ‘Imrān(Q 3)al-Nisā'(Q 4)
al-Nisā’ (Q 4)al-A’rāf(Q 7)Āl-i ‘Imrān(Q 3)
al-Mā’ida (Q 5)al-An’ām(Q 6)al-An’ām(Q 6)
al-An’ām (Q 6)al-Mā’ida(Q 5)al-A’rāf(Q 7)
al-A’rāf (Q 7)Yūnus(Q 10)al-Mā’ida(Q 5)
al-Anfāl (Q 8)al-Tawba(Q 9)Yūnus(Q 10)
al-Tawba (Q 9)al-Naḥ l(Q 16)al-Anfāl(Q 8)
Yūnus (Q 10)Hūd(Q 11)al-Tawba(Q 9)
Hūd (Q 11)Yūsuf(Q 12)Hūd(Q 11)
Yūsuf (Q 12)al-Isrā'(Q 17)Maryam(Q 19)
al-Ra’d (Q 13)al-Anbiyā'(Q 21)al-Shu’arā'(Q 26)
Ibrāhīm (Q 14)al-Mu‘minūn (Q 23)al-Ḥ ajj(Q 22)
al-Ḥijr (Q 15)al-Shu’arā'(Q 26)Yūsuf(Q 12)
Dernière surā : al-Nās (Q 114) Nombre total de sūras : 114Dernière surā : al-Ikhlā (Q 112) Nombre total de sūras : 111**Dernière surā : al-Nās (Q 114) Nombre total de sūras : 116***
Arrangements alternatifs des Sūra

* La disposition des sourates pour le codex d’Ibn Mas‘ūd et d‘Ubayy Ibn Ka‘b est consignée dans le livre al-Fihrist d’Ibn al-Nadīm. 8

** Ibn Mas‘ūd a laissé tomber Q 113 et Q 114 de son codex, c’est pourquoi al-Suyūtī dit de lui qu’il a 112 sūras dans son codex. Cependant, le nombre total de sūras dans son codex devait être de 111 car il n’ajoute pas non plus la surā al-Fātiḥa (Q 1). 9

*** Ibn Ka‘b a ajouté les sūras al-Ḥafd et al-Khal’ pour un total de 116 sūras. Al-Suyūtī dit que le codex d’Ibn Ka‘b ne contient que 115 sūras, car il a combiné les sūras al-Fīl (Q 105) et Quraysh (Q 106). 10 (Voir l’article: Textes coraniques controversés, page 141).

Arrangement et compilation du codex de ‘Alī Ibn Abī Ṭālib

Selon al-Ya’qnbī, ‘Alī a divisé son codex (muṣḥāf) en sept parties, selon l’arrangement suivant:11

Arrangement du codex de ‘Alī Ibn Abī Ṭālib

Première partieDeuxième partieTroisième partieQuatrième partieCinquième partieSixième partieSeptième partie
al-Baqara
(Q 2)
Āl-i ‘Imrān (Q 3)al-Nisā’
(Q 4)
al-Mā’ida
(Q 5)
al-An’ām
(Q 6)
al-A’rāf
(Q 7)
al-Anfāl (Q 8)
Ynsuf
(Q 12)
Hnd
(Q 11)
al-Nah.l
(Q 16)
Ynnus (Q 10)al-Isrā’
(Q 17)
Ibrāhīm
(Q 14)
al-Tawba (Q 9)
al-‘Ankabnt (Q 29)al-Ḥajj
(Q 22)
al-Mu‘minnn (Q 23)Maryam
(Q 19)
al-Anbiyā’
(Q 21)
al-Kahf
(Q 18)
Ṭa Ha
(Q 20)
al-Rnm (Q 30)al-Ḥijr
(Q 15)
Ya Sīn
(Q 36)
al-Shu’arā’
(Q 26)
al-Furqān
(Q 25)
al-Nnr
(Q 24)
al-Ṣāffāt
(Q 37)
Luqmān (Q 31)al-Aḥzāb (Q 33)al-Shnrā
(Q 42)
al-Zukhruf
(Q 43)
al-Qaṣa
(Q 28)
Ṣād (Q 38)al-Aḥqāf
(Q 46)
Fussilat
« j« 41)
al-Dukhān (Q 44)al -Wā » i g`a (Q 56)al-Ḥujurāt (Q 49)al-Ghāfir (Q 40)al-Zuar m (Q 39)al-Fath
(Q 48)
al-Dhāriyāt (Q 51)al-Raḥmān (Q 55)al-Mulk
(Q 67)
Qāf (Q 50)al-Mujādila (Q 58)al-Jāthiya
(Q 45)
al-Ṭnr (Q 52)
al-Insān
(Q 76)
al-Ḥāqqa (Q 69)al-Muddathir (Q 74)al-Qamar (Q 54)al-Ḥashr (Q 59)al-Bayyina
(Q 98)
al-Najm (Q 53)
al -Sajda (Q 32)al-Ma’ārij (Q 70)al-Mā’nn (Q 107)al-Mumtaḥana (Q 60)al-Jumu’a (Q 62)al-Hādīd
(Q 57)
al-Saff
(Q. 61)
al-Nāzi’āt
(Q 79)
Abasa
(Q 80)
al-Masadal-Tariq
(i86)
al-Munāfiqnn (Q 63)al-Muzzammil (Q 73)al-Taghābun (Q 64)
al-Takwīr (Q 81)al-Shams (Q 91)al-Ikhlās
(Q 11 2j
al-Balad (Q 90)al-Qalam
(Q 68)
al-Qiyāma
(Q 75)
al-Ṭalāq (Q 65)
al-Infiṭār (Q 82)al-Qadr
(Q 97)
al-‘Ar
(Q 103)
al-‘Ādiyāt
(Q 100)
Nnḥ (Q 71)al-Naba’
(Q 78)
al-Muṭaffifīn (Q 83)
al-Inshiqāq (Q 84)al-Zalzala (Q 99)al-Qāri’a
(Q 101)
al-Kawthar (Q 108)al-Jinn (Q 72)al-Ghāshiya (Q 88)al-Falaq (Q 113)
al-A’lā
(Q 87)
al-Humaza (Q 104)al-Burnj (Q 85)al-Kāfirnn (Q 109)al-Mursalāt
(Q 77)
al-Fajr (Q 89)al-Nās (Q 114)
al-Bayyina (Q 98)al-Fīl (Q 105)al-Tīn
(Q 95)

al-Ḍuḥa
(Q 93)
al-Layl
(Q 92)


Quraysh (Q 106)al-Naml
(Q 27)

al-Takāthur
(Q 102)
al-Nar
Arrangement du codex de ‘Alī Ibn Abī Ṭālib

Question : Alī Ibn Abī Ṭālib a-t-il rédigé un codex ?

Au cours de la narration de l’histoire de la compilation du Qur’ān par ‘Ali, les sources chiites affirment que ‘Ali a compilé le Qur’ān en respectant la chronologie de la révélation. Immédiatement après la mort de Muḥammad, ‘Ali s’est isolé dans sa maison « pendant trois jours jusqu’à ce qu’il compile le Qur’ān. C’était le premier Qur’ān qu’il rassemblait dans un seul livre de mémoire. Ce Qur’ān appartenait au peuple de Ja’far. » 12

Lorsque l’on soumet l’histoire à un examen minutieux, il apparaît qu’elle n’est pas crédible pour les raisons distinctes ou collectives suivantes :

  1. La nécessité de rédiger le Qur’ān n’est apparue qu’après l’expansion des armées musulmanes au-delà des frontières de la péninsule arabique, lorsque les soldats ont commencé à se disputer sur l’exactitude de leurs codex. Cette situation a obligé ‘Utḥmān à intervenir et à unifier le texte coranique. Beaucoup pensent que cette unification était un acte dont la société islāmique de Médine n’avait pas besoin, ni pendant la vie de Muḥammad ni immédiatement après sa mort.
  2. ‘Ali était occupé par des conflits politiques concernant la gouvernance depuis la mort de Muḥammad. Par conséquent, il n’avait pas de temps pour la tâche de compiler le Qur’ān.
  3. La compilation documentée du Qur’ān a nécessité un comité de plusieurs personnes qui ont travaillé avec diligence pour examiner les textes disponibles et entendre le témoignage des mémorisateurs du Qur’ān. Comment, alors, ‘Ali aurait-il été capable d’accomplir ce qu’il a fallu à un comité entier pour faire ? Et plus encore, comment a-t-il pu écrire le Qur’ān en quelques jours seulement ?
  4. ‘Alī Ibn Ṭālib reçut les rênes du pouvoir après le meurtre de ‘Utḥmān. Pourquoi n’a-t-il pas imposé son Qur’ān à toutes les régions durant son califat ? En supposant que les conditions politiques ne lui permettaient pas de diffuser son Qur’ān, en raison des troubles et du chaos qui régnaient pendant son règne, pourquoi son Qur’ān n’a-t-il pas été diffusé et utilisé par ses adeptes chiites ?

De plus, si nous prenons la liste transmise par al-Ya’qūbi (voir le tableau « Arrangement du codex de ‘Alī Ibn Abī Ṭālib», page 42), nous constaterons que le codex de ‘Ali n’est pas basé sur la séquence chronologique. Il penche plutôt vers l’arrangement quantitatif mais selon des règles différentes. Par exemple, les sept sūras longs sont répartis entre les sept parties. Les sūras plus courts sont également répartis entre les sept parties, et ainsi de suite. Il est clair que cette catégorisation s’appuie sur « la révision de ‘Utḥmān ».13 Il s’agit donc d’un texte post-‘Utḥmānic, ce qui signifie que l’allégation selon laquelle ‘Ali aurait compilé le Qur’ān, et encore moins qu’il l’aurait arrangé, est une propagande générée par ceux qui s’opposaient aux Omeyyades pour rabaisser le statut du codex ‘Utḥmānic.

Arrangement et compilation du Qur’ān basés sur le probable

Le Qur’ān est organisé selon la longueur et non la chronologie de ses sūras. Pour comprendre cette disposition inhabituelle, il faut comprendre le contexte concernant les débuts du Qur’ān et la façon dont il a finalement atteint les musulmans. Il semble que Muḥammad n’ait montré aucun intérêt pour la rédaction du Qur’ān, mais qu’il en ait écrit sporadiquement des parties à différents moments. Il ajoutait des versets à telle ou telle surā sans méthodologie claire. Parfois, Muḥammad semblait ne pas se soucier de la précision du texte coranique, ce qui est un problème exposé par ‘Abd Allah Ibn Abi Sarḥ qui était un scribe de Muḥammad.

‘Abd Allah Ibn Abi Sarḥa commencé à avoir des doutes lorsque Muḥammad a récité : « Nous avons créé l’homme à partir d’un extrait d’argile … » (Q 23.12-14). Ibn Abi Sarḥ dit à Muḥammad : « Et béni soit Dieu, le meilleur des créateurs ! ». Ce à quoi Muḥammad répondit : « Ecris-le ! Car c’est ainsi qu’il a été révélé ». La phrase fut ajoutée au corps du texte du verset. Par conséquent, Ibn Abi Sarḥ se méfia de l’appel de Muḥammad. 14

Il décida de tester la véracité de la connexion céleste de Muḥammad. Un jour, Muḥammad dicta : « Exalté en puissance, sage ». En réponse, Ibn Abi Sarḥ écrivit « Pardonneur et Miséricordieux ». Puis, quand il a lu les changements, Muḥammad lui a dit : « Oui, c’est la même chose. »

Dans une autre histoire, nous lisons qu’Ibn Abi Sarḥ a manipulé la révélation. Quand Muḥammad dictait : « Il entend et sait tout », Ibn Abi Sarḥ écrivait : « Il sait tout, le plus sage ». Et quand Muḥammad a dicté, « Connaît toutes choses, Très sage », Ibn Abi Sarḥa écrit, « Entend et connaît toutes choses » 15 Cette expérience a conduit Ibn Abi Sarḥ à rejeter l’Islām et à retourner chez les Quraysh, où il leur a déclaré la fausseté des prétentions prophétiques de Muḥammad. 16

Muḥammad l’a raillé avec cette réponse :

Qui est plus injuste que celui qui invente contre Dieu un mensonge, ou qui dit : « Je suis inspiré », alors qu’il ne l’était pas du tout, et qui dit : « Je ferai descendre la même chose que ce que Dieu a fait descendre » ? Mais as-tu vu, lorsque les injustes sont dans les flots de la mort, et que les anges tendent les mains : « Donnez vos âmes ; aujourd’hui, vous serez récompensés par le supplice de l’ignominie, parce que vous avez dit contre Dieu ce qui n’était pas vrai, et que vous étiez trop fiers pour entendre Ses signes ? (Q 6.93)

De plus, Muḥammad ne s’en tenait pas au texte coranique de manière littérale mais était indulgent avec les lectures. Il existe de nombreux rapports sur la négligence de Muḥammad concernant l’exactitude du Qur’ān. Nous lisons dans un récit que ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb remarqua, lorsqu’il entendit Hishām Ibn Ḥakim réciter la surā al-Furqān (Q 25), qu’il la lisait « avec de nombreuses lettres [c’est-à-dire des mots] » qu’il n’avait jamais entendues auparavant de la part de Muḥammad. Lorsque Hishām eut fini de prier, ‘Umar l’attrapa par son vêtement et lui demanda qui était l’auteur de cette prière, que lui a enseigné la surā. Il lui répondit que c’était Muḥammad. ‘Umar le traita de menteur. Puis ils se rendirent ensemble auprès de Muḥammad qui, après avoir entendu la récitation de Hishām, dit : « Il a été révélé ainsi », et ajouta :

« Ce Qur’ān a été descendu sur sept lettres [dialectes]. Lisez donc du Qur’ān ce qui vous est facile » 17.

Une autre histoire raconte qu’un homme est venu voir Muḥammad et lui a dit : « ‘Abd Allah Ibn Mas‘ūd m’a enseigné une surā », puis a ajouté : « Ubayy Ibn Ka‘b me l’a enseignée, mais leurs lectures différaient. Laquelle de ces lectures dois-je prendre ? ». Muḥammad garda le silence. ‘Alī, qui était assis à côté de lui, répondit :

« Que chacun lise comme on le lui a enseigné. Toutes sont bonnes et belles ! » 18

Muḥammad ne voyait pas la nécessité de rédiger le Qur’ān de manière précise, c’est pourquoi il n’a mis en œuvre aucune méthodologie pour le compiler. Il a laissé à ses disciples le soin d’accomplir cette mission et d’en fixer les règles essentielles.

Après que le comité de ‘Utḥmān ait compilé le Qur’ān, il a utilisé l’arrangement quantitatif (du plus long au plus court). Cet arrangement reposait cependant sur ce que l’œil estimait être la taille des pages et non sur le nombre de versets. Par exemple, la surā al-Nisā’ (Q 4) comporte 176 versets, alors que la surā al-A’rāf (Q 6) en comporte 201. Ainsi, cette catégorisation basée sur le total des versets n’est pas tout à fait exacte. Il se peut que le comité éditorial ait eu affaire à des manuscrits de longueurs et de tailles d’écriture différentes qui ont dissimulé la véritable longueur des sūras.

Néanmoins, cette catégorisation n’explique pas les violations les plus fortes et les plus marquantes contre le principe quantitatif mentionné ici. Par exemple, al-Ra’d (Q 13), Ibrāhīm (Q 14) et al-Ḥijr (Q 15), dont la longueur ne dépasse pas 3 ou 3 1/2 pages, ont été placées parmi des sūras dont la longueur est d’environ 7 pages chacune.

De même, on ne sait pas pourquoi al-Anfāl (Q 8), composé de 5 pages, a été placé avant al-Tawba (Q 9), composé de 10 pages, ni, d’ailleurs, pourquoi al-Sajda (Q 32), composé de 11/2 pages, a été placé avant al-Aḥzāb (Q 33), composé de 5 1/3 pages. 19

Nöldeke a présenté une raison pour cet ordonnancement arbitraire : « Le motif derrière cette méthode remarquable pourrait être la peur de terminer complètement la tâche, ce qui pourrait inciter les forces maléfiques cachées. Ce mythe est encore très répandu chez les peuples primitifs » 20.

Disposition des versets

La disposition ou la séquence des versets du Qur’ān est très inhabituelle. Non seulement les versets ne sont pas dans un ordre chronologique, mais des versets de différentes époques (mecquoise et médinoise) ont été entremêlés ensemble dans le même contexte ou surā.

A. L’absence d’agencement des versets au sein d’un même surā.

Dans de nombreux cas, la disposition des versets ne correspond pas à une séquence chronologique. Nous trouvons les premiers versets d’une surā particulière placés loin du début de cette surā. Par exemple, les versets 15 et 16 sont les deux premiers versets à être révélés de la surā al-Mā’ida (Q 5). 21 Selon l’ordre chronologique, ils auraient dû être placés au début de la surā et numérotés versets 1 et 2.

B. L’enchevêtrement de versets appartenant à des époques différentes

Il existe un autre problème concernant l’ordre des versets. Nous trouvons des versets médinois à l’intérieur des sūras mecquoises et vice versa. Les sources islāmiques font référence aux sūras qui sont composées de différentes parties – des versets mecquois et médinois mélangés:22

Sūras de la Mecque contenant
Versets médinois
Sūras de Médine contenant
Versets de la Mecque
al-An’ām (Q 6)al-Anfāl (Q 8)
al-A’rāf (Q 7)al-Tawba (Q 9)
IbrāhYm (Q 14)al-Ra’d (Q 13)
al-Naḥl (Q 16)al-Ḥajj (Q 22)
al-Isrā’ (Q 17)al-Mā’ūn (Q 107)
al-Kahf (Q 18)
Al-Qaṣaṣ (Q 28)
al-Zumar (Q 39)
al-Aḥqāf (Q 46)

En fait, le tableau ci-dessus ne comprend pas toutes les sūras dont les versets sont entremêlés. Une étude méthodologique révèle un type d’enchevêtrement qui requiert la patience et l’examen minutieux et détaillé du chercheur. On observe que la structure interne des sūras entremêlées manque d’unité et que la méthode d’organisation des versets montre qu’ils ont été disposés, même à l’intérieur d’une même surā, sans suivre de méthode particulière. Par exemple, le verset sur l’usure (Q 2.278), « Ô vous qui croyez, craignez Dieu, et remettez le solde de l’usure, si vous êtes croyants » est placé à la fin d’al-Baqara (Q 2), alors qu’il s’agit d’un verset qui appartient aux deux premières années de la migration (Hijra). 23

Dans un autre exemple, certains récits disent que le texte suivant est le dernier verset du Qur’ān : « Ils te demanderont une décision ; dis : « Dieu te donnera une décision concernant la parenté éloignée … ». (Q 4.176). 24 Ce verset est placé dans la surā al-Nisā’ (Q 4), une surā qui appartient à la période comprise entre la troisième et la cinquième année de la migration, 3-5 AH.

Observations sur les chiites

En plus de ce qui précède, les savants chiites ont convenu que les versets ne sont pas correctement disposés. Ils considèrent cela comme une preuve de la négligence dans l’arrangement des versets dans le codex ‘Utḥmānic.

Ils y voyaient aussi une preuve de l’existence d’intermittence et de distorsion dans le texte. Par exemple, la succession naturelle d’un verset ne se retrouve pas dans le verset qui suit, car elle apparaît à un endroit beaucoup plus éloigné. Cette discontinuité affecte la cohésion du contexte du verset. La succession naturelle ne peut se produire que si les compléments du verset sont trouvés et réunis à partir des différents endroits séparés. 25

Voici quelques-unes des remarques supplémentaires des chiites :

  1. Le verset : « Il [Moïse] dit : « Demandez-vous ce qui est le plus méchant au lieu de ce qui est le meilleur ? Descendez en Égypte, vous y trouverez ce que vous demandeẓ.. ». (Q 2.61) doit être suivi du verset : « Ils dirent : « Ô Moïse ! En vérité, il y a là un peuple, des géants, et nous n’y entrerons sūrement pas avant qu’ils n’en sortent …’ ». (Q 5.22). 26
  2. Le verset : « Mais si vous craignez de ne pouvoir faire justice entre les orphelins, alors épousez ce qui vous semble bon parmi les femmes … » (Q 4.3) a été descendu en même temps que « On te demandera une décision au sujet des femmes ; dis : « Dieu … » ». (Q 4.127). Par conséquent, les versets doivent être lus de cette façon : « Ils te demanderont une décision au sujet des femmes ; dis : « Dieu décide pour vous à leur sujet, et ce qui vous est répété dans le Livre ; au sujet des femmes orphelines auxquelles vous ne donnez pas ce qui leur est prescrit, et que vous répugnez à épouser. Alors, épousez ce qui vous semble bon parmi les femmes, par deux, par trois ou par quatre. » 27
  3. Les versets 104 de Q 4 et 140 de Q 3 doivent être placés dans Q 3, car les deux contextes décrivent la bataille d‘Uḥud. 28
  4. Le verset 46 de Q 26 complète ce qui est dit dans Q 20 à partir du verset 10. 29
  5. Le verset 28 de Q 32 se situe après le verset 21 de la même surā. 30
  6. Le verset 24 de Q 29 aurait dû venir immédiatement après le verset 18 de la même surā et la section qui vient entre ces deux versets a une place ailleurs. Elle a été placée là où elle est maintenant [seulement] à la suite d’une négligence lors de la compilation. 31
  7. Le verset 16 de la surā Luqmān (Q 31) doit venir immédiatement après le verset 13 de la même surā et ce qui se trouve entre les deux est une interruption anormale du legs de Luqmān pour son fils. 32
  8. Ce qui est sorti de la bouche des ennemis de Muḥammad à propos du Qur’ān, « ‘des contes de vieux qu’il a fait écrire alors qu’on les lui dicte matin et soir’ » (Q 25.5) doit être suivi de (Q 29.48) : « Tu ne pourrais réciter devant cela aucun livre, ni l’écrire de ta main droite, car dans ce cas, ceux qui le jugent vain auraient douté. » 33
  9. Concernant Q 75.16, al-Rāzī mentionne dans son commentaire que certains des chiites ont fait cette déclaration : « Un groupe de mécréants parmi les plus anciens a prétendu que ce Qur’ān avait été changé et altéré, ajouté et retranché. Ils s’y sont opposés en disant qu’il n’y a pas de corrélation entre ce verset et celui qui le précède ; et si cet arrangement venait d‘Allah, la chose ne serait pas telle. » 34

La datation du texte du Qur’ān

Si le Qur’ān n’a pas été soumis à une méthodologie dans son agencement, comment alors est-il possible de conclure que tel texte (surā ou verset) est mecquois ou médinois ?

Les savants musulmans ont trouvé ce qu’ils croyaient être une réponse honorable à cette question dans l’étude scientifique de la révélation du Qur’ān:35.

Parmi les sciences les plus honorables du Qur’ān, il y a la science de sa révélation et de son interprétation. L’agencement de : ce qui a été révélé à la Mecque et à Médine ; ce qui a été descendu à la Mecque alors que son autorité est médinoise, et ce qui a été révélé à Médine alors que son autorité est mecquoise ; ce qui a été descendu à la Mecque concernant les gens de Médine, et ce qui a été descendu à Médine concernant les gens de la Mecque ; ce qui est semblable à la révélation mecquoise dans le médinois, et ce qui est semblable à la révélation médinoise dans le mecquois ; …ce qui a été révélé à Tāif, et ce qui a été révélé à Ḥudaybīya ; ce qui a été révélé la nuit, et ce qui a été révélé le jour ; ce qui a été révélé avec d’autres révélations, et ce qui a été révélé singulièrement ; les versets médinois dans les sūras mecquoises, et les versets mecquois dans les sūras médinoises ; …et ce sur quoi ils ont divergé où les uns ont dit : c’est médinois, tandis que les autres ont dit : c’est mecquois.

Ils ont donc cherché à connaître la disposition du texte. Ils ont défini des idées pour savoir ce qui est mecquois et ce qui est médinois. Plus tard, des règles ont été élaborées par les chercheurs occidentaux. L’école occidentale, commencée par Gustav Weil dans son livre, Historisch-Kritishce Einleitung in den Koran (1844), a été améliorée par Theodor Nöldeke avec son ouvrage encyclopédique, History of The Qur’ān (Geschichte des Qorāns) (1860). Cet ouvrage a été révisé et publié en deuxième édition par Schwally. Plus tard, d’autres orientalistes publièrent une deuxième et une troisième partie de l’Histoire du Qur’ān. Suite à cette publication, Régis Blachère s’est attaché à affiner et à ordonner le livre de Nöldeke dans son ouvrage, Introduction au Coran, qui a été publié en trois volumes à Paris (1947-1950).

De plus, les orientalistes ont présenté leurs opinions concernant l’arrangement des sūras, parmi les plus importants Hartwig Hirschfeld dans son livre, New Researches into the Composition and Exegesis of the Qoran (1902). Hirschfeld établit et décrit cinq critères critiques pour comprendre le Qur’ān (confirmatif, déclamatoire, narratif, descriptif et législatif). William Muir, dans son livre, The Corân : Its Composition and Teaching (1875), présente également un arrangement libre de l’influence de Nöldeke et introduit une théorie affirmant que certains textes coraniques appartiennent à la période qui a précédé la déclaration de prophétie de Muḥammad. 36

Nous résumerons pour le lecteur les règles générales (basées sur l’ouvrage d’al-Ḥaddād) des savants musulmans et des orientalistes pour distinguer le texte coranique mecquois du texte coranique médinois :37.

  1. Le message mecquois était axé sur l’appel à Allah et le rejet du polythéisme. À Médine, lorsque Muḥammad a établi une société soumise à son autorité (Muḥammad), il a présenté un message qui avait des aspects liturgiques, régulateurs et législatifs.
  2. Chaque discussion avec les idolâtres se déroule à la Mecque et chaque débat avec les gens du LivreD se déroule à Médine.
  3. Chaque verset qui appelle au pardon appartient à la Mecque et chaque verset qui encourage le combat appartient à Médine. Tous les sūras qui contiennent un appel à une position militaire défensive appartiennent aux premières années du séjour de Muḥammad à Médine. Toutes les sūras qui contiennent un appel à une position militaire offensive appartiennent à la deuxième période de Médine après le traité de ḤudaybīyaD (6 AH/AD 628).
  4. Les histoires des prophètes et des anciennes nations remontent à la période mecquoise. De même, toutes les sūras qui parlent de l’histoire d‘Adam et de Satan, à l’exception d’al-Baqara (Q 2), sont mecquoises.
  5. Les messages qui mettent en garde contre les conséquences éternelles appartiennent à la première période mecquoise, tandis que les messages qui contiennent une campagne contre les idoles datent de la deuxième période mecquoise.
  6. Les sūras qui contiennent des jurons (serments) sont mecquoises. Ce style est absent dans les sūras médinoises.
  7. Chaque passage qui porte le nom de « al-Raḥmān : le Bienfaisant » est de la deuxième période à la Mecque.
  8. Tous les passages qui font preuve de courtoisie envers les Juifs ou qui les citent sont mecquois. En revanche, tous les passages qui portent des accusations contre les Juifs sont médinois.
  9. Citer les Gens du Livre est mecquois, tandis que les versets faisant campagne contre eux et leurs doctrines sont médinois.
  10. Dans la période médinoise, des termes tels que « Émigrants » (Muhājirūn), « Aides » (Anṣar), et « hypocrites » (opposants à l’Islām) sont mentionnés.
  11. Les sūras courtes, en général, sont de la première période mecquoise (surtout celles qui ont un style fougueux), tandis que les sūras longues qui semblent relativement calmes sont de la deuxième période mecquoise. Les sūras longues sont médinoises.
  12. À La Mecque, Muḥammad s’est déclaré en utilisant des descriptions acceptables pour l’environnement polythéiste et scripturaire mecquois, des descriptions telles que « porteur de bonnes nouvelles » et « avertisseur ». À Médine, lorsqu’il est devenu le maître obéi, il s’est présenté comme un « prophète et messager ».
  13. À La Mecque, lorsque le Qur’ān se réfère aux livres sacrés du passé en général, il les appelle « le Livre » sans détails. À Médine, les noms des livres sont précisés – Torah, Injīl, Zabūr (Psaumes) et al-Ḥikma (Sagesse). Par conséquent, les versets qui contiennent les noms distinctifs des livres sont médinois, même s’ils ont été insérés dans des sūras mecquoises. À la Mecque et à Médine, le Qur’ān nomme ceux qui possèdent les Écritures « les gens du Livre », « ceux qui possèdent le Message [al-Dhikr] » et « ceux qui sont doués de savoir ». Mais lorsqu’il les appelle « les Juifs » ou « les gens de l’Évangile », cette spécification est médinoise, même si elle a été insérée dans des sūras mecquoises.

15. Le style diffère entre les textes mecquois et médinois :

  • Les sūras mecquois ont tendance à être en prose rimée, surtout les sūras de la première période, un style rare dans le texte coranique médinois, dont les versets sont plus longs.
  • Le texte du Qur’ān mecquois est de nature narrative, semblable à un roman. Il parle de l’au-delà, des anges et des djinns. En revanche, ce style narratif est rare dans le texte coranique médinois.
  • La langue mecquoise est une langue fervente et poétique, surtout dans les premiers temps de la Mecque, tandis que la langue médinoise est déterminante. Elle aborde les référendums, les questions juridiques, les questions sociales, les questions morales, les questions familiales, et leurs réponses législatives.

Il s’agit là des règles générales, bien qu’il puisse y avoir des déviations ici et là. Un exemple est particulièrement apparent dans la première surā médinoise al-Baqara (Q 2), où Muḥammad initie la formulation de sa nouvelle langue.

Conclusion

En examinant la disposition des sūras dans le codex d’Ibn Mas‘ūd et d’Ibn Ka‘b, nous constatons que les sūras suivent une disposition quantitative, du plus long au plus court. Nous trouvons également la règle quantitative appliquée dans le codex présumé de ‘Alī Ibn Abī Ṭālib. Puisque ces versions du Qur’ān, y compris le codex officiel de ‘Utḥmānic, s’appuyaient sur la règle quantitative, elles indiquent que ce principe quantitatif, du plus long au plus court, était la meilleure résolution, et peut-être la seule, au problème de l’arrangement du Qur’ān. Cette méthode a permis aux compilateurs de contourner le dilemme de la datation.

Classer le Qur’ān selon une chronologie était presque impossible. Tout d’abord, Muḥammad a laissé les textes écrits du Qur’ān éparpillés en morceaux entre les mains des musulmans. La plupart des textes étaient simplement mémorisés. Deuxièmement, les musulmans n’avaient pas les connaissances ou les outils nécessaires pour effectuer la tâche de mise en séquence chronologique.

Cependant, la simplicité de l’arrangement a créé une difficulté dans l’investigation de la séquence chronologique des sūras. Cette difficulté était accrue par le manque de contexte des versets, en raison de l’insertion de versets médinois dans les sūras mecquois et vice versa. Par conséquent, le chercheur coranique doit étudier soigneusement et minutieusement pour comprendre le texte.

Malgré cela, les savants sunnī ont cherché à utiliser ce chaos comme un signe d’inimitabilité. Ils ont écrit des livres sur le côté créatif dans l’arrangement des sūras, dont les plus importants sont al-Burhān fī Munāsabat Tartīb Suwar al-Qur’ān de Ja’far Ibn al-Zubayr, Naẓm al-Durar fī Tanāsub al-Āyāt wa al-Suwar de Burhān al-Dīn al-Buqā’ī, et Asrār Tartīb al-Qur’ān d’al-Suyūtī. Si les auteurs de ces ouvrages cherchaient à défendre « la corrélation, la cohésion et l’unisson dans l’agencement des versets et des sūras », il est probable que ces savants répondaient implicitement aux critiques non-musulmanes du Qur’ān en général, et, spécifiquement, aux chiites qui avaient prouvé le caractère arbitraire de l’agencement du Qur’ān.


Notes

  1. Encyclopédie du Qur’ān 1 : 321-322.
  2. al-Suyūṭi, al-Itqān 45 ; al-Zarkashi 1 : 187.
  3. Ibn al-Nadim 28.
  4. al-Suyūṭi, al-Itqān 428.
  5. Encyclopédie du Qur’ān 1 : 322.
  6. al-Suyūṭi, Asrār Tartīb 68-72.
  7. al-Zarkashi 1 : 244-245.
  8. Ibn al-Nadim 29-30.
  9. al-Suyūṭi, al-Itqān 423 ; comparer avec al-Zarkashi 1 : 251 ; Ibn al-Jawzi, Funūn al-Afnān ­235 – 236.
  10. al-Suyūṭi, al-Itqān 427.
  11. al-Ya’qūbi 2 : 135.
  12. Ibn al-Nadim 30.
  13. Niildeke, Tārīkh al-Qur’ān 245.
  14. al-Zamakhshari 2 : 372.
  15. al-Ṭabari 9 : 406.
  16. Ibid. 9 : 405.
  17. Ibn al-Jawzi, Funūn al-Afnān 197-198.
  18. al-Ḥariri 140.
  19. Niildeke, Tārīkh al-Qur’ān 297-298.
  20. Ibid. 298.
  21. Ibn ‘Āshūr 6 : 71.
  22. al-Zarkashi 1 : 199-203.
  23. al-Suyūṭi, al-Itqān 177 ; Ibn al-Ḍurays 36.
  24. al-Suyūṭi, al-Itqān 176 ; Ibn al-Ḍurays 35.
  25. Goldziher 310.
  26. Ibid. 311-312.
  27. Ibid.
  28. Ibid.
  29. Ibid.
  30. Ibid.
  31. Ibid.
  32. Ibid.
  33. Vendre 19.
  34. al-Rāzi, Tafsīr 3 : 222.
  35. al-Suyūṭi, al-Itqān 44.
  36. Encyclopédie du Qur’ān 1 : 322.
  37. al-Ḥaddād, Aṭwār al-Da‘wa 291-298

TheQ Dilemma English Book

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Le Qur’ān expliqué: Définitions choisies

“ Coran, découvert à Torbat-e Jam-Razavi Khorasan. Datation : 12ème siècle.
Signé: Muhammad ibn-e ‘Ali ibn-e Muhammad ibn-e ‘Ali al-Neyshaburi al-Leythi.”
Musée national d’Iran. Photo Vigi-Sectes

Versets abrogés

Les versets abrogés sont des versets qui ont été annulés ou remplacés par un ou plusieurs autres versets. Un verset abrogé peut être classé dans l’une des trois catégories suivantes :

  • Verset dont la formulation reste dans le Qur’ān mais dont la décision est abrogée par un autre verset.
  • Verset dont la décision reste dans la sharī‘a (loi islāmique) mais dont les paroles ne sont plus dans le Qur’ān.
  • Verset dont la formulation et la décision ne sont plus applicables. Les mots ne sont plus dans le Qur’ān et sa décision n’est pas dans la sharī‘a.

Les versets qui ne sont pas touchés par l’abrogation sont considérés comme muḥkamdt (conservés). Voir khabar. (Voir l’article « L’abrogation et l’abrogé » ).

AH
ou H.

Ce terme est l’acronyme du latin anno Hegirae ( « l’année de l’Hégire » ). Selon le calendrier islāmique, le prophète Muḥammad a commencé son émigration de La Mecque à Médine en 622 de l’an 1 de l’Hégire. Cet événement est devenu le point de référence pour la numérotation des années lorsque l’Islām a adopté le calendrier lunaire arabe. Aujourd’hui, la plupart des pays musulmans utilisent à la fois le calendrier islāmique et le calendrier grégorien.

Pour passer d’une année calendaire islāmique (H) ou grégorienne (G) à l’autre, il faut utiliser l’une des équations suivantes :

G = 0,97023×Ḥ+ 621,57

H.= (G – 621,57)/0,9702

Allah

Allah est le nom de l’être divin dans l’Islām. Il est transcendant, inatteignable et inconnaissable – au-delà de la compréhension. Il est également connu par ses différents attributs (quatre-vingt-dix-neuf noms au total).

al-Anṣar

Muḥammad et ses disciples, connus sous le nom d’al-Muhdjirūn ( « les émigrants » ), ont émigré de La Mecque à Médine en 622 H/AD. Les Anṣār sont les membres des tribus des Aws et des Khazraj qui ont soutenu Muḥammad parmi les habitants de Médine. Les Anṣar sont devenus musulmans et ont rejoint Muḥammad dans ses raids contre les Quraysh.

Apocryphes

Ce mot grec ān6icpvcpa signifie « caché, dissimulé » ou « fallacieux ». Ce terme désigne les écrits qui ne figurent pas dans le canon (livres saints) de l’église hébraïque ou chrétienne protestante. Au quatrième siècle de notre ère, ils ont été déclarés inférieurs et inauthentiques par les Pères de l’Église, qui ont restreint leur utilisation dans le culte public.

Au cours des premiers siècles de l’ère chrétienne, une grande quantité d’autres écrits non canoniques sont apparus, destinés principalement à fournir davantage d’informations sur Jésus et les apôtres. Leur contenu varie de l’orthodoxie à l’étrangeté. Aucun de ces écrits n’a été accepté comme canonique par l’Église. Voir l’Évangile de l’enfance de Thomas.

Depuis le XVIIIe siècle, cependant, les chercheurs occidentaux ont rassemblé et classé les textes apocryphes de l‘Ancien et du Nouveau Testament, afin que les chercheurs et les théologiens puissent les soumettre à une étude scientifique et historique.

Apollinarisme

L’apollinarisme est une hérésie chrétienne qui doit son nom à son auteur, Apollinaris, évêque de Laodicée (310-390 ap. J.-C.). Les adeptes de l’apollinarisme affirment que Jésus avait un corps humain et une āme dotée de sens. Cependant, ils croient qu’il avait un Logos divin au lieu d’un esprit, ce qui signifie que son esprit en tant qu’humain a été remplacé par la deuxième personne de la Trinité. Comme le docétisme, une autre doctrine hérétique, l’apollinarisme rejetait le fait que Jésus était pleinement humain. Dénoncée et condamnée par différents conciles chrétiens, cette secte autrefois populaire s’est rapidement éteinte.

Forme arabe double (al-muthannd)

Contrairement à la langue anglaise, qui utilise une forme singulière pour un et une forme plurielle pour plus d’un, la langue arabe utilise une forme double supplémentaire pour deux sujets ou entités.

al-Basmala

Ce terme fait référence à la formule « Au nom du Dieu miséricordieux et compatissant » (traduction Palmer). La Basmala se trouve au début de chaque surā du Qur’ān, à l’exception de Q 9. En revanche, la Basmala est mentionnée deux fois dans la sourate al-Naml (Q 27) : une fois au début et au verset 30.

Bataille de Badr

Cette bataille décisive (2/AD 624) a marqué un tournant pour les premiers musulmans dans leur objectif de s’établir et de soumettre leurs adversaires. Contrairement aux escarmouches précédentes, cette bataille fut le premier engagement à grande échelle entre les forces militaires de Muḥammad et leurs principaux adversaires, les Quraysh. Après avoir tué plusieurs chefs importants, dont un chef de tribu de haut rang, Abū al-Ḥakam ‘Amr Ibn Hishām al-Makhzūmī, les musulmans ont pu revendiquer leur victoire. La bataille de Badr est l’une des rares batailles spécifiquement mentionnées dans le Qur’ān.

La bataille des tranchées

La cinquième année après l’Hijra (627 ap. J.-C.), les Quraysh et leurs partisans, les tribus de Ghaṭafān et de Kināna, assiègent Médine. Ses défenseurs, les musulmans (menés par Muḥammad), ont creusé une tranchée autour de certaines parties de la ville sur les conseils de Salmān al-Fārisī (le Perse). Cette stratégie empêchait les ennemis d’avancer avec leurs chameaux et leurs chevaux. L’impasse qui en résulta, ainsi que la baisse de moral et les mauvaises conditions météorologiques, finirent par forcer la retraite des Quraysh et de leurs alliés.

Bataille de Uḥud

Survenant après la bataille de Badr, cette bataille fut le deuxième engagement militaire majeur entre les Quraysh et les musulmans en 625 ap. Se battant sur les pentes et dans les plaines du mont Uḥud, les musulmans ont d’abord eu l’avantage, mais l’ont perdu lorsque certains archers musulmans ont quitté leur poste pour piller le camp mecquois. L’armée mecquoise réussit à mettre en déroute les troupes musulmanes non protégées par une attaque surprise. De nombreux musulmans sont tués et Muḥammad est gravement blessé. Cette défaite musulmane fut un revers sérieux mais finalement temporaire. Voir Bataille de la tranchée.

C. ( « circa » )

Cette abréviation signifie « environ ».

codex/codices

Un codex est un volume manuscrit, notamment d’une œuvre classique ou des écritures. Dans le cadre de cet ouvrage, le mot codex (pluriel : codices) est utilisé de manière interchangeable avec le mot arabe muṣḥāf (pluriel : maṣāḥif) et désigne toute collection littéraire des sūras et des versets du Qur’ān réalisée par des scribes musulmans (y compris le travail achevé par le comité de ‘Utḥmān, 653-654 ap. J.-C.). Ces collections, ou codices, peuvent différer d’un scribe à l’autre en termes de nombre de sūras ou de versets inclus ou exclus. Parmi les plus connues de ces autres versions du Qur’ān, on peut citer le codex d’Ibn Mas‘ūd et celui d’Ibn Ka‘b.

Compagnons (al-aḥāba)

Désigne un groupe de musulmans qui ont accompagné Muḥammad pendant une longue période.

Cette abréviation signifie « mort ». La date figurant après cette abréviation indique la date du décès.

Le jour du Jugement

Ce terme fait référence au Jour du Jugement où Dieu jugera chaque personne selon ses actes. L’islām fait une distinction entre le jour du jugement, Yawm al-Hisab, et le jour final, Yawm al-Qiyama, le jour cataclysmique.

d. c.

Cette abréviation signifie « mort environ » ou « mort approximativement » à cette date.

al-Dhikr

Le mot signifie « ce qui est mentionné verbalement » à partir du verbe dhakara. Il peut également signifier « souvenir » à partir du verbe tadhakara. Ce mot apparaît dans le Qur’ān avec plusieurs significations. L’un de ces sens est la Bible ; Q 16 et Q 21 affirment que al-Dhikr avait été révélé aux prophètes avant l’Islām. À la fin de Q 21, al-Dhikr fait clairement référence à la Torah. Dans Q 38, al-Dhikr est décrit comme l’origine principale à partir de laquelle le Qur’ān se ramifie. Puisque le Qur’ān déclare que al-Dhikr n’est pas modifiable, malgré les nombreux versets clairs indiquant que al-Dhikr a été donné avant Muḥammad, les musulmans pensent que le terme s’applique au Qur’ān.

marques diacritiques

Une caractéristique importante de la langue arabe est le marquage appliqué aux caractères arabes (ou à une combinaison de caractères) indiquant une valeur phonétique différente de celle donnée au caractère non marqué. Étant donné que plusieurs lettres de l’alphabet arabe partagent les mêmes formes et que les voyelles ne sont pas clairement indiquées, une certaine forme de marquage diacritique était nécessaire pour éviter toute confusion.

Selon les sources islāmiques, al-Du’ali a conçu la première forme de distinction des lettres du Qur’ān à la fin du septième siècle de notre ère. Cette forme primitive fut améliorée au huitième siècle de notre ère par al-Khalīl Ibn Aḥmad al-Farāhidī, qui conçut un système diacritique de points et d’accents permettant de mieux distinguer les lettres arabes.

Son système, devenu universel au début du XIe siècle, comprend six signes diacritiques : fatḥa (a), ḍamma (u), kasra (i), sukūn (sans voyelle), shadda (double consonne) et madda (prolongation de voyelle ; appliqué à l’alif). Il a également ajouté le hamza aux voyelles longues. L’absence de ces marques sur une lettre ou un mot peut modifier la prononciation de la lettre ou du mot et le sens ultérieur de ce mot.

Emigrants

Voir al-Muhājirūn.

Pèlerinage d’adieu

En 632 de l’an 10 de l’hégire, Muḥammad a effectué son dernier pèlerinage (pèlerinage d’adieu). À cette époque, Muḥammad s’est rendu à la Mecque pour définir les rites du pèlerinage. Il a également prononcé un discours, appelé plus tard le discours d’adieu. Il est mort d’une maladie peu de temps après.

Rapide de ‘Āshūra’.

Ce terme s’applique au jeûne du dixième jour du mois lunaire de Muhārram. Les Quraysh et les Juifs avaient l’habitude d’observer ce jeûne. Lorsque Muḥammad a émigré à Médine, il a demandé aux Juifs qui s’y trouvaient les raisons pour lesquelles ils observaient ce jeûne. Ils répondirent qu’ils commémoraient par ce jeûne le jour où Dieu avait délivré Moïse et son peuple du Pharaon. Muḥammad a répondu que Moïse appartient plus légitimement aux musulmans et a ordonné que les musulmans honorent également ce jeûne. Lorsque le Ramadan a été imposé plus tard, Muḥammad a laissé la décision aux préférences personnelles des musulmans d’observer ou non le jeûne de ‘Āshùrā.

al-Furqān

Voir l’article « Introduction ».

Gabriel

Voir Jibrīl.

ginn

Voir djinn.

ḥadith

Le mot ḥadīth peut être traduit par un discours, une parole, ou même une petite conversation. En théologie islāmique, le terme désigne un récit concernant un acte ou une parole de Muḥammad rapporté par ses compagnons.

al-Ḥanifiya

Ce terme fait référence à un groupe d‘Arabes qui ont choisi le monothéisme plutôt que le culte des idoles. (Pour un traitement complet de cette définition, voir Q 3.67.)

Aides

Voir al-Anṣar.

Ḥijāz

Cette région géographique est située sur la côte ouest de l’actuelle Arabie saoudite, le long de la mer Rouge. Elle s’étend de la pointe nord de la mer Rouge au golfe d‘Aqaba et jusqu’au sud. Elle comprend des villes importantes comme Djeddah et Médine, avec La Mecque comme chef-lieu.

al-‘idda

Ce terme s’applique à la période qu’une femme divorcée ou une veuve doit attendre avant de se remarier dans l’Islām. Cette période d’attente prescrite a été édictée pour s’assurer que la femme n’est pas enceinte avant de se remarier. (Voir l’article « Les femmes dans le Qur’ān » à la page 87).

ifṭār

Chaque jour pendant le Ramadan, les musulmans s’abstiennent de manger, de boire et d’avoir des relations sexuelles du lever au coucher du soleil. Le repas du soir qui rompt le jeûne de la journée est appelé ifṭār.

imām

Le titre « imām » représente quelqu’un qui est imité et suivi comme un leader. La définition d’un imām varie d’une secte islāmique à l’autre. Selon la secte Sunnī, un imām est quelqu’un qui a une meilleure connaissance des questions religieuses, de la loi sharīā, et qui a mémorisé une plus grande partie du Qur’ān. Il peut diriger les autres dans les prières, mais une femme n’est pas autorisée à être un imām (un chef de prière) en présence d’un homme. Cependant, selon la secte chiite, un imām porte des attributs supplémentaires ; il représente le prophète de l’Islām (sauf s’il reçoit une révélation) dans son rôle fonctionnel de guide spirituel pour tous les gens et est une source de leur bonheur terrestre et éternel.

Évangile de l’enfance de Thomas

L’Évangile de l’enfance de Thomas est un écrit apocryphe datant du deuxième ou troisième siècle de notre ère. Il s’agit d’une collection de récits censés concerner Jésus entre l’âge de cinq et douze ans. Cette œuvre a finalement été considérée comme inauthentique et inacceptable par les Pères de l’Église pour être incluse dans le canon officiel des Écritures chrétiennes.

Son contenu dépeint Jésus comme un enfant divin, doté de pouvoirs surnaturels (un peu comme un jeûne dieu dans un mythe grec). Parfois, ce jeûne Jésus fait preuve d’une nature vengeresse et arrogante en maudissant ou même en tuant ceux qui le contrarient. (Voir Q 3.46, 49.)

Injīl (Évangile)

Le terme Injīl, ou Évangile, trouve ses racines dans le mot grec « evangelion », qui signifie « évangéliser » ou « partager la bonne nouvelle. » Même s’il s’agit d’un mot étranger, il est inclus dans le Qur’ān. Ce mot est mentionné douze fois dans le Qur’ān, principalement pendant la période médinoise. Selon l’Islām, l’Injīl est un livre qu‘Allah a révélé directement à Jésus. Les musulmans croient que l’Injīl contient une prophétie

concernant la naissance et la venue de Muḥammad (Q 7.157 ; Q 61.6). Bien que le Qur’ān ne fasse aucune distinction entre l’Injīl et les Évangiles du Nouveau Testament, l’utilisation du singulier Injīl dans le Qur’ān a conduit les théologiens musulmans à porter des accusations contre les chrétiens en affirmant qu’ils ont corrompu l’Évangile original (Injīl) pour accommoder les doctrines chrétiennes ultérieures, telles que la Trinité. Selon ces critiques musulmans, l’existence de quatre évangiles au lieu d’un seul est la preuve d’une telle corruption.

Jibrīl (Gabriel)

Selon la croyance islāmique, Jibrīl est le délivreur de l’inspiration à Muḥammad. Le nom « Jibrīl » était connu avant l’Islām et est mentionné dans la Bible en Dāniel 8.16 et 9.21. On pense que le nom « Jibrīl » est parvenu à Muḥammad par une source syriaque. La première apparition islāmique du nom « Jibrīl » se trouve à Médine. (Voir l’article « Le Jibrīl de Muḥammad » ).

jibād

Selon les théologiens islāmiques, le terme jihād représente la lutte physique et spirituelle pour la cause d‘Allah. Le concept de jihād comme lutte armée semble être la compréhension prédominante de la plupart des musulmans depuis les derniers jours de Muḥammad. Les érudits musulmans s’accordent à dire que le commandement du jihād est obligatoire pour tous les musulmans, mais ils présentent deux points de vue spécifiant comment les musulmans doivent y obéir : (1) dans le cas d’une guerre islāmique lancée contre les non-musulmans, seuls les musulmans valides sont censés se battre, ou (2) le jihād impose la participation de tous les musulmans, y compris les anciens, les femmes et les enfants.

djinn

Les musulmans croient que les djinns sont des êtres invisibles qui coexistent avec les humains sur terre. Selon la tradition musulmane, les djinns sont considérés comme des hommes, sujets au salut et à la damnation futurs. Même s’ils sont séparés de l’humanité, ils partagent certaines qualités avec les humains, telles que l’intelligence, la discrimination et la capacité de liberté. Ils ont le pouvoir de choisir entre le vrai et le faux ; ils peuvent donc accepter ou rejeter les messages révélés par Allah. Selon le Qur’ān, un groupe de djinns s’est converti à l’Islām après avoir entendu le Qur’ān. (Voir Q 72.1-7 et Q 15.27, dans le deuxième volume de ce livre).

jizya

Il s’agit de la taxe principale imposée par l’Islām à tous les Gens du Livre qui n’embrassent pas l’Islām comme religion. L’objectif de cette taxe est de soumettre et d’humilier le bénéficiaire. En contrepartie, le bénéficiaire peut vivre et pratiquer sa propre foi parmi les musulmans de sa communauté. Le montant de la taxe n’est pas fixe et, sur la base de la décision du gouverneur local, il peut changer d’une région à l’autre, conformément à Q 9.29 : « Combattez ceux qui ne croient pas ».

en Dieu et au jour dernier, et qui n’interdisent pas ce que Dieu et Son apôtre ont interdit, et qui ne pratiquent pas la religion de vérité parmi ceux à qui le Livre a été apporté, jusqu’à ce qu’ils paient le tribut par leurs mains et soient comme des petits ». (Voir plus de discussion sur la jizya dans l’article « Le Qur’ān et les gens d’autres confessions » aux pages 103).

al-Ka‘ba

Depuis l’Islām, ce terme désigne la structure cubique de La Mecque, considérée comme le site le plus sacré de l’Islām. Selon la tradition islāmique, cette structure a été érigée à l’époque d‘Abraham, qui l’a construite avec l’aide de son fils Ismaël. Cette structure de granit, drapée d’une couverture de soie et de coton noirs avec des versets coraniques brodés, mesure environ 43 pieds de haut. À son angle oriental se trouve la Pierre noire, une relique sacrée que la tradition islāmique fait remonter à l’époque d‘Adam et d’Ève.

Cinq fois par jour, les musulmans du monde entier font face à la Ka‘ba lorsqu’ils s’agenouillent pour prier. Au moins une fois dans leur vie, les musulmans (s’ils en sont capables) sont tenus d’accomplir le Ḥajj (pèlerinage) à La Mecque, où ils circumambulent sept fois autour de la Ka‘ba, l’un des cinq piliers de l’Islām. (Voir également Q 2.158. Pour plus de discussion sur les autres ka’bas, voir le commentaire Q 2.125-129).

kdfir/kuffdr

D’un point de vue islāmiste, quiconque ne croit pas en Muḥammad en tant que prophète et n’embrasse pas l’Islām en tant que religion est considéré comme un infidèle, ou kāfir (pluriel : kuffār).

khabar

Une narration sur un événement qui s’est produit est appelée un rapport, ou khabar. Dans le Qur’ān, un tel rapport ne peut être abrogé car cela signifierait que l’événement n’a pas eu lieu et impliquerait qu’il s’agit d’un mensonge. Voir versets abrogés.

Dernier jour

Voir Jour du Jugement.

liturgie

Ce mot est issu d’un mot grec composé, leitourgos ( « un homme qui accomplit un devoir public » ). Au fil du temps, ce mot a pris un sens religieux lorsque les chrétiens l’ont utilisé pour désigner le service public officiel de l’Église. Aujourd’hui, le mot désigne généralement l’ensemble des rites, cérémonies, prières et sacrements de l’Église, par opposition aux dévotions privées.

Magiciens

Les membres de cet ancien culte religieux perse (vers le sixième siècle avant J.-C.) utilisaient des autels de feu et des sacrifices pour accomplir leurs nombreux rituels. Avec le temps, ils ont assimilé et formalisé certaines idées et croyances du zoroastrisme : le monothéisme, la croyance en une divinité suprême et le dualisme, la lutte constante entre la lumière (le bien) et les ténèbres (le mal). À leur apogée, l’influence des Magians s’étendait jusqu’à Bahreïn, Oman et Yamāma (une région d‘Arabie saoudite actuellement appelée Najd).

al-Mahdī (Muhjammad Ibn al-Hj assan al-‘Askarī)

En arabe, al-Mahdī signifie « le guidé ». Selon la croyance islāmique, al-Mahdī, un descendant de Muḥammad, viendra à la fin des temps accompagné de ‘Īsā (Jésus) pour établir un royaume islāmique utopique.

Les chiites diffèrent des sunnites en croyant qu’al-Mahdī (le douzième imām) a disparu. Les chiites duodécimains croient que cet homme n’est pas mort mais a été « caché » par Dieu.

La Mecque (Makka)

Cette ville est le lieu de naissance de Muḥammad et, à son époque, elle était un important centre financier. Au cours des siècles, la Mecque a été appelée de nombreux autres noms, notamment Umm al-Qurā, « Mère des villes », et Bakka. (Voir Q 3.96).

Texte du Qur’ān de la Mecque

C’est la partie du Qur’ān qui a été révélée à la Mecque, selon les enseignements islāmiques. Cette partie comporte soixante-huit chapitres (sūras). Voir Texte coranique médinois.

Médine (Yathrib)

En 622, Muḥammad a migré vers cette colonie agricole florissante pour y diffuser son message sur l’Islām. À l’époque de la Hijra (Hégire) de Muḥammad, cette ville oasis était connue sous le nom de Yathrib. Avec le temps, Muḥammad a interdit ce nom, l’appelant plutôt la « Ville de la Lumière » ou al-Madīna al-Munawara. Aujourd’hui, elle est considérée comme la deuxième ville la plus sainte de l’Islām. Muḥammad y est enterré dans l’al-Masjid al-Nabawī (Mosquée du Prophète).

Texte du Qur’ān médinois

C’est la partie du Qur’ān qui a été révélée à Médine, selon les enseignements islāmiques. Cette partie comporte vingt-huit chapitres (sūras). Voir texte coranique mecquois.

messager

Selon l’enseignement islāmique, un messager est une personne qu‘Allah choisit pour délivrer un message divin. L’islām compte Moïse, David et Jésus parmi ces messagers uniques ; cependant, Muḥammad est considéré comme le dernier et le plus grand messager. (Il convient de noter qu’il n’y a pas de femmes messagères selon les enseignements islāmiques).

Midrash Rabbah

Le mot midrash signifie commentaire, explication, recherche et étude. Le Midrash Rabbah fait référence à un groupe de commentaires et de mythes concernant les cinq premiers livres de l‘Ancien Testament, connus sous le nom de Pentateuque, ou Torah. Ces commentaires sont passés de la récitation orale à la forme écrite et ont été compilés dans un ouvrage massif à la fin du troisième siècle de notre ère.

Mishnah

C’est le premier registre des législations religieuses orales du judaïsme et il est considéré comme le second après le Tanakh (l’intégralité de l‘Ancien Testament) en ce qui concerne son autorité sur les questions religieuses. La mise par écrit de ces traditions orales a commencé après la destruction du temple de Jérusalem en 70 après JC.

La Mishnah contient six divisions appelées sedarim. Chaque sedarim est composé de sept à douze articles. Une section appelée la Gemara a été ajoutée au cours des trois siècles qui ont suivi l’an 70. La Gemara et la Mishnah constituent ensemble le Talmud.

Les enseignants religieux de la Mishnah sont connus sous le nom de tannaim. La Mishnah comprend leurs opinions concernant différentes questions religieuses et certains de leurs dialogues entre eux.

al-Muhdjirūn ( « les émigrants » )

Ce titre s’applique aux premiers disciples de Muḥammad, qui ont émigré avec lui de La Mecque à Médine pendant l’Hijra (1/AD 622).

muḥkamdt et mutashdbihdt

Le Qur’ān indique qu’il contient deux types de versets ; les deux sont des parties fondamentales du livre et les deux doivent être acceptés même si les lecteurs ne comprennent pas toujours. (Voir Q 3.7). Les versets clairs et sans ambiguïté avec une seule interprétation sont appelés muḥkamāt ( « révélations décisives et claires » ). Les versets dont les interprétations ne sont pas claires ou multiples sont appelés mutashābihāt ( « similaires, ambigus, allégoriques » ).

al-mushrikūn

En arabe, le mot mushrikūn signifie littéralement « ceux qui prennent un associé [à Dieu] ». Dans le Qur’ān, ce terme désigne les idolâtres et les polythéistes.

al-mut’a (mariage temporaire)

L’al-mut’a est un type spécial de mariage, où l’homme et la femme conviennent mutuellement d’un arrangement conjugal d’une durée déterminée (une heure, un jour, une semaine, etc.). Comme pour un mariage ordinaire, un certificat est délivré, une dot (paiement pour le temps passé ensemble) est versée et al-‘idda est observé. Cependant, le mariage prend fin comme stipulé dans le contrat de mariage. En cas de décès, aucun héritage n’est attribué à la partie survivante.

Au début de l’Islām, les Sunnī considéraient initialement ce type de mariage comme permis jusqu’à ce que Muḥammad abroge cette pratique par un ḥadīth l’interdisant. Cependant, les chiites tiennent toujours à la légitimité de l’al-mut’a. (Voir l’article « Les femmes dans le Qur’ān » ).

al-Mutakallimūn

Ce terme a d’abord été donné à un groupe de personnes qui étudiaient et pratiquaient le kalām, une discipline philosophique islāmique qui a débuté au deuxième siècle de l’hégire. Maintenant, ce terme est un nom commun pour tous ceux qui cherchent une démonstration philosophique pour confirmer les principes religieux. Les Al-Mutakallimūn recherchent la connaissance théologique par le débat et l’argumentation, en utilisant la raison pour établir et soutenir les principes Islāmù. Le but de ce mouvement était de faire passer les musulmans des croyances traditionnelles à une doctrine vérifiable et de présenter une réponse raisonnée aux mouvements cultuels au sein de l’Islām, ou al-firaq al-d. ālla.

Mu‘tazila, Mu‘tazilite

L’une des écoles théologiques importantes dans l’étude du Qur’ān est la Mu‘tazila. Fondé au deuxième siècle de l’hégire (huitième siècle de notre ère), ce mouvement s’est épanoui pendant l’ère abbasside. Son nom dérive de l’expression « ceux qui se retirent (se séparent) » parce que le fondateur de ce groupe n’a pas soutenu les opinions prédominantes de deux autres écoles, Ahl al-Sunna et al-Khawārij, lors d’une dispute théologique.

al-Nasī’

Le terme s’applique à l’un des mois lunaires du calendrier arabe ; à l’origine, il s’agissait du premier mois de l’année. Le calendrier arabe étant composé de douze mois lunaires sur une année de 354 ou 355 jours, ce mois était prolongé de jours supplémentaires (un mois supplémentaire) tous les trois ans par les premiers Arabes pour compenser la différence entre les années solaire et lunaire (environ onze jours par an). Cette pratique consistant à ajouter périodiquement un mois supplémentaire a été mise en place pour des raisons agricoles et commerciales. Cependant, après 10 H/AD 632, l’extension d’al-Nasī’ fut interdite et l’année musulmane fut limitée à seulement douze mois lunaires.

Orientalistes, Orientalisme

L’orientalisme est l’étude des sociétés et des cultures du Proche et de l’Extrême-Orient par les Occidentaux. En termes de recherche islāmique, les orientalistes ( « al-Mustashriqūn » ) du passé ont essayé de restaurer les textes coraniques et les écrits sacrés qui s’y rapportent et de reconstituer la chronologie de l’histoire de l’humanité.

de tels textes. Nombreux sont ceux qui ont étudié l’histoire de l’exégèse en lisant et en examinant les écrits des savants et des commentateurs islāmiques.

Inscriptions palmyriennes

Découvertes près de Palmyre et des régions adjacentes, ces inscriptions anciennes (attribuées à des marchands et des soldats palmyrènes) ont aidé les chercheurs dans leurs études de l’épigraphie sémitique. La plus ancienne inscription date de 44 avant J.-C. et la plus récente de 274 après J.-C..

Les gens du livre

Les jurisprudents de l’Islām s’accordent à dire que les gens du Livre sont les juifs et les chrétiens. Certains incluent également les Sabéens et les Magyars. Lorsque l’Islām s’est développé, Muḥammad a proclamé que les Gens du Livre devaient payer l’al-jizya (impôt de capitation) s’ils ne se convertissaient pas à l’Islām (Q 46).

Tablette conservée

Selon l’enseignement de l’Islām, il s’agit d’un livre céleste dans lequel Allah a écrit son Qur’ān et l’a préservé de tout ajout ou suppression. Allah l’a fait descendre à Muḥammad à diverses occasions sur une période de treize ans.

prophète

Selon les savants musulmans, la distinction entre un prophète et un messager est que le prophète reçoit un message par l’intermédiaire d’un ange, l’entend dans son cœur ou reçoit une vision. Le messager reçoit une révélation supérieure par l’intermédiaire de Jibril (Gabriel).

Quraysh

Ils étaient les tribus de la Mecque et de ses environs au début de l’histoire de l’Islām. Il a été dit que la première personne à les unir était Quṣay Ibn Kilāb. Ces tribus étaient dans le commerce et non dans l’agriculture ou le pastoralisme.

rabbin/rabbin

Bien qu’il soit parfois un chef spirituel, un rabbin est un enseignant officiellement ordonné et un maître de la loi juive. Il possède l’éducation nécessaire pour enseigner la Halacha (voir littérature rabbinique) et émettre des instructions concernant les traditions sociales. Le cinquième surā du Qur’ān est également nommé le chapitre des rabbins.

littérature rabbinique

Ce terme fait référence à la Halacha, qui est l’ensemble des traditions qui s’appuient sur la loi juive orale. Les commentaires et explications contenus dans la Halacha sont utilisés par les Juifs pieux comme un guide pour mener une vie religieuse, éthique et morale. Dans les études historiques, ainsi que dans ce livre, le terme est utilisé en référence aux commentaires des premiers rabbins sur les livres saints, par exemple la Torah, avant le septième siècle de notre ère. Les rabbins ont verbalement

enseignaient et expliquaient les livres saints à leurs disciples, qui, devenus eux-mêmes rabbins, transmettaient ces explications et y ajoutaient les leurs. Ces commentaires et explications oraux ont finalement été mis par écrit au deuxième siècle de notre ère.

Ramadan

Le Ramadan est l’un des mois lunaires du calendrier musulman. Chaque année, durant ce mois, les musulmans jeūnent depuis la deuxième année de l’Hijra (AḤ2). Pendant le Ramadan, les musulmans s’abstiennent de manger, de boire et d’avoir des relations sexuelles du lever au coucher du soleil. L’exemption du jeûne n’est accordée qu’aux personnes malades, aux femmes enceintes ou en période de menstruation, aux voyageurs, aux jeunes enfants et aux personnes souffrant d’un handicap mental. Toutes les autres personnes sont tenues de jeūner pendant ce mois. La punition pour avoir rompu intentionnellement le jeûne pendant le Ramadan est de nourrir soixante personnes pauvres ou de jeūner deux mois consécutifs.

al-Sab ‘al-Mathāni

Ce titre désigne l’ensemble du Qur’ān ou plusieurs de ses parties. Il désigne également la première surā du Qur’ān, qui contient sept (sab’) versets. Le mot mathānī a plusieurs significations et applications :

  • Signifie répéter (ou second) et s’applique au premier surā car il est répété lors de chaque prière.
  • S’applique aux versets qui parlent de louange (thanā’), comme les versets de Q 1.
  • S’applique à un groupe de plusieurs sūras, commençant par Q 2 et se terminant par Q 9 (considéré comme le dernier surā). Il s’applique de la même manière à une liste de vingt-cinq sūras, à l’exclusion de Q 1.
  • Se réfère aux sūras ayant plus de dix mais moins de cent versets.
  • Fait référence à la Mithnā, un « registre des actes » écrit, qui sera lu le jour du jugement. Dans une telle interprétation, le Qur’ān a une autorité primordiale.
  • Fait référence à la Mishnah (Mithnā en arabe), une œuvre littéraire juive qui a été écrite comme source d’instruction religieuse en plus de l‘Ancien Testament.
  • Fait référence à un terme mentionné dans Q 15.87 : « Nous t’avons déjà apporté le Sept de la Répétition, et le puissant Qur’ān.

Notons que le verset ci-dessus (Q 15.87) sépare l’œuvre, Sab’ al-Mathānī, du Qur’ān par l’emploi de « et ».

Sabéens

Il existe plusieurs groupes qui portent ce nom au Moyen-Orient. (L’un de ces groupes, les adeptes du mandéisme, vivent aujourd’hui sur les rives du Tigre et de l’Euphrate). Les premiers Sabéens mentionnés dans le Qur’ān pourraient faire référence à ceux qui vivaient avant l’Islām en Égypte et dans le sud de la péninsule arabique. À l’apogée de leur empire politique, ils étaient connus pour leur richesse et leur activité commerciale, notamment dans le lucratif commerce des épices. Aujourd’hui, ce groupe primitif n’existe plus.

mois sacrés

Pendant ces mois, les Arabes doivent cesser de se battre entre eux et permettre aux caravanes commerciales de circuler librement sans craindre d’être attaquées. Ces mois sacrés comprennent Rajab, Dhū-l-Qi’da, Dhū-l-Ḥijja, et Muhārram.

Mosquée sacrée (Masjid al-Ḥarām)

Ce site religieux, situé à La Mecque, est considéré comme le centre de culte public le plus sacré de l’Islām. C’est la plus grande mosquée du monde. Au centre de sa cour intérieure se trouve la Ka‘ba, le sanctuaire le plus sacré de l’Islām.

sYadaqa et zakàt

La ṣadaqa (charité) consiste à donner librement à autrui sans obligation religieuse. Une personne peut effectuer la ṣadaqa pour se rapprocher d‘Allah et pour entretenir une relation amicale avec le destinataire du cadeau. Ainsi, la ṣadaqa a une signification similaire à celle d’un cadeau.

La Zakāt, quant à elle, est le troisième pilier de l’Islām. C’est une obligation religieuse de donner un « quart du dixième », c’est-à-dire 2,5 % de sa richesse à des destinataires précis (voir Q 9.60) :

  1. Pauvre
  2. Besoin d’aide
  3. Les collecteurs de Zakāt (littéralement, « ceux qui travaillent pour elle » ).
  1. Infidèles qui se convertiraient à l’Islām s’ils recevaient la zakāt offrant « ceux dont les cœurs sont réconciliés ».
  2. Propriétaires d’esclaves (pour libérer un esclave musulman)
  3. Les débiteurs qui ne peuvent pas rembourser leurs dettes (envers des particuliers, c’est-à-dire pas des sociétés, etc.).
  4. Allah (pour financer les conquêtes et les campagnes de jihād).
  5. Les « wayfarers » musulmans (voyageurs en détresse)

al-aḥāba

Voir Compagnons.

al-Sayf

Voir le verset sur l’épée.

écoles de lecture

Après que le comité de ‘Utḥmān ait terminé son travail et que son codex ait été dispersé dans les régions contrôlées par les musulmans, cinq écoles se sont spécialisées dans la lecture du codex de ‘Utḥmān, formant et éduquant leurs disciples selon les lectures de certains savants respectés :

  • école de Basra (lecture d‘Abū ‘Umar Ibn al-‘Alā)
  • école de Kufa (lectures de ‘Āṣim Ibn Abī al-Nujūd, ‘Alī Ibn Ḥamza, et Ḥamza Ibn Ḥabīb)
  • école de Damas (lecture de ‘Abd Allah Ibn ‘Āmir)
  • école de la Mecque (lectures de ‘Abd Allah Ibn Kathīr et Muḥammad Ibn ‘Abd al-Raḥmān Ibn Muhāyṣin)
  • école de Médine (lecture de Nāfi’ Ibn Abī Na’īm)

Chiites duodécimains

Ce groupe chiite est la plus grande branche de l’Islām chiite. Le nom de duodécimains vient de leur croyance en douze chefs divinement ordonnés, connus sous le nom des Douze Imāms.

Les chiites duodécimains sont également la plus grande dénomination qui adopte la doctrine Ja’fari (les enseignements du sixième Imām Abū Ja’far al-Ṣādiq (83-148 H). Parce que ce groupe suit les enseignements de cet imām, les duodécimains sont également appelés Imāmīya. Cette dénomination croit que les Douze Imāms, ainsi que Fāṭima et son père Muḥammad, étaient sans péché.

Une autre croyance veut que le douzième imām, Muḥammad Ibn al-Ḥassan al-‘Askarī (255 H), qui a disparu de la vue lorsqu’il est descendu dans un tunnel pour échapper aux Abbassides, soit toujours vivant. Mais personne ne peut le rencontrer, sauf ceux qui sont sincères parmi ses compagnons. Voir al-Mahdī.

Verset sur la lapidation (oyat al-rajm)

Dans la sharī‘a (loi islāmique), la règle pour un adultère marié est la mort par lapidation. Selon Ibn Kathīr, dans son Tafsīr (commentaire), cette règle semble provenir d’un hadith (parole traditionnelle de Muḥammad), qui dit : « Le vieil homme et la vieille femme, s’ils commettent l’adultère, lapidez-les carrément ». Un modèle de punition d‘Allah. Et Allah est Puissant, Sage. » Ce verset faisait autrefois partie de Q 33, mais il a finalement été retiré du Qur’ān. Malgré son retrait, sa décision est toujours valable selon la croyance islāmique.

sunna/sunan

Selon les croyances islāmiques, la sunna est le mode de vie prescrit basé sur les enregistrements narratifs des paroles (ḥadīths) ou des actions de Muḥammad. Voir ḥadīths.

Verset de l’épée (al-Sayf)

Ce verset se trouve au verset 5 de la surā al-Tawba (Q 9.5) du Qur’ān. (Le contexte de ce verset est contenu dans Q 9.1-29.) Le verset de l’épée est considéré par de nombreux spécialistes comme l’un des tout derniers commandements révélés par Muḥammad à ses disciples. Il ordonne aux musulmans de combattre par l’épée les idolâtres, y compris les chrétiens et les juifs. On pense également que ce verset a abrogé et annulé 114 versets qui prônent la paix (versets « paix » ) dans le Qur’ān.

Tjāghnt

Ce mot apparaît six fois dans le Qur’ān avec plusieurs significations différentes : « les idoles », « Satan », et « le devin ». On dit que ce mot pourrait être d’origine étrangère, comme d’autres mots du Qur’ān, tels que Ṭālūt et Jālūt. On dit aussi que le mot a une racine syriaque qui signifie « erreur, ou conduire à l’erreur ». Dans l’ancien hébreu, il signifie « idole ».

al-taqīya

Cacher ou déguiser des pensées et des croyances personnelles sous de fausses apparences au nom de la sécurité est appelé al-taqīya (dissimulation). Parmi les exemples de ce type de comportement, on peut citer le fait de faire semblant de prêter allégeance à un souverain ou à un pays particulier ou d’observer des pratiques religieuses locales pour protéger ou favoriser ses intérêts. Le Qur’ān autorise les musulmans à utiliser l’al-taqīya pour se protéger du mal (Q 16.106). Les chiites ont utilisé cette doctrine à l’époque où ils étaient persécutés par les Sunnīs et continuent de l’utiliser encore aujourd’hui.

Certains des groupes Sunnī ont également fait usage de cette doctrine à l’époque abbasside lorsque la question de la création du Qur’ān a été soulevée. Tout musulman qui prenait publiquement la position selon laquelle le Qur’ān était éternel et non créé était exécuté à cette époque.

Targum

Le mot targum est un mot hébreu-araméen qui signifie l’interprétation et l’explication de la Torah pour les synagogues. L’ancien targum a été transmis oralement pendant des siècles. Cette transmission orale a été continuellement modifiée pour s’adapter à son public et aux conditions qui prévalaient. En raison de ces changements au fil du temps, il existe aujourd’hui plusieurs copies du targum écrit concernant les cinq premiers livres de Moïse. Le commentaire trouvé dans le Targum, appelé Midrash, reflète les interprétations scripturaires des anciens Juifs.

Traité de Ḥudaybīya

En 6e année de l’hégire (628 ans), Muḥammad et 1400 de ses disciples se rendent à la Mecque pour effectuer un petit pèlerinage. Les Quraysh, ennemis de Muḥammad, interceptèrent les musulmans à Ḥudaybīya, située à l’extérieur de La Mecque. Pour résoudre la crise sans effusion de sang, les deux parties signèrent un traité dans le but d’établir une trêve de dix ans. Les musulmans espéraient que la trêve leur permettrait d’étendre librement leur influence, leur territoire et leur puissance militaire au cours de la décennie suivante. Deux ans après la signature du traité (8e année de l’Hégire / 629e année après J.-C.), Muḥammad est retourné à La Mecque avec 10 000 musulmans et a conquis la ville.

Le comité de ‘Utḥmān

Vers l’an 30/ 650, ce comité (qui comprenait Zayd Ibn Thābit, Sa‘īd Ibn al-‘Ās., ‘Abd al-Raḥmān Ibn al-Ḥārith Ibn Hishām, ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr, et d’autres) a été chargé par ‘Utḥmān, le troisième calife, de compiler et de rédiger l’histoire de l’humanité.

Qur’ān dans la langue des Quraysh. (Voir l’article « Compilation du Qur’ān » ).

al-Ẓāhirīya

L‘Al-Ẓāhirīya, une école de droit fondée au neuvième siècle de notre ère, suit une méthode idéologique et législative qui appelle à s’en tenir au Qur’ān et à la sunna de Muḥammad. Elle rejette toutes les autres opinions en dehors de ces sources et les considère comme spéculatives.

zakāt

Voir ṣadaqa et zakāt.


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Le Qur’ān expliqué: Noms propres sélectionnés

“ Coran. Datation : 11-12ème siècle. Inscription iranienne kufic. »
موزه ملی ایران | مـوزه دوران اسـلام
قرآن کریم
خط کوفی ایرانی
سده ۶ و ۵ هجری قمری
شماره موزه :۴۳۱۴

Musée national d’Iran. Photo Vigi-Sectes

Abd Allah Ibn ‘Abbās

(‘Abd Allah Ibn ‘Abbās Ibn ‘Abd al-Muṭṭalib) 3 BH-AH 68/AD 619-687

Dans les sources islāmiques, il est communément appelé Ibn ‘Abbās. Il est né à la Mecque et a été l’un des compagnons de Muḥammad dès son plus jeûne âge. Vénéré par les musulmans pour sa connaissance du Qur’ān, son autorité et sa narration des ḥadīths, on lui donne souvent le titre d’ « interprète du Qur’ān ».

Abd Allah Ibn Jaḥsh

(‘Abd Allah Ibn Jaḥsh Ibn Ri’āb) d. 3 H./ 625 J.-C.

Il était un compagnon bien connu de Muḥammad et le frère de Zaynab, une belle-fille (et plus tard, épouse) de Muḥammad. Il appartenait à la tribu des Assad, une branche des Quraysh, et a commandé la première expédition réussie (à Nakhla) au nom de Muḥammad. Il a été tué lors de la bataille d‘Uhud.

Abd Allah Ibn Mas‘ūd

d. c. 32 H./ 653 J.-C.

Converti de bonne heure, ‘Abd Allah Ibn Mas‘ūd était l’un des plus éminents compagnons de Muḥammad. Courageux dans sa foi, il fut le premier à lire ouvertement le Qur’ān à la Mecque. Ibn Mas‘ūd a participé à toutes les batailles de Muḥammad et a servi Muḥammad avec dévouement, gagnant ainsi la confiance et le respect total de Muḥammad. Malgré son statut et sa réputation, il n’a pas été invité à participer à la compilation du Qur’ān après la mort de Muḥammad. Ibn Mas‘ūd possède son propre codex du Qur’ān.

Abd Allah Ibn al-Zubayr

AH 1-73/AD 622-692

‘Abd Allah Ibn al-Zubayr était issu de la famille Assad de la tribu des Quraysh et le premier à être né à Médine parmi les Muhājirùn (ceux qui ont émigré de la Mecque à Médine avec Muḥammad). Il soutint ‘Ā’isha dans la guerre contre ‘Alī Ibn Abī Ṭālib. Après la mort de Mu‘āwīya, le fondateur de l’empire omeyyade, ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr refusa de prêter allégeance au fils de Mu‘āwīya, Yazīd Ibn Mu‘āwīya. À la mort de Yazīd Ibn Mu‘āwīya en 683, la majorité des provinces islāmiques déclarent leur allégeance à ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr, à l’exception d’al-Shām (Syrie), qui reste une place forte des Omeyyades. Les guerres se poursuivirent pendant dix ans jusqu’à ce que al-Ḥajjāj Ibn Yūsuf al-Thaqafī (sous la gouvernance de ‘Abd al-Malik Ibn Marwān) tue ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr sur le champ de bataille. Son cadavre fut décapité et crucifié.

Abū Bakr

  1. 51 BH-AH 13/AD 573-634

Abū Bakr était l’un des premiers disciples de Muḥammad. C’était un riche marchand de la tribu des Quraysh. Sa fille ‘Ā’isha devint la troisième épouse de Muḥammad. Abū Bakr accompagna Muḥammad dans nombre de ses premières missions et devint le premier calife (successeur) à diriger l’empire musulman naissant (11 H).

Abū Dharr al-Ghifārī (Jundub Ibn Junāda)

  1. c. 32 H./ 652 J.-C.

Tribun des Banū Ghifār, il fut parmi les plus précoces de ceux qui embrassèrent l’Islām comme foi. Lorsqu’il critiqua le faste des autorités sous le règne de ‘Utḥmān Ibn ‘Af̣f̣ān, al-Ghifārī fut par conséquent banni à al-Ribdha, en dehors de Médine, où il mourut par la suite.

Abū Hj anīfa

(al-Nu’mān Ibn Thābit) 80-150 H./ 699-769 J.-C.

Bien que né à Kufa, en Irak, Abū Ḥanīfa était d’ascendance persane. Érudit estimé, il a fondé la branche Hanafī de la foi islāmique, qui est l’une des quatre principales branches Sunnī. De son vivant, il jouissait d’une position de grand respect et d’admiration parmi ses collègues musulmans. Lorsqu’il refusa de travailler pour le gouvernement, il fut emprisonné et torturé. Il est mort en prison.

Abū Hurayra

(‘Abd al-Raḥman Ibn Ṣakhr al-Dūsī) d. 59 H./ 679 J.-C.

On raconte que son nom d’origine était ‘Abd Shams avant de se convertir à l’Islām à Médine. Lorsqu’il devint musulman, Muḥammad le nomma ‘Abd al-Raḥmān. Il accompagna Muḥammad et passa de longues périodes de temps avec lui, atteignant la renommée pour sa mémorisation des nombreux ḥadīths (dires) de Muḥammad.

Un débat existe cependant sur l’authenticité de ses narrations de ḥadīth. Les Sunnīs considèrent ses narrations comme dignes de confiance, tandis que les chiites les rejettent. Sous le règne de ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb, les documents historiques font allusion à la condamnation d‘Abū Hurayrā comme menteur (ajoutant ses propres idées aux ḥadīths, etc.) et à son soutien aux ennemis de la famille et des descendants de Muḥammad.

Abū Isḥaq al-Zajjāj

(Ibrāhim Ibn al-Sariy Ibn Sahl) 241-311 H./ 855-923 J.-C.

Ce grand linguiste a vécu à Bagdad et a contribué à plusieurs travaux catégoriques dans les domaines de la langue arabe et des sciences du Qur’ān. Parmi ses œuvres les plus remarquables : Ma’a-nī al-Qur’a-n wa I’ra-bahu [L‘interprétation et l’analyse du Qur’a-n].

Ā’isha Bint Abī Bakr

9 BH-AH 58/AD 613-678

‘Ā’isha était la fille d‘Abū Bakr, un ami proche de Muḥammad et l’un de ses compagnons tout au long de la prétention de Muḥammad à la prophétie. Lorsque Muḥammad avait plus de cinquante ans, il a épousé ‘Ā’isha, qui avait à peine neuf ans. De toutes ses épouses, on dit qu’elle était la seule vierge avant son mariage avec Muḥammad, et qu’elle était sa préférée. Elle est citée comme source de nombreux ḥadīths sur la vie personnelle de Muḥammad et est considérée comme une savante érudite de la première heure de l’Islām. Elle est hautement considérée par les sunnites, estimée comme un modèle pour les femmes musulmanes, mais les chiites la discréditent car elle était farouchement opposée à ‘Ali Ibn Abi Ṭālib.

Alī Ibn Abī Ṭālib

(‘Alī Ibn Abī Ṭālib Ibn ‘Abd al-Muṭṭalib)

c. 23 BH-AH 40/AD 600-661

Marié à Fāṭima, la fille de Muḥammad, ‘Ali était le gendre de Muḥammad ainsi que son cousin germain. Il a accepté l’Islām lorsqu’il était jeûne. Il a ensuite participé à la plupart des batailles de Muḥammad en tant que jeûne homme.

Les chiites le considèrent, lui et ses descendants, comme les successeurs légitimes de Muḥammad et estiment que les trois premiers califes (Abū Bakr, ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb et ‘Utḥmān Ibn ‘Af̣f̣ān) ont illégalement usurpé le pouvoir et la position de ‘Ali en tant que premier successeur légitime de l’Islām après Muḥammad. Cette position a finalement divisé l’Islām en deux branches, les sunnites et les chiites.

Ali est devenu le quatrième calife en 35 H./ 656 J.-C., mais son règne a été marqué par des conflits et des disputes entre les musulmans qui ont conduit à son assassinat cinq ans plus tard à Koufa.

Amr Ibn ‘Ubayd (Abi ‘Utḥmān al-Baṣri) 80-144 H./ 699-761 J.-C.

‘Amr Ibn ‘Ubayd était d’origine perse. Il était un éminent Mu‘tazila qui était connu pour son ascétisme. Parmi ses écrits figurent al-Tafsīr et al-Rad ‘ala- al-Qaddarīya. Il est mort lors d’un voyage de Bassora à la Mecque.

al-Ḥajjāj Ibn Yūsuf al-Thaqafī AH 40-95/AD 660-714

Il est né à Ta’if et a travaillé avec la police de l’Empire omeyyade, montant en grade jusqu’à devenir le wālī (gouverneur) de l’Irak. Il a gouverné d’une main de fer et est crédité d’avoir établi l’autorité des Omeyyades dans la région. Il était également connu pour son éloquence et a introduit des modifications au Qur’ān en quatorze endroits différents, selon les sources islāmiques.

al-Ḥārith Ibn Suwayd al-Ṣāmit, al-Ḥārith Ibn Suwayd al-Taymī

Deux hommes nommés al-Ḥārith Ibn al-Suwayd sont mentionnés dans les sources islāmiques. Le premier est al-Ḥārith Ibn Suwayd Ibn al-Ṣāmit de la tribu Anṣar d‘Aws. Ce al-Ḥārith Ibn Suwayd al-Ṣāmit, un musulman, est devenu un ennemi d’al-Mujadhar (un autre musulman) pour avoir tué le père d’al-Ṣāmit à l’époque pré-Islāmique. Pendant la bataille de Uḥud, Ibn al-Ṣāmit tua al-Mujadhar et abjura son islām, se réfugiant chez les Quraysh. Plus tard, Ibn al-Ṣāmit revint à l’Islām mais fut tué par Muḥammad, malgré la reconversion d’Ibn al-Ṣāmit à l’Islām, car Muḥammad ne lui a pas pardonné d’avoir tué al-Mujadhar.

Le second est al-Ḥārith Ibn Suwayd al-Taymī de Kufa. Il a quitté l’Islām, rejoignant son peuple pour un temps, pour ensuite revenir à l’Islām. Son retour à l’Islām fut accepté. Il devint par la suite l’un des narrateurs des hadīths.

al-Ḥassan al-Baṣrī

(al-Ḥassan Ibn Yassār ; Abī Sa‘īd) 21-110 H./ 642-728 J.-C.

Bien que né à Médine, al-Baṣrī s’est ensuite installé à Bassora où il a fait ses études et est devenu l’un des plus célèbres jurisprudents de son temps. De son vivant, les divisions entre musulmans s’étaient répandues en Irak, mais il était favorable à la résolution pacifique des politiques au sein de la population.

Jawād ‘Alī AD 1907-1987

Jawād ‘Alī était un éminent historien irakien qui reçut son doctorat de l’université de Hambourg en 1939 pour sa thèse, al-Mahdi et ses quatre émissaires. Après son retour en Irak, il devint le secrétaire du Comité des auteurs et des traducteurs. Jawād ‘Alī a travaillé comme professeur au département d’histoire du College of Education de Bagdad et a également été professeur invité à Harvard (1957-1958). Parmi ses œuvres les plus célèbres figure son encyclopédie en huit volumes, Tārīkh al-‘Arab Qabl al-Islām, publiée de 1956 à 1960.

Ka‘b Ibn al-Ashraf

Ka‘b Ibn al-Ashraf était un poète et une personnalité éminente de la tribu juive des Banū al-Nuḍayr. Il faisait partie de ceux qui critiquaient Muḥammad. Lorsque la tribu des Quraysh a été vaincue lors de la bataille de Badr et que certains de ses chefs ont été tués, Ka‘b Ibn al-Ashraf a exprimé sa peine pour cette défaite en faisant la satire des musulmans. Plus tard, il se rendit à la Mecque pour inciter les Quraysh à se venger de la défaite de Badr. Muḥammad ordonna alors que Ka‘b soit tué, et la compagnie qui exécuta l’ordre apporta sa tête à Muḥammad.

Khadīja Bint al-Khūwaylid

  1. 68-3 BH/AD 556-620

Khadīja était la première épouse de Muḥammad et sa seule épouse jusqu’à sa mort après vingt-quatre ans de mariage. Avant leur mariage, Khadīja était une femme d’affaires riche et influente, dotée d’importantes relations sociales. Elle a fait la connaissance de Muḥammad lorsqu’elle l’a employé pour être son représentant commercial et diriger ses caravanes.

Muḥammad épousa Khadīja alors qu’elle avait quarante ans et lui une vingtaine d’années. Elle lui donna deux fils (tous deux morts en bas âge) et quatre filles. Tout au long de leur mariage, Muḥammad a beaucoup compté sur son soutien, ses conseils et son sens des affaires. Son amour, sa loyauté et son dévouement à son égard se sont avérés cruciaux pour son appel et sa réussite. Elle fut la première personne à déclarer que Muḥammad était un prophète et devint sa première convertie.

Muḥammad Ibn al-Ḥassan al-‘Askarī (al-Mahdī)

b. c. 255 H./ 869 J.-C.

Selon les duodécimains chiites, cet homme n’est pas mort mais a été « caché » par Dieu. Il est également connu sous le nom de Muḥammad al-Muntaẓar, l’Imām caché, et le Douzième Imām.

Musaylima Ibn Ḥabīb

(Musaylima Ibn Thamāma Ibn Ḥabīb)

  1. AH 12/AD 633

Membre de la tribu des Banū Hanyfa de Yamāma, il était connu sous le nom de Raḥmān de Yamāma car il avait l’habitude d’appeler les gens à la foi en un dieu, al-Raḥmān ( « le Miséricordieux » ). Bien que l’on ne sache pas clairement quand il a commencé ses activités religieuses, des documents historiques mentionnent que lui et Muḥammad correspondaient, et dans ces lettres, il aurait demandé à Muḥammad de partager entre eux des zones stratégiques. Ces documents mentionnent également certaines des révélations de Musaylim, qu’il aurait livrées au public. Cependant, les sources lui réservent un traitement désobligeant, le dénonçant toujours comme Musaylima al-Kadhāb ( « Musaylima le menteur » ). En raison de ce traitement négatif, il est difficile d’obtenir des informations impartiales à son sujet.

Abū Bakr envoya une armée massive sous la direction de Khālid Ibn al-Walīd pour vaincre le mouvement de Musaylima. Des centaines de personnes moururent des deux côtés, y compris Musaylima. Ainsi, ce rival de l’Islām mourut laissant l’Islām avoir le dernier mot dans la région.

Nasṣr Ḥàmid Abū Zayd

AD 1943-2010

Zayd était un chercheur égyptien en linguistique et un enseignant à l’université du Caire dans la faculté de littérature. Au milieu des années 1990, les islāmistes ont intenté un procès contre lui, l’accusant d’apostasie. Le procès demandait une injonction judiciaire pour le séparer de sa femme, Ibtihāl Yūnis, professeur de littérature française. Face à une campagne de haine croissante à son encontre et à un système juridique influencé par les extrémistes, Naṣr quitte l’Égypte avec sa femme et s’installe aux Pays-Bas.

Il a achevé plusieurs ouvrages concernant le Qur’ān, notamment Mafhūm al-Naṣṣ : Dirāsa fī ‘Ulūm al-Qur’ān [Le concept du texte : une étude des sciences coraniques].

Qatàda Ibn al-Nu’màn

d. 23 H./ 644 J.-C.

Qatāda était de la tribu Anṣar des Aws et a participé à toutes les batailles de Muḥammad. Lors de la conquête de la Mecque, il porta la bannière de la famille des Banū Ẓafr, une branche de la tribu des Aws. Il a sauvé la vie de Muḥammad lors de la bataille d‘Uhud.

Sa‘d Ibn Abī Waqqàṣ (Sa‘d Ibn Mālik) d. 55 H./ 675 J.-C.

Il était parmi les dix premiers à suivre Muḥammad. Il a participé à toutes les batailles de Muḥammad et était un chef militaire sous le règne de ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb, menant l’invasion de l’Irak et des villes perses. Il est devenu le chef de Kufa sous le règne de ‘Umar.

Sa‘īd Ibn Jubayr

AH 45-95/AD 665-714

D’origine abyssinienne, Sa‘īd Ibn Jubayr faisait partie de la deuxième génération de musulmans. Il vivait à Koufa et enseignait les sciences religieuses islāmiques. Lorsqu’une révolte contre les Omeyyades commença sous la direction de ‘Abd al-Raḥmān Ibn al-Ash’ath, il se joignit à la révolte. Lorsque la révolte échoua, il disparut, mais plus tard il fut arrêté et exécuté sur ordre d’al-Ḥajjāj Ibn Yūsuf al-Thaqafī.

Salmān al-Fārisī (Salmān le Perse) d. c. 36/656 ap. J.-C.

On dit qu’il était un mage d’origine perse qui voyageait d’un pays à l’autre. Lorsqu’il se trouvait dans la péninsule arabique, il fut enlevé et vendu comme esclave à Médine, où il devint plus tard musulman. Connu pour avoir vécu simplement durant sa vie, il occupe une position de grand respect parmi tous les Sunnīs et les Chiites. De nombreuses légendes sont tissées autour de sa personne et de ses voyages.

Ubayd Ibn ‘Umayr

(‘Ubayd Ibn ‘Umayr Ibn Qatāda al-Makkī) d. 68/AD 687

Il est né pendant la vie de Muḥammad et est devenu un exégète et un prédicateur éminent parmi les al-Tābiin ( « les suiveurs » ), la deuxième génération de musulmans.

Ubayy Ibn Ka‘b

d. c. 32 H./ 652 J.-C.

Né à Médine dans la tribu des Khazraj, Ubayy Ibn Ka‘b devint l’un des premiers disciples de Muḥammad parmi les al-Anṣar ( « Aides » ). Après s’être converti à l’Islām, il commença à écrire certains des versets révélés pour Muḥammad, qui le considérait comme l’un des quatre gardiens dignes de confiance du Qur’ān.

Umar Ibn al-Khaṭṭāb

40 BH-AH 23/AD 584-644

Il était l’un des beaux-pères de Muḥammad et influent dans le renforcement de l’Islām à la Mecque. Sa fille Ḥafṣa s’est vu confier un codex ancien, qui contenait des parties du Qur’ān. Il a également participé à la plupart des batailles de l’Islām. ‘Umar a joué un rôle majeur dans l’installation d‘Abū Bakr comme premier calife. ‘Umar a ensuite succédé à Abū Bakr en tant que deuxième calife et a régné pendant environ une décennie avant son assassinat. Pendant son califat, l’Islām s’est étendu géographiquement en Asie et en Afrique.

Utḥmān Ibn ‘Af̣f̣ān

47 BH-AH 35/AD 577-656

Utḥmān était un riche marchand qui s’est converti à l’Islām à ses débuts et est devenu un compagnon de Muḥammad et son gendre. Il devint le troisième calife, après l’assassinat de ‘Umar (23 AH) et fut lui-même assassiné par des musulmans qui s’opposaient à sa politique. Sa réalisation la plus remarquable est son effort pour collecter les manuscrits des disciples de Muḥammad afin de compiler un Qur’ān écrit et d’en faire le codex officiel. Il forma un comité dirigé par Zayd Ibn Thābit pour accomplir cette tâche. L’un des résultats malheureux de cet acte fut l’incendie d’autres codices anciens du Qur’ān. Dans son désir de disposer d’un codex unifié pour l’ensemble de l’empire musulman, ‘Utḥmāna privé les générations futures de manuscrits qui auraient pu faire la lumière sur certains contenus antérieurs du Qur’ān.

al-Walīd Ibn al-aghīra
(Ibn ‘Abd Allah Ibn ‘Amr) d. 1/AD 622

Il était célèbre pour son esprit vif, ce qui incitait les gens à lui demander conseil pour résoudre leurs différends. Il interdisait la consommation de vin, même avant l’Islām. Lorsque Muḥammad s’annonça comme un prophète, al-Walīd refusa de le suivre et devint l’un des plus farouches ennemis de Muḥammad. Il mourut après la migration de Muḥammad à Médine.

Zayd Ibn Thābit

d. c. AH. 45/AD 655

Il était de la tribu de Khazraj, parmi les Anṣar ( « Aides » ). Il était l’un des scribes qui écrivaient ce qui était révélé à Muḥammad. On raconte que Muḥammad lui a demandé d’apprendre les langues hébraïque et syriaque, ce qu’il aurait fait en quelques semaines seulement. Cependant, il n’existe aucune trace de sa maîtrise de l’une ou l’autre de ces deux langues. Zayd Ibn Thābit a participé aux deux comités de compilation du Qur’ān depuis le califat d‘Abū Bakr jusqu’au califat de ‘Utḥmān. Il existe plusieurs rapports critiquant sa direction du dernier comité de compilation d’Ibn Mas‘ūd.


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Le Qur’ān expliqué: Analyse critique

 » Coran, Ecrits Naskh. Signé par Ahmad al-Neyrizi, Datation : 1718. »
Musée national d’Iran. Photo Vigi-Sectes

La croyance la plus sacro-sainte de la foi islāmique est peut-être que le Qur’ān est un livre miraculeux. Il est considéré comme le miracle ultime de l’Islām : non seulement un livre envoyé du ciel, mais un livre parfait dans sa langue et sa structure, qui ne pourrait jamais être reproduit par l’homme.

En tant que tel, le Qur’ān ne doit pas être remis en question. Lorsque des questions se posent, la plupart des érudits islāmiques ne les traitent que dans l’optique que le Qur’ān est un message miraculeux d‘Allaḥ Si, en fait, cette hypothèse pouvait être prouvée comme étant erronée, les musulmans seraient habilités à soumettre le Qur’ān à une véritable analyse critique, de la même manière que tous les autres textes religieux de l’histoire ont été analysés.

Bien que l’Islām affirme uniformément que le Qur’ān est un livre céleste, les érudits musulmans ont trois points de vue différents concernant sa « révélation » :1

  • JibrīlD (Gabriel) a mémorisé le Qur’ān à partir de la Tablette préservée et l’a fait descendre à Muḥammad en paroles et en sens.
  • Jibrīl descendit et ne partagea avec Muḥammad que les significations, que Muḥammad apprit et qu’il exprima ensuite aux autres dans la langue arabe.

Jibrīl alqā ( « récitait » ) les significations à Muḥammad, qui exprimait ensuite ces significations en langue arabe.

Cette théorie ouvrirait grand la porte à l’analyse critique du Qur’ān, car elle considérerait le Qur’ān comme un texte de Muḥammad et non un livre divin. Si le Qur’ān, en termes de structure, de style et de formulation, est un texte de Muḥammad et non un texte d‘Allah, cela signifie qu’il s’agit d’un livre fait par l’homme, sujet à la recherche et à la critique.

Ce point de vue aurait pu aider les érudits à comprendre le Qur’ān en le libérant de toute restriction antérieure. Mais peu de musulmans ont osé aborder les conséquences qui résulteraient de la poursuite de cette vision de la révélation coranique.

Malgré la limitation de la liberté intellectuelle pour ceux qui recherchent la vérité sur le Qur’ān, cette suppression n’a pas empêché l’émergence de figures intrépides dans les études arabes et islāmiques qui ont exprimé des opinions plus profondes que la théorie ci-dessus. ‘Abd Allah Ibn al-Muqaffa‘ (mort vers 139 H./ 756 J.-C.), l’un des génies de la langue arabe, a écrit un livre s’opposant au Qur’ān. 2 L’histoire nous donne également le nom de Abū al-Ḥussayn Aḥmad Ibn Yaḥyā Ibn Isḥaq al-Rāwandi, du troisième siècle de l’hégire (neuvième siècle de notre ère), qui a écrit un livre intitulé al-Zumurrud. Il y aborde la biographie de Muḥammad et le qualifie de faux prophète. Ibn al-Rāwandi a également critiqué le Qur’ān dans son livre al-Dāmigh, un ouvrage qui n’existe malheureusement plus, bien que l’on en trouve des extraits épars dans les livres de ses détracteurs. 3

Au troisième siècle de l’hégire, ‘Abd al-Masiḥ Ibn Isḥaq al-Kindi a écrit ses célèbres excuses connues sous le nom de Risālat al-Kindī en arabe. Il s’agit d’une réponse à une lettre d’un savant musulman appelé Ismā’il al-Hāshimi. Dans cette apologie, al-Kindi aborde de nombreuses questions, comme la défense de la doctrine chrétienne, l’examen de la biographie de Muḥammad et la critique du Qur’ān. Dans le contexte de la réfutation de l’éloquence du Qur’ān, il pose cette question provocatrice:4

Lorsque les poètes composent leur poésie, et la pèsent pour s’assurer qu’elle est à la bonne échelle, ce qui est plus difficile et plus précis dans le sens, elle reste cohérente. Le fait qu’ils choisissent des mots purs, clairs comme le cristal, et complètement arabes avec une bonne signification cohérente est plus parfait dans l’adhésion aux règles et mieux formé. Car votre livre [le Qur’ān] est plein de rythmes brisés, de mots incongrus, et d’exagérations dans les significations qui n’ont aucun sens. Si vous dites que ses significations sont les plus précises, nous vous demandons : quelle signification étrange avez-vous trouvée ? Montrez-le nous et informez-nous à son sujet afin que nous puissions l’apprendre de vous.

Plus tard au quatrième siècle de l’hégire (dixième siècle de notre ère), Muḥammad Ibn Zakariyā Abū Bakr al-Rāzi (Abū Bakr al-Rāzi), le médecin et chimiste, critique le Qur’ān sous tous ses aspects. Il rejette l’affirmation selon laquelle le Qur’ān est un miracle et répond à la demande de produire un livre religieux comme celui-ci par le commentaire suivant:5

Si vous en voulez un semblable en termes de meilleurs mots, nous pouvons vous en procurer mille semblables à partir des mots des rhéteurs, des éloquents et des poètes : des mots plus fluides, plus précis dans leur signification, plus éloquents dans leur fonction et leur expression, et plus formés dans leur rythme. Si cela ne vous convient pas, alors nous vous demandons de nous dire ce qu’est ce « mille semblable » que vous nous demandez de vous présenter.

Il remarque également que

« nous trouvons les paroles d‘Aktham Ibn Ṣayfī [un Arabe connu pour ses sages paroles et ses proverbes] meilleures que certaines sūras du Qur’ān » 6.

Abū Bakr al-Rāzī remarque contre le Qur’ān, sa longueur, ses répétitions et ses contradictions. Il objecte également qu’il contient des mythes provenant de sources anciennes. Il les décrit comme des sujets n’étant d’aucune utilité. Quiconque étudie l’histoire est obligé de convenir avec Abū Bakr al-Rāzī que les histoires du Qur’ān, ne sont que des mythes et des contes qui ne sont pas vrais.

Cette critique douloureuse a conduit un chercheur islāmique contemporain, Muḥammad Aḥmad Khalaf Allah, à tenter de trouver un moyen de sortir de ce piège. Dans son livre al-Fann al-Qaṣaṣī fī al-Qur’ān al-Karīm, il présente le point de vue selon lequel derrière les histoires du Qur’ān se cachent des objectifs pratiques, et le but n’est pas l’historicité mais l’admonition. Il conclut donc que ce sont des histoires vraies du point de vue du résultat final, mais pas du point de vue historique. Quoi qu’il en soit, la théorie de Khalaf Allah réfute la représentation du Qur’ān comme un livre faux et mythique en le citant :

«  … le mensonge ne viendra pas à lui, ni de devant lui, ni de derrière lui – une révélation du sage, du louable » (Q 41.42).

Nous apprenons également d’Ibn al-Nadīm que d’autres auteurs ont critiqué l’authenticité du Qur’ān. Il s’agit notamment de Yaḥyā Ibn al-Ḥārith, Ibn Shabīb, Aḥ mad Ibn Ibrahīm al-Warrāq, et Ya‘qūb Ibn Abī Shayba. 7 Malheureusement, leurs œuvres sont perdues, ou plus précisément, ont été intentionnellement ignorées et écartées par une culture d’une religion autoritaire singulière.

Si, tout au long de l’histoire, des érudits ont tenté de faire une analyse critique du Qur’ān, la plupart ont été réduits au silence par une religion qui rejette violemment toute analyse. Si le Qur’ān est effectivement un livre saint et miraculeux, il devrait résister à l’examen. Tout au long de ce texte, nous proposons des analyses provenant de :

  • ces spécialistes historiques qui ont osé s’exprimer,
  • ainsi que des sources contemporaines
  • et de nos propres experts en Islām.

Notes

  1. al-Zarkashī 1: 229-330; compare with Abū Zayd 42, 45 and al-Ḥaddād I‘jāz al-Qur’ān 14-15.
  2. Badawī 80.
  3. Ibid. 90-93.
  4. Muir, Apology of al-Kindy 78-80.
  5. Badawī 250.
  6. Ibid. 250-251.
  7. Ibn al-Nadīm 39.

TheQ Dilemma English Book

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Le Qur’ān expliqué: Historique du Qur’ān, Introduction

La religion est une recherche systématique de Dieu et de la vérité. C’est un ensemble de croyances et de pensées concernant la divinité de Dieu et sa relation avec l’homme. Lorsque l’on examine les prétentions d’une religion, il faut tenir compte de la source de l’autorité sur laquelle cette religion fonde ses prétentions.

Selon la doctrine islāmique, Muḥammad est le messagerD d‘AllahD (exemples : Q 2.101, 279 ; Q 3.32) et le « Sceau des Prophètes » (Q 33.40) sur lequel le Qur’ān a été révélé par un intermédiaire céleste. Cet intermédiaire est appelé « l’Esprit fidèle » (Q 26.193) et d’autres fois « Esprit Saint » (Q 16.102). Après la migration de Muḥammad à Médine, cet intermédiaire a été appelé « Gabriel » (Q 2.97-98). (Voir l’article « Le Jibrīl de Muḥammad » ).

Le Qur’ān a été révélé à Muḥammad en langue arabe (Q 12.2, Q 13.37, Q 20.113). Muḥammad a donné cette révélation à un groupe de personnes qui, avant cette période de l’histoire, n’avait pas de livres révélés par le ciel, et n’avait jamais eu de prophète envoyé (Q 34.44). Le Qur’ān affirme dans ses versets qu’il fait partie de la série des livres saints, par exemple la TorahD, l’Évangile (Q 2.41, 91, 97 ; Q 3.3, 50).

Cette période de révélation s’est déroulée sur une période de vingt-trois ans, (610-632 ap. J.-C.), au cours de laquelle Muḥammad s’est déclaré prophète. Après la mort de Muḥammad, ses compagnonsD ont rassemblé le Qur’ān dans un livre. (Voir l’article « Compilation du Qur’ān » ).

Noms du Qur’ān

Les musulmans ont donné à leur livre le plus sacré plusieurs noms différents, chacun ayant son origine et sa signification propres.

Le Qur’ān

Le nom commun du livre saint de l’Islām est le Qur’ān (Q 2.185). Le nom Qur’ān apparaît environ soixante-dix fois dans le Qur’ān. Les avis des savants varient concernant l’origine et la signification du mot Qur’ān :

  1. Qur’ān vient du mot qara‘a, qui signifie « réciter ». Les tenants de cette opinion disent que l’expression le Qur’ān apparaît avec ce sens dans Q 75.17-18, où l’on lit en arabe avec le mot Qur’ān et ses dérivés : « C’est à nous de le recueillir et de le lire ; et quand nous le lisons, alors suivez sa lecture ». 1
  2. Qur’ān est une description suivant la forme grammaticale arabe fu’ldn. Qur’ān est alors considéré comme un dérivé du mot qari, qui signifie « rassembler ». Il est similaire à l’expression « qara‘ta al-md’a fī al-ḥawd. » qui signifie « tu as recueilli l’eau de la baignoire « 2.
  3. Qur’ān est dérivé de qarantu, qui signifie « apparier une chose à une autre » ou « les fusionner ensemble ». Le Qur’ān a reçu ce nom en raison de la manière dont ses sūras, ses versets et ses lettres ont été fusionnés pour former un tout. 3
  4. Qur’ān « est dérivé de qard’in parce que ses versets se confirment les uns les autres et, à bien des égards, se ressemblent ; ils sont donc similaires « 4.
  5. Qur’ān est un nom propre unique, non emprunté à d’autres sources connues. Il s’applique aux paroles révélées à Muḥammad. 5

Il est intéressant de noter que de nombreux commentateurs et exégètes musulmans ont ignoré la racine sémitique de qur’ān, qui est קרא (qara‘a), signifiant « réciter ». Cette racine, qara‘a, est susceptible de provenir de la région araméenne-cananéenne. Le mot qur’ān est présent en hébreu, en phénicien, en araméen et en syriaque. 6

Une opinion soutient que l’origine du mot qur’ān a été influencée par l’expression hébraïque מִקְרָא, qui, selon l‘Ancien Testament, a ensuite signifié « récitation, lecture » (Neh. 8.8). Cette expression מִקְרָא est également reprise à plusieurs reprises dans les écrits rabbiniques. Cependant, la plupart des chercheurs penchent pour l’idée que qur’ān vient du syriaque ܐܢܝܪܩ , qui signifie « lecture, récitation » et est utilisé en relation avec l’étude de la Bible.

La similitude entre les mots arabes et syriaques est claire. Les Syriaques appelaient les livres, ou chapitres, de la Bible qui sont lus à l’église ܐܢܝܪܩ, ou lectionnaires. Ainsi, Muḥammad a choisi pour son livre le nom qui lui était alors familier. Sans aucun doute, le mot qur’ān est parvenu à Muḥammad à partir de sources chrétiennes. 7

Dans le Qur’ān, le verbe qara’a ­apparaît chaque fois que Muḥammad partage une révélation, à l’exception de quatre endroits. Deux de ces exceptions font référence aux autres livres saints (Q 10.94 ; Q 17.93). Les deux autres font référence au « Livre » (registre des actes) qui sera remis aux gens le jour du JugementD (Q 17.71 ; Q 69.19). Toutes ces références montrent que l’inclusion du verbe qara‘a dans le Qur’ān est toujours associée aux livres célestes. 8

Al-Muṣḥaf

Un nom commun pour le Qur’ān est al-Muṣḥaf ( « le Codex » ), dont le pluriel est maṣāḥif. La racine du mot semble être uḥuf. Selon un récit islandais, le mot a une racine abyssinienne. Lorsque le premier calife Abū Bakr N eut rassemblé les différentes parties du Qur’ān, il réunit ses conseillers pour discuter de la question du nom du livre. Certains d’entre eux voulaient le nommer Injīl D ( « Évangile » ), mais cette suggestion fut rejetée. D’autres proposèrent de le nommer al-Sifr ( « le livre, le document » ), mais cette suggestion fut également rejetée. Un conseiller, Ibn Mas‘ūd », dit qu’il avait entendu dire que les Abyssiniens utilisaient le nom al-Muṣḥaf et le suggéra. Sa suggestion fut acceptée. 9

Al-Furqān

Le célèbre nom d’al-FurqdnD ( « le critère » ) est très utilisé, mais il est moins courant qu’al-Qur’ān et al-Muṣḥaf. Il est mentionné dans Q 2.185, Q 3.4, et Q 25.1.

L’expression al-Furqān ne se limite pas au Qur’ān mais est mentionnée lorsqu’il s’agit d’autres livres saints. Par exemple, cette expression est utilisée pour décrire les livres de Moïse (Q 2.53 ; Q 21.48). La Torah (les cinq premiers livres de l‘Ancien Testament) et le Nouveau Testament sont également appelés collectivement par ce nom (Q 3.4).

Le Qur’ān déclare que si une personne croit en Allah, il fait de cette croyance pour la personne un furqān (Q 8.29). De plus, la victoire de Badr (Q 8.41) est appelée (en arabe) « le jour d’al-Furqān. » 10

Toutes les utilisations diverses du nom al-Furqān nous amènent à considérer sa racine sémitique. Ce mot est présent dans la littérature rabbiniqueD comme פרְקָז, qui signifie « sauver ou racheter ».11

Dans son livre, The Foreign Vocabulary of the Qur’ān, Arthur Jeffery, orientaliste occidental°, retrace l’histoire de ce mot furqdn et propose cette synthèse12.

Il ne fait aucun doute que Muḥammad lui-même a emprunté le mot « Furqān » pour l’utiliser comme un terme technique et lui a donné son propre sens particulier. L’origine de cet emprunt est, sans aucun doute, la concordance des chrétiens de langue araméenne.

Autres noms

Le Qur’ān est appelé par d’autres noms communs :

  • al-Kitāb ( « le Livre » ) dans Q 2.2
  • al-Waḥī ( « l’Inspiration » ) dans Q 21.45
  • al-Dhikr D ( « le rappel » ) dans Q 15.9

Dans les livres de la science coranique, il y a cinquante-cinq noms donnés au Qur’ān, dont les exemples suivants:13.

  • Nūr ( « Lumière » ) dans Q 4.174
  • Shifā’ ( « Guérison » ) dans Q 17.82, Q 41.44
  • Maw’iẓa ( « Guidance » ) dans Q 3.138, Q 10.57

Structure du Qur’ān

Il y a quatre éléments structurels principaux dans le Qur’ān:14

Al-Qur’ān est le livre.

Al-Sūra est un chapitre du Qur’ān et équivaut à un poème.

Al-Àya est similaire à un vers de poésie et sera appelé « vers » dans ce livre.

Al-Fàṣila est la fin du vers et fait office de rime.

Le Sūra

La surā est un chapitre du Qur’ān. Son pluriel est suwar (sūras). Le mot surā apparaît dans le Qur’ān dans Q 2.23, Q 10.38, et Q 11.13.

La plupart des versets qui mentionnent le mot surā appartiennent à la dernière période de l’activité de Muḥammad, lorsqu’il se trouvait principalement à Médine. Les sources islāmiques ne contiennent pas d’informations indiquant l’origine de ce mot. Theodor Nöldeke et d’autres orientalistes suggèrent qu’il vient de l’hébreu שׁוּרָח, utilisé dans la MishnahD, et qui signifie « une file, ou une chaîne ». Le problème avec cette vision est que שׁוּרָח n’est pas associé aux livres saints, alors que le mot surā dans le Qur’ān est exclusivement associé aux livres saints. Cette association oblige Hartwig Hirschfeld à penser que le mot est équivalent au mot juif סדרה, qui est un terme connu pour les marqueurs de section dans les livres hébreux. Jeffery pense que le mot surā vient du mot syriaque ܐܛ~ܪܘܣ, qui signifie « écriture ».15

Selon le codex ‘Utḥmānic, qui est le Qur’ān le plus utilisé, il y a 114 sūras. Selon certains comptes, Q 8 et Q 9 sont considérés comme une seule surā, ce qui fait que le nombre total de sūras est de 113.16 Le nombre de sūras dans le codexD d’Ibn Mas‘ūd est de 112 sūras, puisqu’il n’inclut pas Q 113 et Q 114, connus sous le nom de al-Mu‘awwidhatayn, les deux chapitres de recherche de refuge. Cependant, dans le codex d‘Ubayy Ibn Ka‘b, le nombre de sūras est de 116, car il ajoute les deux sūras al-Ḥafd et al-Khal’. 17 (Voir l’article « Textes coraniques controversés ».) D’autres disent que le codex d’Ibn Ka‘b contient en fait 115 sūras car il combine Q 105 et Q 106 en une seule surā. 18 (Voir l’article « Compilation du Qur’ān ».)

Une surā peut souvent avoir plus d’un nom. Par exemple, la surā Muḥammad (Q 47) est également appelée al-Qitāl ( « Le combat » ). 19 Le nom officiel de Q 65 est surā al-Ṭalāq, ou « Chapitre du divorce ». Q 65 est surnommée surā al-Nisā al-Qusrā ( « Le plus petit chapitre sur les femmes » ) parce qu’elle contient un contenu similaire (questions relatives aux femmes) à celui de Q 4 mais est plus courte.

L’Āya

Le mot āya est parfois traduit par « vers ». Le pluriel de āya est āay ou āyāt. Ce mot apparaît plusieurs fois dans le Qur’ān et sa signification arabe est « la marque ». Il est également « présent dans la poésie ancienne … [du célèbre poète arabe] Imrū’ al-Qays … et était donc en usage avant l’époque de Muḥammad « 20.

Plus tard, l’expression āya a fini par désigner un verset du Qur’ān. Malgré le fait que le mot āya soit répété tout au long du Qur’ān, il apparaît rarement dans les versets mecquois . 21

Bien qu’il n’y ait pas de racine pour le mot āya (āyāt) en arabe, il a probablement atteint les Arabes par l’intermédiaire des chrétiens parlant le syriaque. Ce mot syriaque est utilisé exactement comme le mot hébreu אוח .. En hébreu, le mot āya est dérivé du verbe אוח , qui signifie « indiquer ou marquer ». Les références à ce mot que l’on trouve dans plusieurs livres de l‘Ancien Testament indiquent des significations multiples : les signes (marques) des saisons (Gen. 1.14); les étendards, ou bannières militaires (Num. 2.2); les signes pour se souvenir (Jos. 4.6); les miracles et les prodiges qui révèlent la présence divine (Deut. 4.34 ; Ps. 78.43); et les signes ou avertissements qui accompagnent et témoignent des œuvres des prophètes (Exod. 3.12 ; 1 Sam. 10.7, 9). Ce que l’on remarque d’emblée, c’est que les usages de אוח sont très proches du sens coranique du mot. 22

Les désaccords sur les totaux des sūras (chapitres) mentionnés plus haut se produisent de la même manière avec le nombre de versets du Qur’ān. Bien qu’ils soient basés sur le codex ‘Utḥmānic, même les écoles de lecture les plus célèbres ont calculé les versets différemment:23

  • Premier Médinois (selon Kufa : 6217 versets ; mais, selon Basra : 6214 versets)
  • Dernier Médinois : 6214 versets
  • La Mecque : 6210 versets
  • Basran : 6204 versets
  • Damas : 6227 versets (et aussi 6226 versets)
  • Hummusan : 6232 versets
  • Kufan : 6232 versets

Un autre exemple, Q 112 a cinq versets selon les écoles de lecture mecquoise et syrienne mais seulement quatre versets selon les autres. 24

Al-Fāṣila

Al-fāṣila est le dernier mot d’un verset du Qur’ān. Ces fāṣilas ressemblent aux rimes des lignes poétiques des anthologies de poèmes arabes. Les fāṣila ont souvent dû être pris en considération lors de la composition du Qur’ān arabe actuel afin de préserver les qualités poétiques de la phrase. Cette pratique a conduit à une construction faible, irrégulière ou illogique de certaines structures syntaxiques et de phrases, comme le montrent les exemples suivants25

  • Q 54.41 : Le sujet et l’objet du verbe ne sont pas à leur place dans le but de maintenir la rime. La traduction anglaise de Yūsuf Ali représente le mieux cette syntaxe maladroite : « Au peuple de Pharaon aussi, autrefois, sont venus des avertisseurs (de Dieu). »
  • Q 53.25 : En arabe, le verset dit que « c’est à Allah qu’appartiennent la fin et le début de toute chose ». La « fin » est placée avant le « commencement » pour garder la rime ; autrement le « commencement » aurait été énoncé en premier comme dans Q 28.70.
  • Q 40.5 : Le possessif ya ( « mon » ) est abandonné dans l’arabe et remplacé par un kasra, accent sur le « i », pour garder la rime fāṣila.
  • Q 33.66 : Une lettre inutile a été ajoutée au mot rasūl ( « messager » ) dans le Qur’ān arabe, ce qui en fait rasūlā (forme incorrecte de ce mot), conformément à la rime.
  • Q 21.33 : Au lieu d’utiliser la forme irrégulière normale du pluriel, on utilise le pluriel régulier pour désigner l’objet irrégulier. De plus, dans la grammaire arabe, il existe des singuliers, la forme duelleD (lorsqu’il s’agit de deux sujets ou entités), et les noms pluriels. Dans ce verset, le pluriel est utilisé à la place du duel lorsque le verset parle du soleil et de la lune. Tous ces changements ont été faits pour garder le fāṣila.

On trouve de nombreux exemples de ce genre dans le livre d’al-Raṣāfī, Kitāb al-Shakhṣīya al-Muḥammadīya aw Ḥal-Lughz al-Muqadas. 26

Lorsque la grammaire et la clarté traditionnelles sont apparemment sacrifiées pour maintenir la rime (fāṣila) de ces mots et vers aberrants, on doit se demander comment cet accent sur la rime peut bénéficier à ses lecteurs ?

Le défi du Qur’ān

Les musulmans considèrent le Qur’ān comme un texte miraculeux. Les musulmans croient qu’il est impossible de produire un Qur’ān qui soit égal à celui qu’ils possèdent actuellement. Ils fondent cette conviction sur les défis d’une telle tâche tels qu’ils sont présentés dans le Qur’ān lui-même :

« Dis : ‘Si les hommes et les djinns [jinn] s’unissaient pour apporter le semblable de ce Qur’ān, ils ne pourraient pas apporter le semblable, bien qu’ils se soutiennent mutuellement !’ ». (Q 17.88).

Parmi les exemples similaires, citons Q 11.13 ( « ‘Apportez dix sourates comme lui, conçues …’ » ) et Q 10.38 ( « Apportez une sourate comme lui … » ).

Pour les tribus païennes des QurayshD, le défi de reproduire

« l’équivalent de ce Qur’ān » n’était pas tant une tâche impossible qu’une entreprise ridicule» 27

« De plus, toute tentative de reproduire exactement les compositions de Muḥammad serait futile, puisque ses compositions découlaient de sa propre réserve éducative, de ses expériences psychologiques et de son langage personnel. Si un païen devait imiter le Qur’ān, son imitation ne serait qu’une faible approximation. Le poète Ma‘rūf al-Raṣāfī se fait l’écho de ces difficultés 28

Il est difficile pour un objecteur d’apporter des paroles semblables à celles auxquelles il s’est opposé. Muḥammad le savait bien, c’est pourquoi il a défié son peuple avec calme et assurance, avec tout son courage et sa valeur, en disant :

« Et si vous doutez de ce que nous avons révélé à notre serviteur, alors apportez un chapitre semblable, et appelez vos témoins autres que Dieu si vous dites la vérité » (Q 2.23).

Personne n’a été mentionné comme ayant eu l’intention de s’opposer au Qur’ān […]. Si quelqu’un avait eu l’intention de le faire, il aurait définitivement échoué. Celui qui s’oppose au Qur’ān doit, tout d’abord, avoir une spiritualité exactement comme celle de Muḥammad, et avoir une intelligence comme la sienne et une imagination comme la sienne … Personne ne pouvait s’opposer au Qur’ān et en faire naître un semblable, sauf Muḥammad lui-même.

D’autre part, les musulmans croient que la beauté de la langue du Qur’ān est une donnée, ignorant la réalité selon laquelle la composition du Qur’ān est différente d’une période à l’autre. Les textes mecquois sont enflammés et incitatifs, tandis que les textes médinois sont de la prose sèche. (Voir l’article « Séquence chronologique du Qur’ān ».

Le lecteur objectif peut s’ennuyer en lisant le Qur’ān. L’orientaliste Edward William Lane soutient cette réaction probable du lecteur:29

S’il n’y avait pas l’éloquence de la vieille langue arabe, qui donnait un certain charme à certaines phrases dures et à des histoires ennuyeuses, la lecture du Qur’ān serait impossible. Car on a l’impression d’être descendu de la poésie à la prose. La partie en prose n’a rien qui mérite d’être lu, ce qui compenserait la perte des premiers textes poétiques, car l’effet musical disparaît.

L’opinion de Lane est communément partagée par le grand auteur arabe al-Raṣāfī:30

Ce qui est unique au Qur’ān et une caractéristique qu’il ne partage pas avec le reste des livres célestes et terrestres est : la redondance. Prenez le Qur’ān et lisez une de ses sūras (une des plus longues), puis passez à une autre surā après avoir terminé la première, puis passez à une troisième et une quatrième surā. Compte tenu du sujet traité, on n’a pas l’impression d’être passé d’un surā à un autre. C’est parce que les écrits redondants contiennent principalement la mention des prophètes et de ce qui s’est passé entre eux et leur peuple non croyant, et la mention du paradis, de l’enfer, du retour à la vie, de la résurrection, et le dénigrement des incroyants et de leur tromperie par l’idolâtrie. … Ce qui est le plus étonnant, c’est que le Qur’ān est redevable à la redondance pour son effet sur les āmes de ceux qui le lisent et l’entendent.

Il n’est ni simple, ni habituel parmi les savants qu’un livre utilise une telle redondance, et pourtant, s’en sorte sain et sauf, sauf le Qur’ān [notre mise en gras]. Considérant cela, il est possible d’appeler le Qur’ān « Le livre de l’influence par la redondance ».

l’opinion des Quraysh sur le Qur’ān

Même si les premiers sūras du Qur’ān furent récités dans la langue de la tribu de Quraysh, la majorité des membres de la tribu de Muḥammad ne furent pas impressionnés. En fait, la réaction initiale au Qur’ān par le peuple des Quraysh ne fut pas particulièrement favorable :

  • « Ce ne sont que des contes de vieux » (Q 6.25 ; Q 8.31 ; Q 23.83 ; Q 27.68)
  • Le Qur’ān a été composé par un poète (Q 21.5 ; Q 37.36 ; Q 52.30 ; Q 69.41)

Ils ont également rejeté Muḥammad comme

  • « un sorcier évident », « un magicien, un menteur » (Q 10.2 ; Q 38.4)
  • « un devin » (Q 52.29 ; Q 69.42)
  • « possédé », « fou » (Q 15.6 ; Q 44.14 ; Q 52.29 ; Q 68.2, 51 ; Q 81.22)
  • « ensorcelé » (Yūsuf Ali trans. Q 17.47 ; Q 25.8)

Cette réponse négative est probablement ce qui a incité al-Raṣāfī à faire ces remarques31.

Ils magnifient grandement l’inimitabilité du Qur’ān, mais ils sont incapables de mentionner un seul effet clair de ce miracle qui a conduit au succès de l’appel à l’Islām (Da‘wa Islāmique). Car il est clair que la Da‘wa Islāmique a réussi par l’épée, et non par le miracle du Qur’ān.

Importance de l’étude du Qur’ān

La lecture et l’étude du Qur’ān sont précieuses tant pour leur signification historique que religieuse

A – Source pour l’étude de l’histoire de Muḥammad et des débuts de l’Islām

Le Qur’ān est le récit de l’appel (Da‘wa) de Muḥammad à l’Islām. Ce livre ancien nous aide à comprendre la personnalité de Muḥammad. Par exemple, on y trouve la profondeur des différents soucis que Muḥammad a connus (Q 94), le feu de sa colère contre son oncle Abū Lahab (Q 111), ou encore les lois qu’il a modifiées en fonction de ses décisions humaines, comme sa position envers Zaynab Bint Jaḥsh (la femme de son fils adoptif), où Muḥammad a modifié les lois pour pouvoir l’épouser (Q 33.4, 36, 37, 53).

Nous découvrons également à travers le Qur’ān comment Muḥammad considérait son contexte et comment il le traitait et produisait ses doctrines envers ceux qui lui prêtaient allégeance et ceux qui s’y opposaient. (Voir l’article « Le Qur’ān et les personnes d’autres confessions » ).

Source pour la compréhension du contexte islāmique.

Selon la théorie islāmique, le Qur’ān est l’adresse d‘Allah aux musulmans, le fondement des enseignements islāmiques et la source des législations. C’est le livre éducatif qui nourrit l’esprit islāmique et définit pour le musulman la philosophie de la vie et la façon de se comprendre soi-même ainsi que les autres. Pour les musulmans, le Qur’ān est l’outil qui façonne leur vision du monde.

Malgré la place centrale qu’occupe le Qur’ān dans la vie des musulmans, la plupart d’entre eux, même les musulmans arabes, en ont une connaissance très limitée. Cette connaissance est souvent remplie d’ambiguïtés et de lacunes et entourée d’interdictions héritées. C’est pourquoi nous avons décidé de faire la lumière sur le Qur’ān, en nous appuyant principalement sur les différentes sources islāmiques – les exposés, les récits (adīth) et les récits historiques. Nous avons également fait appel à des œuvres littéraires contemporaines en arabe et dans d’autres langues pour aider le lecteur à acquérir une connaissance approfondie du Qur’ān.

Ce livre contient également des documents de recherche concernant des questions historiques ( « Compilation du Qur’ān » ), des questions intellectuelles ( « Les femmes dans le Qur’ān » ) et des questions sociales ( « Le Qur’ān et les personnes d’autres confessions » ).

Ce livre examine également les sūras du Qur’ān selon leur disposition actuelle, en traitant de trois domaines concernant les versets : (1) l’analyse critique, (2) l’abrogation, et (3) les variantes de lecture. L’objectif de cet examen est d’ouvrir une discussion sérieuse et intellectuelle sur le Qur’ān.

Faits concernant le Qur’ān

Voici quelques faits divers intéressants :32

  • Le mot le plus long du Qur’ān arabe actuel se trouve au Q 15.22 : fa‘asqaynākumūh (فَأَسْقَيْنَاكُمُوهُ), ce qui signifie « ainsi, nous vous le donnons à boire. »
  • Le verset le plus long se trouve dans Q 2.282 et est appelé « le verset de la dette (du prêt) ».
  • Le verset le plus court est le Q 93.1.
  • La surā la plus longue est Q 2 et la plus courte est Q 108.
  • Q 12 est la seule surā qui compte plus de cent versets et qui ne contient aucune mention du paradis ou de l’enfer.

Il y a deux copies du Qur’ān arabe actuel (basé sur le codex ‘Utḥmānic) qui sont utilisées aujourd’hui parmi les musulmans :

(1) le Qur’ān (le plus répandu) selon la lecture de ‘Āṣim telle que racontée par Ḥafs, qui a été publié au Caire sous la direction d’al-Azhar en 1924 et

(2) le Qur’ān selon la lecture de Nāfi’ telle que racontée par Warsh, qui a été publié en Algérie en 1905.


Notes

  1. Abū Shuhba 17.
  2. al-Suyūṭī, al-Itqān 341; Abū Shuhba 17.
  3. al-Suyūṭī, al-Itqān 340.
  4. Ibid.
  5. Ibid. 339; Abū Shuhba 18.
  6. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 233.
  7. Ibid. 234; Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 29-32.
  8. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 233.
  9. al-Zarkashī 1: 281-282.
  10. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 226.
  11. Geiger 41-42.
  12. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 228-229.
  13. al-Suyūṭī, al-Itqān 336-338; al-Zarkashī 1: 273-276.
  14. al-Suyūṭī, al-Itqān 336.
  15. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 181-182.
  16. al-Suyūṭī, al-Itqān 422.
  17. Ibid. 423.
  18. Ibid. 427.
  19. Ibid. 362.
  20. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 73.
  21. Ibid. 72.
  22. Ibid. 72-73.
  23. al-Dāni, al-Bayān Ḥa’-Ṭa’.
  24. Ibid. 296.
  25. al-Raāfī 561-562.
  26. Ibid. 561-570; compare with the analysis of ila in Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 34-38 and Sketches 33-34.
  27. Nöldeke, Sketches 36.
  28. al-Raṣāfī 604-605.
  29. Lane cv-cvi.
  30. al-Raāfī 554.
  31. Ibid. 608.
  32. al-Zarkashī 1: 255.

TheQ Dilemma English Book

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Le Qur’ān expliqué: Compilation du Qur’ān

Selon les croyances islamiques, le Qur’ān a été révélé lorsque Muḥammad a commencé à proclamer sa foi et à en réciter des passages pour que ses disciples les mémorisent. Lorsque les Mecquois ont persisté à rejeter Muḥammad et ses disciples, ils ont émigré à Médine vers 621. Cette migration est connue dans les sources islamiques comme l’HijraD, ou l’Hégire. Ensuite, à Médine, une autre partie du Qur’ān a été donnée.

Muḥammad avait l’habitude de demander à ses scribes d’ajouter de nouveaux versets à différents textes. 1 Cependant, cette procédure ne s’appliquait pas à tous les passages du Qur’ān. Ce qu’il a laissé avant sa mort (11 H / 632 J.-C.) n’était que des fragments épars écrits sur des matériaux primitifs, comme le cuir, l’argile et les feuilles de palmier. Ces morceaux n’ont pas été conservés par Muḥammad ni par personne en particulier. Lorsque la compilation du Qur’ān a été lancée, le comité de compilation n’a pas désigné de personne spécifique pour recueillir ces morceaux, mais a demandé à tous ceux qui détenaient une partie du Qur’ān de la présenter. Il semble clair que Muḥammad n’avait jamais cherché à collecter le Qur’ān. Un érudit musulman a expliqué que

«Muḥammad n’a pas compilé le Qur’ān dans un livre parce qu’il prévoyait l’abrogation de certaines de ses règles ou récitations »2.

Une rédaction partielle du Qur’ān a eu lieu à Médine, ce qui signifie que la partie mecquoise du Qur’ān (les deux tiers du matériel coranique) n’a jamais été écrite. S’il est possible que Muḥammad ait écrit certains textes à la Mecque, ils ont dû être perdus, car les annales historiques ne mentionnent pas que les musulmans aient emporté des textes coraniques avec eux pendant l’Hijra.

De plus, nous ne trouvons dans les sources historiques aucune mention de scribes à la Mecque. La seule référence possible suggérant l’existence d’un scribe à cette époque mentionne ‘Abd Allah Ibn Abī Sarḥ qui a raconté avoir écrit le Qur’ān pour Muḥammad à La Mecque. 3 Plus tard, il a rompu son association avec Muḥammad et a rejoint les Quraysh après que la fausseté des prétentions de Muḥammad à la prophétie lui soit apparue. 4

Ibn Sa’d a cité une liste de «ceux qui ont compilé le Qur’ān» à l’époque de Muḥammad : Ubayy Ibn Ka’b, Mu’ādh Ibn Jabal, Abū al-Dardā’, Zayd Ibn Thābit, Sa’d Ibn ‘Ubayd, Abū Zayd Ibn ‘Ubayd, et Mujma’ Ibn Jārīya. Il est également dit qu’Ibn Mas’ūd a appris une partie du Qur’ān de Mujma’ Ibn Jārīya. Un autre rapport mentionné par Ibn Sa’d ajoute d’autres noms : ‘Uthmān Ibn ‘Affān, Tamīm al-Dārī, Mu’ādh Ibn Jabal, ‘Ubāda Ibn al-Ṣāmit, et Abū Ayūb. 5

Il semble que le sens du mot «compilation» ici soit en fait la mémorisation. Les historiographes islamiques sont unanimes pour dire que la première compilation du Qur’ān, en termes d’écriture, a eu lieu plus tard sous la supervision de Zayd Ibn Thābit. Il ne fait cependant aucun doute que ceux qui ont «compilé» le premier Qur’ān, que ce soit par écrit ou par mémorisation, l’ont recueilli en partie et non en totalité ; il n’y avait pas encore de texte écrit et Muḥammad était encore en train de le modifier en ajoutant des parties du Qur’ān, en abrogeant certaines et en en supprimant d’autres.

Nous remarquons que les personnages qui auraient recueilli le Qur’ān du vivant de Muḥammad, à l’exception de ‘Uthmān Ibn ‘AffānN, n’avaient pas de statut social car ils étaient éloignés des lieux de décision. Il semble qu’ils étaient simplement fidèles à l’appel de l’Islām. Si l’on considère que ‘Uthmān Ibn ‘Affān a fait l’objet de critiques de la part de nombreux musulmans durant son règne, peut-être son nom a-t-il été ajouté à cette liste pour lui conférer une sorte de sainteté.

Par conséquent, pendant toute la période mecquoise et pendant certaines périodes médinoises, la mémoire était le principal outil pour enregistrer les passages du Qur’ān. Cependant, la mémoire n’est pas un outil fiable, car elle a fait défaut à Muḥammad lui-même.

«C’est pourquoi nous le voyons réconforter les croyants dans Q 2.106, en disant qu’Allah leur en accordera un meilleur à la place de chaque verset qui a été victime de l’oubli. »6

Compilation d’Abu Bakr et de ‘Umar

Deux grandes compilations, rassemblées sous deux califes différents mais sous la direction du même chef de comité, ont fini par produire le premier codex rudimentaire. Le but premier de la première compilation était de collecter et de préserver les manuscrits pour assurer la survie du Qur’ān.

La première compilation de Zayd

La première compilation du Qur’ān a été réalisée par Abū Bakr, qui a succédé à Muḥammad à la tête des musulmans (11-13 H / 632-634 J.-C.). 7 Il mena une série de guerres contre les tribus qui refusaient de se soumettre à l’autorité des musulmans. Ces guerres (connues dans les sources islāmiques sous le nom de Ḥurūb al-Ridda, ou guerres d’apostasie) se terminèrent par une guerre sanglante guerre contre Musaylima« , un rival de Muḥammad qui prétendait également à la prophétie, à al-Yamāma (12/12/AD 633). Les musulmans y remportent une grande victoire mais au prix d’un lourd tribut humain.

Selon les narrations, certains de ceux qui furent tués dans cette guerre décisive étaient ceux qui avaient mémorisé le Qur’ān. Par conséquent, ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb suggéra à Abū Bakr de compiler le Qur’ān. En réponse, Abū Bakr lui demanda comment il pouvait faire quelque chose que Muḥammad ne ferait pas. Mais ‘Umar défendit la justesse de son opinion en disant que d’autres guerres suivraient la guerre d’al-Yamāma, et que si d’autres conservateurs du Qur’ān étaient tués, une grande partie du Qur’ān serait perdue. 8 Par conséquent, …

«Abū Bakr, inquiet que le Qur’ān puisse être perdu», chargea ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb et Zayd Ibn Thābit de compiler le Qur’ān. 9

Certains récits font allusion aux craintes d’Abū Bakr concernant la perte du Qur’ān (sans mentionner les conseils de ‘Umar) et déclarent en résumé que «lorsque les musulmans ont été tués dans la guerre d’al-Yamāma, Abū Bakr était terrifié. Il craignait qu’un groupe de conservateurs du Qur’ān ne périsse. Ainsi, les gens se sont présentés avec ce qu’ils avaient jusqu’à ce qu’ils soient rassemblés sur papier à l’époque d’Abū Bakr, le premier à compiler le Qur’ān en manuscrits10.

La mention du «papier» dans la narration révèle la manipulation des histoires dans les sources islamiques, car les Arabes ont utilisé le papyrus après l’occupation de l’Égypte sous le règne de ‘Umar, et le papier a été fabriqué un siècle et demi plus tard à Samarqand. Sa production à Bagdad n’a commencé qu’à la fin du VIIIe siècle de notre ère, avec l’aide des Chinois. 11

Abū Bakr confia la tâche de compiler le Qur’ān à Zaydcar Zayd avait l’habitude d’écrire le Qur’ān pour Muḥammad :

«Tu es un jeune homme raisonnable ; nous n’avons rien contre toi. Tu as écrit la révélation au prophète. Suis la trace du Qur’ān afin de le recueillir »12.

Cette mission n’était pas facile, comme l’explique Zayd :

« Si on m’avait confié la charge de déplacer des montagnes, cela aurait été plus facile que ce qu’on m’a confié. J’ai suivi la trace du Qur’ān à partir des poitrines des hommes [c’est-à-dire ce que les hommes avaient mémorisé], des feuilles de palmier, des morceaux de cuir, des côtes, des morceaux de pierre et de poterie. »13

Le processus de collecte s’est déroulé de la manière suivante :

Abū Bakr envoya après les gens qui étaient connus pour leur grande qualité de mémorisation et leur demanda de travailler sous la direction de Zayd. Une réunion fut organisée dans la maison de ‘Umar pour discuter de la manière de compiler le Qur’ān et de répartir les tāches. 14 Ils demandèrent à Bilāl d’annoncer à Médine à ceux qui avaient en leur possession des pièces écrites du Qur’ān de les soumettre au comité de rédaction. 15 Le témoignage de deux personnes était nécessaire pour confirmer qu’un morceau était Qur’ānique. 16

Une histoire intéressante raconte que ‘Umar a apporté au comité le verset sur la lapidation (al-rajm), mais Zayd ne l’a pas noté parce que ‘Umar n’avait personne d’autre que lui-même pour en témoigner. 17

Le processus de compilation a duré environ un an. 18 Une fois la tāche terminée, Zayd l’a remis à Abū Bakr. Puis ‘Umar le reçut lorsqu’il devint le second successeur (calife) après la mort de Muḥammad. Les manuscrits ont fini chez sa fille, Ḥafṣa, après sa mort. 19

Compilation de ‘Uthmān

La multiplicité des maṣāḥif (codex) et des variantes de lecture aggravait les conflits entre musulmans. Pour aider à réduire ces tensions et unifier les différents groupes musulmans, ‘Uthmān Ibn ‘Af̣f̣ān (troisième calife) a établi un comité de compilation pour créer un Qur’ān standard pour tous.

La deuxième compilation de Zayd

Une histoire singulière raconte que ‘Uthmān Ibn ‘Af̣f̣ān a recueilli le Qur’ān sous le règne de ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb. 20 On ne comprend pas, d’après cette histoire, si ‘Uthmān a compilé le Qur’ān par lui-même ou s’il a participé au travail du comité sous la direction de Zayd. Cependant, si ce qui est signifié est qu’il a participé au comité, l’histoire est acceptable.

Vers l’année 25 de l’Hégire (ou, dit-on aussi, 30 de l’Hégire), ‘Uthmān Ibn ‘Af̣f̣ān prit la décision de compiler le Qur’ān. 21 Cette décision a été prise après que des conflits aient éclaté entre les musulmans au sujet des variantes de lecture du Qur’ān. Le conflit concernant la différence de formulation était très répandu :

  • L’Irak :
    Les armées islāmic comprennent des tribus et des clans concurrents. Sur la base de cette division clanique, des conflits surgirent entre les musulmans sur diverses questions, notamment sur le Qur’ān. Un schisme se produisit entre les gens de Basra qui récitaient leur Qur’ān selon la lecture qu’en faisait Abū Mūsā et les gens de Kufa qui récitaient leur Qur’ān selon la lecture qu’en faisait Ibn Mas’ūd. 22
  • Irak/Syrie (al-Shām) :
    La dissension sur quel muṣḥāf était le Qur’ān correct s’étendit en dehors de l’Irak. Lorsque les combattants musulmans d’Irak et ceux de la Syrie (al-Shām) se sont retrouvés ensemble à combattre aux frontières de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, ils ont commencé à se quereller sur la question de savoir qui avait le bon Qur’ān. 23 Les gens de Hums considéraient le codex d’al-Miqdād Ibn al-Aswad comme le plus crédible, tandis que le reste des gens de la Syrie s’en tenaient au codex d’Ibn Ka’b. Les gens de Kufa considéraient la récitation d’Ibn Mas’ūd comme la norme, tandis que les gens de Bassora considéraient le texte d’Abū Mūsā comme le plus fiable. 24 Les rapports concernant les querelles parvinrent à ‘Uthmān. 25
  • Médine :
    La dissension au sujet de la lecture s’était également répandue à Médine, qui était le cœur de l’Islām à cette époque. Même les enseignants des jeunes étaient en conflit :
    «Certains d’entre eux considéraient même que la lecture des autres était blasphématoire». Cette nouvelle parvint également à ‘Uthmān, qui se leva et dit : «Vous êtes en ma présence, mais vous n’êtes pas d’accord sur ce sujet et vous le dites incorrectement. Ceux qui sont dans les régions lointaines sont encore plus en désaccord et en incorrection grammaticale. Rassemblez-vous, ô Compagnons de Muḥammad, et écrivez pour les gens un Imām [une norme à suivre]».26
    Il a également dit :
    «Votre prophète a été enlevé il y a à peine quinze ans, et vous êtes déjà en désaccord sur le texte même du Qur’ān! 27».

En outre, l’expansion des musulmans et leur mélange avec d’autres groupes de population ont entraîné le mélange des langues. Il semblait donc que le processus linguistique évolutif mettrait le Qur’ān «en danger de corruption, de déformation, d’ajout et de suppression »28.

La confiance dans le manuscrit de Ḥafṣa.

Il ne fait aucun doute que la présence de centaines de manuscrits du Qur’ān parmi les musulmans a alimenté le schisme dans les différentes villes (Kufa, Basra, Medina) et régions (Irak, Syrie) sur lesquelles le Qur’ān était la norme. Un historien a estimé le nombre de codex à la fin du règne de ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb (13-23 AH/AD 634-644) à 100 000 codex répartis en Irak, en Syrie et en Egypte. 29

Nous ne sommes pas d’accord avec cette estimation, car elle n’est pas basée sur des données historiques mais seulement sur des hypothèses. Même s’il y avait un grand nombre de manuscrits à cette époque dans chaque ville, il aurait dû en rester au moins quelques-uns.

Il est certain que toutes les copies du Qur’ān étaient des copies partielles et non le manuscrit complet. Certaines pouvaient avoir quelques sūras, tandis que d’autres pouvaient avoir des portions plus importantes. Cependant, il est hautement improbable que 100 000 copies complètes du Qur’ān aient existé alors. Si ce grand total était vrai, nous aurions au moins des dizaines de ces manuscrits aujourd’hui. La première tentative de compilation a révélé que les manuscrits écrits du Qur’ān étaient répartis entre de nombreux musulmans, sans tenir compte des parties du Qur’ān qui étaient uniquement mémorisées. La seule copie qui a été complétée par le premier comité de Zayd a pris plus d’un an à compiler. C’était la seule copie qui était considérée comme quelque peu complète et qui fut finalement donnée à Ḥafṣa pour être conservée. Aucune copie supplémentaire n’a été faite pour la circulation.

Comme la seule copie compilée unique était celle confiée à Ḥafṣa, ‘Uthmān lui demanda de la soumettre afin qu’elle devienne la base du travail qu’il allait commencer. Il nomma un comité de rédaction composé de Zayd Ibn Thābit, Sa’īd Ibn al-‘Āṣ, ‘Abd al-Raḥmān Ibn al-Ḥārith Ibn Hishām, et ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr. Dans un autre récit, la liste comprend Zayd Ibn Thābit, ‘Abd Allah Ibn ‘Amr Ibn al-‘Āṣ, ‘Abd Allah Ibn al-Zubayr, Ibn ‘Abbās et ‘Abd al-Raḥmān Ibn al-Ḥārith Ibn Hishām. ārith Ibn Hishām. 30 D’après une autre source, nous voyons que ‘Uthmān a nommé un comité de douze hommes issus des deux groupes, les Emigrants (al-Muhājirūn)D et les Aides (al-Anṣār)D. 31

‘Uthmān demanda au comité de compilation d’écrire le Qur’ān dans la langue des Quraysh. Cette condition est attribuée à ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb, qui avait exigé des membres du comité initial de Zayd de rédiger le Qur’ān dans « la langue de Muḍar» 32.

Après que le comité eut accompli la tāche qui lui avait été confiée, plusieurs copies furent faites et distribuées aux personnes présentes. ‘Uthmān envoya également des copies aux centres de gouvernement islāmic, ordonnant aux gouverneurs de détruire les codices en leur possession. 33 Il envoya une copie à Kufa, à Basra et à la Syrie, et en garda une pour lui-même. On dit que sept copies furent faites et que ‘Uthmān les envoya à la Mecque, en Syrie, au Yémen, à Bahreïn, à Basra et à Kufa. Il en laissa également un à Médine. L’opinion islāmique tend à préférer le récit selon lequel il aurait envoyé quatre exemplaires. 34

Après cela, ‘Uthmān lui rendit la copie de Ḥafds, et elle la conserva jusqu’à l’époque du règne de Marwān Ibn al-Ḥakam. 35 Après sa mort, Marwān demanda à ‘Abd Allah Ibn ‘Umar (le frère de Ḥafds) de lui envoyer la copie. 36 ‘Abd Allah Ibn ‘Umar l’envoya à Marwān, qui la brûla,

«craignant que quelque chose ne soit différent de ce que ‘Uthmān a copié».37

Aucune opposition n’a été rapportée à l’action de ‘Uthmān, sauf l’objection d’Ibn Mas’ūd. 38 Les personnalités éminentes de Médine soutenaient la décision d’unifier le Qur’ān. Les sources historiques s’accordent à dire que ‘Alī Ibn Abī Ṭālib reconnut ‘Uthmān pour son travail de compilation du Qur’ān et dit :

« Ô vous, peuple, ne calomniez pas ‘Uthmān et ne dites que du bien de lui concernant la combustion des maṣāḥif [codices], car par Allah il a fait ce qu’il a fait aux maṣāḥif en présence de nous tous.»39

Alī Ibn Abī ṬālibN annonça que s’il était au pouvoir, il aurait fait ce que ‘Uthmān a fait à ce sujet. 40

Le rejet d’Ibn Mas’ūd

Ibn Mas’ūd refusa de reconnaître le codex ‘Uthmānic pour des raisons personnelles. Son cœur était rempli d’amertume car il avait été exclu du comité de compilation. Il dit :

« O musulmans ! Je suis écarté de la rédaction des copies du Qur’ān, et l’accusation est portée sur un homme [Zayd], qui, par Allah, lorsque je suis devenu musulman, était encore sous la garde de l’intérieur de son père [avant la conception], un kāfirD [un infidèle, ou un incroyant] »41.

Ibn Mas’ūd pensait qu’il avait le droit de superviser la rédaction du Qur’ān. Il a dit avec mordant :

«J’ai appris de la bouche de (Muḥammad) soixante-dix sūras, alors que Zayd Ibn Thābit avait à peine deux mèches de cheveux et jouait avec les garçons. »42.

Ibn Mas’ūd poussa le peuple de Kufa à rejeter le Qur’ān officiel imposé par la décision de ‘Uthmān. 43 Par conséquent, le peuple de Kufa resta fermement attaché au codex d’Ibn Mas’ūd jusqu’à l’arrivée au pouvoir d’al-Ḥajjāj Ibn Yūsuf al-ThaqafīN. 44

Différence entre les deux compilations

Même si les deux principaux comités de compilation avaient des objectifs différents pour élaborer un Qur’ān écrit, les résultats étaient similaires – un codex défectueux.

La compilation d’Abū Bakr contre celle de ‘Uthmān.

L’histoire qui prétend que la décision d’Abū Bakr de compiler le Qur’ān était le résultat de l’issue après la bataille de Yamāma ne peut être acceptée, car très peu d’hommes qui ont été tués dans la bataille avaient une connaissance du Qur’ān.

« En fait, nous trouvons […] que seuls deux de ceux qui sont tombés morts dans la bataille étaient clairement reconnus pour leur connaissance du Qur’ān. Il s’agit de ‘Abd Allah Ibn Ḥafaṣ Ibn Ghānim et Sālim, tous deux disciples d’Abū Ḥudhayfa. » 45

Il est évident que la décision d’Abū Bakr et de ‘Umar de compiler le Qur’ān visait à obtenir une copie complète des passages du Qur’ān en un seul endroit. En d’autres termes, la compilation et l’archivage du Qur’ān étaient motivés par la crainte qu’il ne se perde.

La compilation de ‘Uthmān, en revanche, était motivée par le désir d’unifier et de normaliser les différences entre les versions. Après la propagation de l’Islām dans la péninsule arabique, les Arabes ont commencé à lire le Qur’ān selon leurs différentes langues. ‘Uthmān vit que cela conduisait «certains d’entre eux à traiter les autres de déviants dans leur lecture». Il craignit l’escalade de cette affaire et copia donc ces copies du Qur’ān en un seul Qur’ān organisé en sūras. De toutes les langues qu’il aurait pu choisir, il a sélectionné la langue des Quraysh, arguant que la révélation est descendue dans cette langue. Si le Qur’ān a été diffusé dans différentes langues pour des raisons de facilité et de confort au début, maintenant ce besoin n’existait plus. Il l’a donc limité à une seule langue. 46.

Al-Ḥārith al-Muḥāsibī explique :

« Ce qui est connu parmi les gens est que le compilateur du Qur’ān est ‘Uthmān. Or, il n’en est rien. ‘Uthmān a fait lire aux gens une seule version, un choix fait entre lui et ses contemporains, les Emigrants et les Aides. »47

L’effort d’unification de ‘Uthmān était fondé sur des motivations politiques. Les musulmans avaient besoin d’un lien pour les unir et l’Islām était l’agent commun. Le Qur’ān étant le livre saint de l’Islām, les divergences sur ce livre affaibliraient le lien entre les musulmans. L’imposition d’une seule lecture (un seul livre) était nécessaire pour promouvoir l’unité politique. La crainte d’affaiblir l’unité était plus importante que le maintien de la variété dans le Qur’ān. Lorsque Muḥammad permit aux individus de lire le Qur’ān selon leur langue tribale et autorisa la multiplicité des lectures, il fut alors un leader de la formation politique et religieuse confiné à Médine et ses environs. Plus tard, à l’époque de ‘Uthmān, la situation politique et religieuse se compliqua. ‘Uthmān dut s’attaquer au texte du Qur’ān en fonction des besoins d’une société en pleine croissance de développement et d’expansion militaire.

Tout d’abord, lorsque le Qur’ān fut présenté à ‘Uthmān, il dit :

« Il [le Qur’ān] a des défauts grammaticaux (laḥn) et les Arabes les corrigeront selon leurs langues ».48

Il ajouta :

« Si l’auteur était de Thaqīf, de tels problèmes ne s’y trouveraient pas ».49

Certains lui demandèrent de s’efforcer d’effectuer les révisions nécessaires. Lorsque le verset Q 20.63 fut récité en sa présence, on lui suggéra de le corriger. Mais il refusa, disant : «Laissez-le. Il n’interdit pas ce qui est permis et ne permet pas ce qui est interdit »50.

Deuxièmement, il y avait une autre imperfection dans le Qur’ān, en ce qu’il n’avait pas les points sur les lettres ou les accents. Cependant, cette omission ne différait pas des autres versions du Qur’ān:51

C’était au lecteur lui-même de placer les points sur les lettres des mots et de mettre les accents en fonction de la signification des mots.

  les versets. Par exemple, on lira les mots comme هُ ُمِّلَعُي
[Yuāllimuhu (« Il l’enseigne »)], un autre هُمِّلَعُن [Nuāllimuhu (« Nous l’enseignons »)], un autre encore هُمِلْعُت [Tu’limhu (« Tu l’informes »)], et ِ هِمْلِعِب [bi’ilmihi (« par sa connaissance »)], etc, en plaçant les points et les accents selon l’interprétation du verset par le lecteur. De plus, de nombreux lecteurs ont choisi des lectures [préférées] du Qur’ān qui étaient interdites par ‘Uthmān, comme on peut le voir dans les livres des variantes de lecture du Qur’ān.

L’absence de points et autres marques diacritiquesD maintenait présente la question des lectures multiples, qui nécessitait une nouvelle intervention de l’autorité politique. Cette intervention eut lieu lorsque al-Ḥajjāj Ibn Yūsuf al-Thaqafī révisa certains passages du Qur’ān. 52

Maṣdḥif multiple

Lorsque ‘Uthmān initia l’unification des lectures du Qur’ān, il s’appuya sur Ḥafṣās muṣḥāf mais ne le copia pas strictement. Son comité a entamé le processus d’examen et de révision de Ḥafṣās muṣḥāf, ou codex, ainsi que l’organisation des sūras. Même si ‘Uthmān ordonna la lecture unifiée, il ne détruisit pas la copie de Ḥafṣās, permettant à certains individus de conserver leurs propres maṣāḥif différents. Il ne poursuivit pas non plus les propriétaires d’autres copies, ou maṣāḥif53.

Autres Maṣdḥif concomitants au codex de ‘Uthman
Sālim Ibn Ma’qal‘Abd Allah Ibn Mas’ūdN
‘Abd Allah Ibn ‘AbbāsN‘Â’ishaN
‘Uqba Ibn ‘Âmir*‘Ali Ibn Abi ṬālibN
Al-Miqdād Ibn al-Aswad‘Abd Allah Ibn al-ZubayrN
Abū Mūsā al-Ash’ari**‘Abd Allah Ibn ‘Umar
Ubayy Ibn Ka’bNUm Salma***

Il a ensuite régné sur l’Égypte. Son codex a été découvert en 313 H / 925 J.-C., mais il est aujourd’hui perdu.

** Son codex s’est répandu à Bassora. Il ressemble beaucoup aux codex d’Ibn Mas’ūd et d’Ibn Ka’b mais est en désaccord avec le codex ‘Uthmānic.

*** Elle était l’une des épouses de Muḥammad.

Les sources historiques énumèrent également les noms de personnes appartenant à la deuxième génération de musulmans (les successeurs), qui avaient leurs propres codes (maṣāḥif) : ‘Ubayd Ibn ‘Umayr al-Laythi, ‘Aṭa’ Ibn Abi Rabāh, ‘Akrama, Mujāhid, Sa’id Ibn JubayrN, al-Aswad Ibn Yazid, ‘Alqama Ibn Qays, Muḥammad Ibn Abi Mūsā, Ḥaṭṭān Ibn ‘Abd Allah al-Raqāshi, S. āliḥ Ibn Kisān, et Ṭalḥa Ibn Muṣarrif. 54

Nous aborderons ci-dessous deux autres codex, car ils contiennent plus de matériel que celui qui est en circulation.

Le codex d’Ubayy Ibn Ka’b

Les récits nous disent qu’UbayyN a participé au premier comité de compilation. 55 Il semble que cela l’ait aidé à préparer son propre codex spécial. Celui-ci diffère du codex approuvé par ‘Uthmān dans l’ordre des sūras. Cependant, ce qui distingue le plus la version d’Ubayy est qu’elle contient deux sūras supplémentaires : al-Khal’ et al-Ḥafd. (Voir l’article: Textes coraniques controversés.) Ces textes ont été publiés sous une forme éditée par Hammer. Nöldeke les a rééditées et publiées par la suite. 56

Le codex de ‘Alī

‘Ali Ibn Abi Ṭālib aurait eu son propre Qur’ān. Selon certaines sources islamiques, ‘Ali aurait recueilli le Qur’ān après la mort de Muḥammad, lorsqu’il jura de ne pas quitter sa maison «jusqu’à ce que le Qur’ān soit compilé en un seul livre.» Cependant, cette affirmation n’a aucun fondement solide. Si ‘Ali avait effectivement rassemblé un codex de son propre chef, il aurait dū rester chez lui et y travailler pendant toute la période de règne des califes Abū Bakr et, peut-être, ‘Umar. (Voir un examen de cette question dans l’article «Séquence chronologique du Qur’ān »). Pour défendre l’affirmation de ‘Ali, al-Sijistāni explique que l’expression «compiler le Qur’ān» signifie le mémoriser. 56

Au cours des décennies suivantes, les différents groupes musulmans s’opposent de plus en plus sur le leadership religieux, les pratiques religieuses appropriées et un Qur’ān correct. Selon l’opinion des chiites, ‘Alī aurait dū être le premier successeur de Muḥammad et ils pensent donc que sa copie du Qur’ān est la version correcte et que toute autre copie est corrompue58.

Certains chiites ont dit :]

«Nous avons trouvé la nation (umma) différant dans son transfert [du Qur’ān] grandement et horriblement. En raison de la grandeur de leur différence, nous sommes devenus incapables de distinguer son correct de son corrompu, ou son manque de l’excès [ce qui a été retiré ou ajouté], et nous ne connaissons pas non plus l’ordre de tout ce qui a été révélé, ni ce qui vient avant ou après.» Certains d’entre eux ont dit : «Personne ne connaît ce qui en manque, sauf l’imāmD, à qui on en a donné la connaissance, et à ses disciples [également].»

Ceux qui niaient tout ajout à celui-ci (le Qur’ān) mais affirmaient qu’il en manquait [des parties] disaient :

«Abū Bakr et ses disciples étaient ceux qui se chargeaient de le fixer et de l’organiser, et de le mettre, ou la plupart, dans des sūras (chapitres), en faisant remonter l’arrière et en repoussant l’avant ; c’est pourquoi de nombreux versets ont été mal placés et des versets ont été retirés de leur place méritoire.»

Les chiites accusèrent Abū Bakr et ‘Uthmān d’avoir altéré le Qur’ān. Les chiites affirmaient qu’Abū Bakr et ‘Uthmān avaient supprimé tous les paragraphes faisant référence à ‘Alī et à sa famille et avaient omis de la version actuelle les versets adressant des critiques aux «Aides et Emigrants pour avoir commis des comportements inappropriés».59 Au quatrième siècle de l’hégire, les écrits des chiites faisaient référence à la corruption dans environ cinq cents versets du Qur’ān. 60

Malgré cette contestation, les chiites considèrent aujourd’hui le Qur’ān circulé comme un livre saint et ils continueront à l’utiliser jusqu’à la venue d’al-MahdīD, qui, selon eux, apportera le véritable Qur’ān non corrompu. 61

Depuis le quatrième siècle de l’hégire, l’école chiite doute de la véracité de l’actuel Qur’ān arabe comme étant le Qur’ān de Muḥammad. Elle a adhéré à son point de vue selon lequel le Qur’ān a été soumis à différentes corruptions, notamment un changement de l’ordre des sūras et des versets, des omissions et des ajouts. À une époque, une version du Qur’ān comportant deux sūras supplémentaires, al-Nūrayn et al-Wilāya, a circulé dans les groupes cléricaux chiites. (Voir l’article: Textes coraniques controversés.) En 1842, Joseph Garcin de Tassy publia la sūra al-Nūrayn, mais Mirza Kazem Beg douta de son originalité, tandis que William St. Clair-Tisdall accepta la possibilité de son authenticité. En 1913, il publia la sūra al-Wilāya après l’avoir trouvée dans un manuscrit chiite, où le nom de ‘Alī est explicitement mentionné. 62 La fabrication chiite de la sūra al-Wilāya est incontestable. Cependant, la sūra al-Nūrayn suggère une authenticité certaine, et elle mérite d’être mentionnée car elle fait l’objet d’un débat entre les chercheurs. 63

Conclusion

Les enjeux politiques de l’époque ont motivé la compilation du Qur’ān, et cette initiation est venue de ‘Umar Ibn al-Khaṭṭāb. Le travail a commencé pendant le califat d’Abū Bakr, mais il semble que la compilation n’ait pas été achevée à l’époque d’Abū Bakr. Par conséquent, ‘Umar a poursuivi la tāche de compilation et c’est pourquoi certaines sources affirment que ‘Umar a été le premier à compiler le Qur’ān. 64 Une source dit que ‘Umar a ordonné la collecte des passages du Qur’ān, mais qu’il a été tué alors que le travail était en cours, alors ‘Uthmān a travaillé pour terminer la tâche. 65

Dans tous ces récits, Zayd Ibn Thābit était toujours à la tête du comité de compilation, alors qu’il n’avait pas atteint l’âge de dix ans lorsque Muḥammad arriva à Médine. Cependant, Abū Bakr l’a choisi pour de nombreuses raisons, qu’il révèle dans un commentaire adressé à Zayd :

«Tu es un jeune vertueux ; [nous n’avons rien contre toi,] nous ne t’accusons pas. Tu avais l’habitude d’écrire la révélation».

Apparemment, le jeune âge de Zayd et son manque d’ambition personnelle ont supprimé toute animosité possible avec Abu Bakr et ‘Umar. De plus, Zayd écrivait le Qur’ān pour Muḥammad, et on dit qu’il a appris la langue juive.

Après des années de règne de ‘Uthmān, les musulmans commencèrent à se battre pour les lectures du Qur’ān : les Kūfīs et les Basran, les Irakiens et les Syriens. Il y avait également des conflits à l’intérieur de Médine. Par conséquent, ‘Uthmān décida de publier une copie officielle. Il choisit Zayd pour les mêmes raisons qui avaient conduit Abū Bakr à le choisir. De plus, Zayd avait développé une expérience significative dans la compilation et la rédaction du manuscrit. ‘Uthmān dut également s’efforcer d’éloigner certaines personnes, comme ‘Abd Allah Ibn Mas’ūd, du comité.

‘Uthmān entendait que son manuscrit unifie les lectures du Qur’ān et élimine la cause de la discorde entre les musulmans. Il a rassemblé les lectures en une seule version afin de pouvoir fournir une base de consensus. On dit que ce que ‘Uthmān a fait, c’est simplement «mettre les sūras en ordre».66 Il ne fait aucun doute que cette compilation a servi un agenda politique, mais elle a eu un coût historique. Les lectures de cette période ont été manquées, et par cette omission nous avons perdu une partie du patrimoine Qur’ānic, même si certaines de ces lectures sont éparpillées et préservées dans les commentaires et dans de rares ouvrages. Parmi ces ouvrages, les plus remarquables sont Kitāb al-Maṣāḥ if d’Ibn Abī Dāwūd al-Sijistānī (troisième siècle de l’hégire) et al-Muḥtasib d’Abū al-Fatḥ ‘Uthmān Ibn Jinnī (quatrième siècle de l’hégire).

Cependant, la tentative de ‘Uthmān de faire un seul texte unifié ne fut pas couronnée de succès, car ‘Uthmān lui-même conserva le codex de Ḥafṣa, ainsi que les codices personnels appartenant à la première génération de musulmans. De plus, les adeptes possédaient leurs propres codices particuliers. Au bout de quelques années, des conflits surgirent à nouveau à propos de la lecture, car la nouvelle version ‘Uthmānic ne comportait pas de points et nécessitait un lecteur ayant une connaissance préalable du matériel de lecture. (Voir le tableau «Illustration des lectures variantes», concernant l’effet des points sur une transcription).

Par conséquent, les versets étaient simplement interprétés selon la compréhension du lecteur la plupart du temps. Trois siècles s’écouleront après la compilation du codex ‘Uthmānic avant que la copie finale d’un Qur’ān pointé n’apparaisse au quatrième siècle de l’hégire (dixième siècle de notre ère). 67

À l’époque moderne, les musulmans ont toujours deux lectures distinctes. 68

  • Lecture de Ḥaf (m. 190 H / 805 J.-C.) selon ‘Āim (m. 127 H / 744 J.-C.), qui a été approuvée par al-Azhar dans son impression du Qur’ān en 1925 et diffusée dans la plus grande partie du monde islāmique.
  • Lecture de Warsh (d. 197 H / 812 J.-C.) selon Nāfi’ (d. 169 H / 785 J.-C.) utilisée en Afrique du Nord.

Aujourd’hui, le Qur’ān qui circule parmi les musulmans avec les deux lectures n’est rien d’autre que deux versions qui ont été révisées à plusieurs reprises au cours de trois siècles.

Heureusement, le manuscrit Ṣan‘ā’ (Sana) a été découvert en 1972, lors de la restauration d’une ancienne mosquée sur le point de tomber. Ce manuscrit contient des lectures inconnues. 69 C’est le plus ancien manuscrit Qur’ānic actuellement disponible. L’orientaliste allemand, G. Puin, a mené des recherches sur le manuscrit et a constaté que des modifications importantes avaient été apportées au Qur’ān. Ce que cette découverte nous dit, c’est que le Qur’ān actuel n’est pas le Qur’ān de Muḥammad. À la suite de ces graves découvertes, les autorités yéménites ont par conséquent interdit à Puin tout nouvel accès à ces manuscrits. 70

La question de l’histoire du texte Qur’ānic fait encore l’objet de recherches. L’hypothèse la plus controversée a été soulevée par le chercheur John Wansbrough, qui a annoncé que le Qur’ān a continué à être compilé pendant deux à trois siècles après la mort de Muḥammad. 71 Il a ajouté que la formulation finale du Qur’ān a émergé en dehors de la péninsule arabique dans les sociétés monothéistes, notamment en Irak et en Palestine. Cependant, un autre chercheur sur cette question a observé que la structure interne du Qur’ān ne soutient pas l’hypothèse de Wansbrough mais révèle au contraire qu’il a été compilé avant (41 H / 661 J.-C.). 72

La découverte de plus de manuscrits et de nouvelles méthodes de recherche plus avancées nous permettra d’identifier les couches ajoutées au Qur’ān au cours du processus de compilation, de rédaction et de révision répétée. Un jour, la science pourra peut-être accéder à la première édition du Qur’ān – la version originale qui a été déclarée par Muḥammad aux musulmans.

Résumé

  • Muḥammad laisse certaines parties du Qur’ān sur des supports d’écriture primitifs tandis que d’autres enregistrent ses paroles en mémoire.
  • Abū Bakr et ‘Umar prennent des mesures pour archiver le matériel Qur’ānic, craignant sa perte potentielle.
  • ‘Uthmān travaille à la révision du Qur’ān qui a été organisé par le premier comité de compilation, et, en attendant, tente de détruire les autres versions.
  • La question des variantes de lecture reste persistante en raison de l’absence de points et de marques diacritiques supplémentaires.
  • Les autorités politiques et religieuses révisent le Qur’ān à plusieurs reprises, jusqu’à ce que le Qur’ān avec les ponctuations diacritiques soit publié.

Notes

  1. al-Suyūṭī, al-Itqān 378.
  2. Ibid. 377.
  3. Jabal 162-163.
  4. al-Zamakhsharī 2: 372; al-Ṭabarī 9: 405-406.
  5. Ibn Sa‘d 2: 306-307.
  6. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 39.
  7. al-Sijistānī 11-12; al-Dānī 13.
  8. al-Sijistānī 13; al-Dānī 15.
  9. al-Sijistānī 12.
  10. al-Suyūṭī, al-Itqān 378.
  11. Stipčević 1: 219-220; compare with Déroche 173.
  12. al-Dānī 16; al-Zarkashī 1: 233; al-Suyūṭī, al-Itqān 379.
  13. al-Zarkashī 1: 233; al-Sijistānī 14, 15, 28; compare with al-Dānī 13-14.
  14. Jar Allah 26.
  15. Ibid. 27.
  16. al-Suyūṭī, al-Itqān 383.
  17. Ibid. 385.
  18. Jabal 187.
  19. al-Sijistānī 15.
  20. Ibn Sa‘d 2: 307.
  21. al-Suyūṭī, al-Itqān 389.
  22. al-Sijistānī 20.
  23. Ibid. 26-28.
  24. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 297.
  25. al-Sijistānī 18.
  26. Ibid. 29; al-Dānī 17.
  27. al-Sijistānī 32.
  28. al-arīrī 169.
  29. Jar Allah 28.
  30. al-Dānī 14.
  31. al-Sijistānī 33-34.
  32. Ibid. 17-18.
  33. al-Sijistānī 26; al-Dānī 16.
  34. al-Dānī 19.
  35. al-Sijistānī 16.
  36. Ibid. 32.
  37. Ibid. 28.
  38. al-Dānī 18.
  39. al-Sijistānī 30; compare with al-Suyūṭī, al-Itqān 391.
  40. al-Dānī 18; compare with al-Suyūṭī, al-Itqān 393.
  41. al-Sijistānī 24-25.
  42. Ibid. 21-22.
  43. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 280, 339.
  44. Encyclopedia of the Qur’ān 1: 348.
  45. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 253.
  46. al-Suyūṭī, al-Itqān 391
  47. Ibid. 392.
  48. al-Sijistānī 41.
  49. Ibid. 42.
  50. al-Qurṭubī 14: 90.
  51. Jeffery, Introduction 7-8.
  52. al-Sijistānī 59-130.
  53. al-Ḥarīrī 164-166; compare with Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 259-261, which has a list with less numbers; also compare with al-Sijistānī 92-98.
  54. al-Sijistānī 98-102.
  55. Jabal 176.
  56. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 266-267.
  57. al-Sijistānī 16.
  58. al-Bāqilānī 71.
  59. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 322-323.
  60. Ibid. 324.
  61. Ibid. 323.
  62. Leaman 31.
  63. Nöldeke, Tārīkh al-Qur’ān 229-231; compare with Sell 22-24.
  64. al-Sijistānī 16.
  65. Ibid. 17.
  66. al-Suyūt.ī, al-Itqān 378.
  67. Encyclopedia of the Qur’ān 1: 331-332.
  68. Ibid. 1: 334; compare with Jeffery, Introduction 8-9.
  69. Leaman 31.
  70. Lester.
  71. Encyclopedia of the Qur’ān 1: 334; Böwering 74.
  72. Donner 33.
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Le Qur’ān expliqué: Le Jibrīl de Muḥammad

Jibrīl, dans les récits islamiques, est le messager angélique qui a porté (transporté) les révélations à Muḥammad. Malgré le rôle vital de Jibrīl dans l’établissement de l’Islam en tant que religion, Muḥammad est resté silencieux à son sujet pendant des années. Jibrīl n’est pas du tout mentionné par Muḥammad dans la partie mecquoise du Qur’ân. Ce messager spirituel n’est identifié par Muḥammad que treize ans plus tard, après qu’environ quatre-vingt-six sūras de révélation aient déjà été donnés. Le nom de Jibrīl apparaît pour la première fois dans la sūra al-Baqara, où Muḥammad accuse les Juifs d’être des ennemis de Jibrīl (Gabriel) (Q 2.97-98).

Par la suite, Muḥammad ne mentionne le nom de Jibrīl qu’une seule fois, dans Q 66.4, pour avertir ses épouses insoumises qu’Allah et Jibrīl sont de son côté contre elles.

Il y a cependant des versets où des allusions à Jibrīl peuvent apparaître, notamment « Un puissant en puissance » (Q 53.5) et « l’Esprit fidèle » (Q 26.193).
Muḥammad a déclaré ses révélations pendant de nombreuses années avant de mentionner explicitement le nom de Jibrīl.

La transe

La littérature sirat (livres de biographie) rapporte que Muḥammad souffrait d’étranges épisodes de transe. Ces expériences inhabituelles ont été décrites par un témoin oculaire :

Je l’ai regardé, il avait un ronflement… comme le ronflement d’un jeune chameau.1

Ces transes ont conduit Muḥammad à se demander s’il n’avait pas un brin de folie.2 Ces symptômes l’ont accompagné même après qu’il se soit déclaré prophète. Il a continué à souffrir d’épisodes d’évanouissement, de transpiration abondante et de sons de voix dans sa tête. Ces symptômes ont alors été expliqués comme des manifestations liées à la descente de l’inspiration, au lieu d’éventuels symptômes de maladie.

Muḥammad a décrit son état lorsqu’il recevait une révélation:3

Parfois, cela vient comme le sonnement d’une cloche – ce qui est le plus dur pour moi – puis il se détache de moi. Je suis alors conscient de ce qu’il a dit. D’autres fois, l’ange m’apparaît comme un homme et me parle. Je prends alors conscience de ce qu’il disait. ‘Ā’isha » [Bint Abī Bakr, troisième épouse de Muḥammad]… a dit à ce sujet : Je l’ai vu pendant que la révélation venait sur lui, par un jour de froid glacial, puis quand elle se séparait de lui, sa tête [celle de Muḥammad] dégoulinait de sueur. »

Lorsque nous lisons l’histoire, nous constatons que ces symptômes sont similaires à la condition des devins arabes avant l’Islam:4.

Le prêtre pendant sa divination entre dans un état de transe, pendant lequel il serait en contact avec un monde difficile et ardu qu’aucun homme ne peut supporter. Pour que l’esprit se connecte à lui et soit relié au corps du devin, il s’agit d’une affaire grave pendant laquelle la sueur est abondante, ce qui se produit surtout lorsque l’orateur est le devin lui-même.

Notez que Muḥammad avait ouvertement déclaré qu’il avait l’habitude d’entendre un son semblable au sonnement d’une cloche. Il a également affirmé que :

« la cloche est la tuyauterie de Satan ».5

Néanmoins, la question qui ne semble pas avoir été posée est la suivante : si « la cloche est la tuyauterie de Satan », pourquoi Muḥammad entend-il son sonnement?

Quelle que soit la réponse, Muḥammad traite ces symptômes avec al-ruqya (« prières ou chants de désenvoûtement ») et il conseillera ensuite aux musulmans d’utiliser al-ruqya pour les sorts et les chants 6.


Muḥammad et la divination préislamique (Jdhilīya)

Lorsque les symptômes susmentionnés commencèrent à apparaître chez Muḥammad, une grande anxiété l’envahit et le contrôla. Lorsqu’il comparait ce qu’il vivait avec la condition des devins arabes, il pensait être devenu lui aussi un devin. Il dit à sa première épouse, KhadījaN,

Je crains d’être un devin7.

Dans la péninsule arabique, la divination était une pratique religieuse courante, de même que diverses autres pratiques magiques en usage à l’époque, comme l’al-ruqya et l’astrologie. Les hommes religieux appartenaient souvent au groupe des prêtres, connu sous le nom d’exécutant de la ruqya (al-rāqi) ou d’astrologue8.

Un tel devin pouvait entrer en contact avec des forces spirituelles cachées. Les personnes ayant des questions d’ordre spirituel les lui soumettaient à son domicile:9

Ceux qui le recherchaient [le devin] voyaient en lui un super pouvoir et une capacité à recevoir la révélation de cette puissance, qui était vue sous la forme d’une personne invisible qui donnait la révélation au devin. Ensuite, le devin parlait en fonction de ce qui était approprié à la situation et répondait aux questions qui lui étaient adressées.

Muḥammad a admis qu’il avait lui aussi expérimenté ce processus de divination :

D’autres fois, l’ange m’apparaît comme un homme et me parle. Je prends alors conscience de ce qu’il dit10.

Des actes de divination similaires de la part de Muḥammad sont présentés dans le Qur’ān, où il répond aux questions par l’expression « Ils t’interrogent », comme dans ces versets :

Ils t’interrogeront sur l’esprit… (Q 17.85) ; « Ils t’interrogeront sur les montagnes…» (Q 20.105) ; et « Ils t’interrogeront sur l’Heure… » (Q 79.42).

De plus, les « prêtres avaient un style particulier dans leur discours lors de la prophétie et de la divination connu sous le nom de al-saj’ [prose rimée] ; c’est pourquoi il était connu sous le nom de al-saj’ des devins. Leur saj’ se caractérisait par l’utilisation de mots ambigus et d’expressions générales qui pouvaient être interprétés de diverses manières opposées. 11

Le saj’ et les expressions courtes sont caractéristiques des versets du Qur’ānic qui appartiennent à la période du premier appel (à l’Islām). On peut en voir un exemple dans la prose rimée en arabe de Q 102.1-8 :

La dispute sur les nombres vous illusionne
jusqu’à ce que vous visitiez les tombes !
Pas du tout ! A la fin, vous saurez !
Et encore une fois, non ! A la fin vous saurez !
Pas ainsi ! Si vous ne saviez pas avec certitude !
Vous verrez sûrement l’enfer !
Et encore une fois, vous le verrez sûrement avec un œil de certitude.
Alors on vous interrogera sûrement sur le plaisir !

Pour cette raison, les contemporains de Muḥammad le décrivirent comme quelqu’un qui avait rejoint les devins, une accusation qu’il nia avec véhémence. Il annonça aux Quraysh, qu’il n’était « ni devin ni fou ! » (Q 52.29).

Cette réaction est significative, car le devin était considéré comme celui qui serait inspiré par la révélation par le « satan du devin ». Les Arabes croyaient que ce satan écouterait

le ciel et apporterait ce qu’il a entendu et le réciterait. Puis le devin récitait au peuple ce que son satan lui avait récité 12.

Sur la base de cet imaginaire, Muḥammad croyait que chaque homme avait son compagnon satan. Il déclara :

Chacun d’entre vous, sans exception, a reçu un compagnon du djinn. Les musulmans lui demandèrent : « Même toi ? » Il répondit : « Même moi, sauf qu’Allah m’a aidé contre lui ». Ainsi, il devint musulman et ne me commandait que du bien.13

Il dit aussi à ‘Ā’isha :

Oui ! Mais mon Seigneur m’a aidé contre lui jusqu’à ce qu’il devienne musulman. 14.

Le verdict de Khadīja

Au milieu de ces hallucinations et de ces voix, alors que certains soupçonnaient que la folie aurait pu s’emparer de Muḥammad ou qu’il serait devenu un devin, Khadīja s’avança pour délivrer Muḥammad de sa condition et de sa souffrance :15.

Khadīja… dit à l’envoyé d’Allah : « Cousin [mari], peux-tu me parler de ton compagnon qui t’apparaît quand il vient ? ». Il répondit : « Oui ! » Elle dit : « Alors, quand il t’apparaîtra, parle-moi de lui. » Jibrīl… vint à lui comme il avait l’habitude de le faire. L’envoyé d’Allah… dit à Khadīja : « Khadīja ! Jibrīl est venu me voir. » Elle répondit : « Lève-toi, cousin [mari], et assieds-toi sur ma cuisse gauche…. ». Le messager d’Allah… se leva et s’assit sur elle. Elle dit : « Le vois-tu ? » Il a dit : « Oui ! » Elle a dit : « Bouge et assieds-toi sur ma cuisse droite. » Elle a rapporté que le messager d’Allah… s’est déplacé et s’est assis sur sa cuisse droite. Elle a demandé : « Le vois-tu ? » Il répondit : « Oui ! » Elle a dit : « Bouge et assieds-toi sur mes genoux. » Elle a rapporté que le messager d’Allah… a bougé et s’est assis sur ses genoux. Elle a dit : « Tu le vois ? » Il a dit : « Oui ! » Elle a rapporté qu’elle s’est sentie bouleversée et a jeté son voile alors que le messager d’Allah…était sur ses genoux. Puis elle lui dit : « Le vois-tu ? » Il répondit : « Non ! ». Elle lui dit : « Ô cousin [mari], sois ferme et de bonne humeur, car par Allah il est bien un ange et non un satan ».

[Une autre histoire légèrement différente ajoute que Khadīja] plaça le messager d’Allah […] entre elle et son sous-vêtement [dir’ihā]. À ce moment-là, Jibrīl est parti. Elle dit alors à l’envoyé d’Allah… « C’est un ange, pas un satan ».

Nous remarquons les points troublants suivants dans cette histoire :

1 – Khadija a dit à Muḥammad : « C’est un ange, pas un satan « , ce qui indique que Muḥammad croyait que c’était un satan qui lui apparaissait (et non Jibril) comme le mentionne le texte de l’histoire. Car si Muḥammad avait pensé que Jibril était celui qui lui apparaissait, sa femme aurait probablement dit : « Tu as raison ! C’est Jibril. » Au lieu de cela, elle a rejeté la description de l’être comme un satan sans mentionner Jibril, ce qui signifie que le nom de Jibrīl a pu être inséré plus tard dans le récit original.

2 – Même si Khadija n’était pas en mesure de voir cet être, elle a tout de même décidé de sa nature malgré le fait que Muḥammad, qui pouvait voir l’être, n’a pas été en mesure de l’identifier. (Muḥammad n’a identifié cet être comme étant Jibril que dans des révélations ultérieures).

3 – Cette histoire présente une autre question qui laisse perplexe : Pourquoi l’ange a-t-il ignoré le fait que Muḥammad était assis sur la cuisse de Khadija (une position suggestive et provocante), alors qu’il est parti plus tard lorsqu’elle a dévoilé son visage (une action moins érotique) ?

4 – Khadija a mené son expérience jusqu’à un extrême explicite. Elle fit asseoir Muḥammad une fois sur sa cuisse gauche, puis une autre fois sur sa cuisse droite, et enfin sur ses genoux. Enfin, selon la deuxième histoire, elle a glissé Muḥammad sous ses sous-vêtements, « a glissé le messager d’Allah […] entre elle et ses vêtements [dir’ihā] « , pour juger si l’être resterait pour regarder ces scènes explicites. Si cet être continuait à regarder, alors cet être serait un satan. Ce qui est clair, c’est que Khadija prodiguait compassion et bonté à Muḥammad pour calmer ses craintes, elle n’aurait donc aucun mal à le convaincre que ce qu’il a vu était un ange et non un satan.

Conclusion

Pendant de longues années, Muḥammad souffert de différents symptômes de transe. À l’occasion, il soupçonnait qu’il était devenu fou, comme il le dit à Khadija :

J’entends une voix et je vois une lumière. Je crains d’avoir la folie en moi16.


À d’autres moments, Muḥammad croyait être devenu un devin comme ces devins qui …

… voient leur compagnon, qui peut leur apparaître sous une forme humaine.17

Mais Khadija l’a délivré de cette condition parce qu’elle avait une vision aiguë de la psyché de Muḥammad. Elle a ensuite fait des expériences pour découvrir l’identité de ce qui est apparu à son mari et pour témoigner ensuite qu’il s’agissait d’un ange et non d’un satan. Sa déclaration signifie que Muḥammad a découvert la nature de ce qu’il voyait par l’intermédiaire d’une femme, « qui manque de raison et de religion », selon la vision des femmes dans l’islam. Sur la base de son témoignage, Muḥammad a établi la preuve que ce qui est venu à lui était un ange. Les musulmans s’appuient donc à leur tour sur le seul témoignage d’une femme. (Voir l’article « Les femmes dans le Qur’ān » ).
Le témoignage de Khadīja ne guérit pas Muḥammad de ce phénomène, qui le tourmenta tout au long de sa vie d’adulte. Il continua à entendre les voix et à voir les ombres.

Ces symptômes ressemblent à ceux d’une affection connue sous le nom d’aura auditive. Il s’agit d’hallucinations auditives qui peuvent être accompagnées d’autres hallucinations sensorielles et qui peuvent survenir pendant une crise d’épilepsie. Si Muḥammad ne souffrait pas d’aura auditive, il semble certain qu’il avait un problème moins grave connu sous le nom d’akoasme, qui est une hallucination auditive dont les symptômes comprennent l’audition de sonneries, de coups, de bruits de pas et autres. À cause de ces sons, Muḥammad continuait à croire qu’il avait un compagnon satan, comme il l’a dit à ‘Ā’isha.

Après que Khadīja eut convaincu Muḥammad que ce qui lui apparaît est le livreur de la révélation, Muḥammad se réfère à cet être comme au « Saint-Esprit » (Q 16.102), et l’appelle « un noble apôtre » (Q 81.19). Il ne mentionne pas le nom de Jibrīl comme celui qui délivre la révélation avant de s’installer à Médine.

Cette déclaration finale concernant Jibrīl doit résulter du contact de Muḥammad avec les Juifs. Le nom גַּבְרִיאֵל (Jibrīl/Gabriel) est un nom hébreu mentionné dans un livre de l’Ancien Testament (Dan. 8.16, 9.21). Muḥammad a-t-il appris le nom de Jibrīl des Juifs, ou l’a-t-il appris juste avant ce contact ?

Nous ne disposons d’aucun texte écrit permettant de préciser la période à laquelle Muḥammad a directement introduit le nom de Jibrīl. Si Muḥammad a acquis ce nom auprès des Juifs, cela explique pourquoi ce nom n’est apparu qu’à Médine. Cependant, si nous devons accepter la probabilité offerte par Arthur Jeffery, érudit et historien réputé des langues sémitiques, sa source provenait de la forme syriaque du nom.18

Il est possible que Muḥammad ait pu entendre ce nom à la Mecque, mais à Médine, il vit la nécessité de mettre à jour tous les textes coraniques pour montrer que Jibrīl avait délivré toutes les révélations que Muḥammad avait reçues.
Par conséquent, Jibrīl, dans sa vraie nature, était ces voix et ces images qui parvenaient à Muḥammad. Ces manifestations furent transformées par le pouvoir suggestif de Khadīja en un ange qui aurait pu devenir plus tard Gabriel par l’influence de connaissances juives ou chrétiennes.

Note :

En raison d’une apparente mauvaise interprétation du récit de l’Annonciation dans le Nouveau Testament (Luc 1.19-31), Muḥammad créa une confusion entre l’esprit et Jibrīl et fusionna les deux en un seul être. Il dit de Marie : « …nous lui avons envoyé notre esprit » (Q 19.17) ainsi que « un messager » du Seigneur (Q 19.19).19 Par conséquent, Muḥammad a fait de l’esprit d’Allah et du messager d’Allah, un seul et même être.

Cette question de Jibrīl à la fois esprit et messager semble aller à l’encontre d’autres versets du Qur’ān qui mentionnent « les anges et l’esprit » (Q 70.4 ; Q 97.4), distinguant les anges et l’esprit sans prêter attention au fait que Jibrīl est un ange. Qui est l’esprit dans ces versets ? En réponse, les exégètes disent que Jibrīl est l’esprit20. Mais si Jibrīl est un des anges, alors pourquoi faire cette distinction ? (Voir le commentaire sur Q 2.97.)


Notes


  1. al-Bukhārī 1: 542.
  2. Ibn Sa‘d 1: 165.
  3. al-Bukhārī 1: 13-14; ce récit est également repris dans 2: 425.
  4. ‘Alī 6: 761.
  5. Muslim 3: 415.
  6. al-Bukhārī 4: 43-46.
  7. Ibn Sa‘d 1: 165.
  8. ‘Alī 6: 755.
  9. Ibid. 6: 757.
  10. al-Bukhārī 2: 425.
  11. ‘Alī 6: 759.
  12. Ibid. 6: 758.
  13. Muslim 4: 311.
  14. Ibid. 4: 312.
  15. al-Suhaīlī 1: 408-409.
  16. Ibn Sa‘d 1: 165.
  17. ‘Alī 6: 760.
  18. Jeffery, Foreign Vocabulary of the Qur’ān 100-101.
  19. Houtsma et al. 1: 2652.
  20. al-Ṭabarī 23: 251, 24: 547.

TheQ Dilemma English Book

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Tous droits réservés. Utilisé et traduit en français avec la permission du groupe TheQuran.com.

Archive web: L’affaire Brian McLaren

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par nicolas

 L’Alliance Evangélique et la Ligue pour la Lecture de la Bible ouvrent-elles la porte au Nouvel Age dans l’Eglise? Un examen des connexions de Brian McLaren          
Dossier spécial Vigi-Sectes

L’Alliance Evangélique Française (AEF) et la Ligue pour la Lecture de la Bible (LLB) ont invité courant janvier à Paris Brian McLaren, controversé aux Etats-Unis, et auteur de « Réinventer l’Eglise », qui sort en même temps aux éditions de la Ligue. Séduit par certains aspects de son messages, les responsables de ces 2 oeuvres n’ont pas vu le pire: cet homme n’est pas seulement un libéral, il introduit subtilement la pensée du « Nouvel Age » dans l’Eglise. Et personne n’avait rien vu. En réponse à nos remarques par e-mail, les responsables de la LLB et de l’AEF ont réclamé que soit uniquement « jugé » le livre qu’ils ont édité. J’ai trouvé personnellement cette position un peu légère, et je n’ai pas souhaité la considérer, mais aborder l’ensemble des éléments gênants dans cette affaire. Je laisse chacun juge, m’engage à publier toute déclaration de l’AEF ou la LLB et donne rendez-vous à tous ceux qui veulent débattre de ce sujet ou témoigner sur cette page web.

Des points en apparence positifs

Ses ouvrages comportent cependant des points positifs, qui mettent l’accent sur des défis que doit relever le Corps de Christ. James Sherk, un évangélique américain dont nous avons traduit ici l’article publié sur le site de l’Evangelical Society, a examiné le livre intitulé « The Church on the other Side » (« L’Eglise de l’autre côté », paru en 2000) et y a relevé quelques points intéressants. Le post-modernisme, dont nous allons parler plus bas, a raison de dire qu’une église doit s’adapter lorsqu’elle grandit afin de mieux répondre aux attentes de ses membres. Il a également raison de dire que l’Eglise peut et doit mieux faire pour plus d’équité dans le domaine social. Enfin, McLaren a émis plusieurs bonnes idées en matière de missiologie moderne, notamment en ce que l’Eglise doit faire un effort pour mieux présenter l’Evangile. « L’inculturation » a aussi son revers.

L’inculturation, un procédé « jésuite »

McLaren se plaint d’avoir été mal compris par des commentateurs peu scrupuleux qui auraient sorti un de ses textes de leur contexte, ce qui lui aurait valu d’être rayé de la liste des participants à une conférence baptiste sur les missions l’an dernier. Sur son blog, McLaren explique ce qu’il a réellement voulu dire et se retranche derrière un article de synthèse (guère convaincant) de l’Associated Baptist Press: dans certains pays, se réclamer publiquement du christianisme équivaut à être assimilé à l’Amérique guerrière, à des moeurs dépravées, au sectarisme religieux, etc. Il conseille donc à ces convertis, pour ne pas offenser la communauté dans laquelle ils vivent, de continuer leur vie comme avant. Cette nouvelle façon d’envisager la missiologie, se défend McLaren, n’est pas nouvelle. En effet, l’organisme Jeunesse en Mission par exemple, s’appuyant sur les cours du télévangéliste Benny Hinn, recommande par exemple aux musulmans ou aux hindous convertis à Christ de continuer d’aller à la mosquée ou au temple, et de s’adresser au Seigneur dans leur coeur. L’inculturation n’est pas l’acculturation, rappelait Jean-Paul II. Et McLaren, par sa promotion des pratiques anciennes de méditation et de prière fait écho à un enseignement développé depuis près d’un siècle par les jésuites, dont il recommande les « exercices spirituels ». Les exemples historiques abondent qui ont contribué à fortement pervertir le message chrétien (parlons seulement de Noël, fête « chrétienne » du solstice ou des esprits protecteurs transformés en « saints patrons »).

Un auteur influent dans le courant « postmoderne »

Cité par le Times comme l’un des 25 évangéliques les plus influents, McLaren est un des penseurs de l’Eglise émergente dont la philosophie peut se résumer en un mot: le postmodernisme. Il définit lui-même sa vision du monde: Nous sommes entrés dans une société post-moderne qui met l’accent sur l’expérience personnelle. L’individu étant incapable de connaître la Vérité, l’absolue référence de la Parole révélée par Dieu n’existe plus.

Un auteur clairement libéral

McLaren ne se cache pas d’être un libéral – mot qui chez nous désigne une personne qui ne croit pas en l’autorité de l’Ecriture. Aux USA, un libéral est certes un protestant très tolérant sur les questions d’avortement et d’homosexualité, mais c’est aussi une personne politiquement « de gauche ». Le 15 décembre 2005, McLaren était arrêté avec d’autres manifestants sur les marches du Capitole où ils entendaient rappeler le gouvernement à ses devoirs sociaux. Il était aux côté de Jim Wallis, activiste du mouvement interfoi Faithful america dont le dernier ouvrage trône en bonne place sur sa table de chevet. Le seul mouvement évangélique que McLaren agrée est le mouvement Anabaptiste, pour son pacifisme. Prônant le pacifisme également, les Quakers, chez qui étudie également le responsable du mouvement dit émergent en Grande-Bretagne. A noter que ce pasteur est membre du mouvement Vineyard, fondé également par un Quaker: John Wimber. Le fils de Martin Luther King reprend également le flambeau de la contestation pacifiste. Il apparaît dans le même réseau et notamment dans l’église syncrétiste du prêtre dont McLaren recommande l’ouvrage, le jour des commémorations pacifistes du 11 septembre.

McLaren et l’enfer

Brian McLaren semble très gêné par la question de l’enfer. Répondant sur le site syncrétiste Beliefnet à la question:  « Qu’est-ce qui vous a fait écarter la question de l’enfer dans le dernier ouvrage de votre trilogie? », McLaren répond:

« Pour beaucoup de chrétiens, leur foi concerne surtout ce qu’il advient des personnes après leur mort. Cela les distrait de rechercher la justice et une vie pleine de compassion tant qu’ils sont encore sur cette terre. Nous devrions faire demi-tour et jeter de nouveau un oeil aux enseignements de Jésus sur l’enfer. Pour beaucoup de personnes, la doctrine conventionnelle sur l’enfer fait de Dieu quelqu’un de méchant. Ce n’est pas quelque chose que nous devrions laisser perdurer. »

S’il prétend ne pas vouloir choquer les âmes pour les conduire à Dieu, il oublie que la Bible est excessivement claire au sujet du sort de ceux qui meurent sans le Seigneur. Il faut chercher dans le livre d’Alan Jones, un auteur clairement New Age qu’il recommande (voir ci-dessous), à la page 132 de « Reimagining Christianity » pour trouver des déclarations similaires et troublantes: « Il faut retirer la croix du centre du christiannisme. La fixation de l’Eglise pour la mort de Jésus en tant qu’acte universel de salut doit s’achever, et la place de la croix doit être réimaginée dans la foi chrétienne. Pourquoi? A cause du culte de la souffrance et du Dieu vengeur. »

McLaren et la croix

Il est frappant en visitant son site web et ses écrits de constater qu’il ne cite pas la Bible, qu’il ne parle jamais du Saint-Esprit ni de nouvelle naissance. Quand l’agence Baptist Press lui a demandé si une personne devait placer sa confiance dans la mort expiatoire du Christ pour ses péchés, McLaren a répondu:

« Je veux aider les gens à comprendre tout ce qu’ils peuvent à propos de la croix. Je ne dirais pas que cette compréhension (Jésus mourant en sacrifice expiatoire pour toute l’humanité) soit tout ce qui est nécessaire pour être chrétien. Je crois que certaines personnes pourraient être intéressées par cette compréhension mais pas intéressées à suivre Jésus. Ils veulent que le sang de Jésus paie pour leurs péchés afin qu’ils aillent au ciel, mais ils ne sont pas réellement intéressés à suivre Jésus dans leur vie. »

McLaren renvoit dos-à-dos exclusivisme, universalisme et inclusivisme, relativisant ainsi l’orthodoxie évangélique.

McLaren et l’homosexualité
Brian McLaren refuse de donner son opinion au sujet de l’homosexualité, affirmant que cette questions est devenue trop politique.

« J’ai mes propres opinions, mais je ne crois pas que la chose la plus intelligente à faire pour moi soit d’aller partout et faire de ces opinions divergentes une raison de me séparer des autres chrétiens »,

a-t-il déclaré déclaré à Baptist Press.

« Je suis en communion avec des chrétiens qui ont des opinions différentes sur cette question (de l’homosexualité) ».

S’exprimant à propos du dernier livre de McLaren: A generous orthodoxy (« Une orthodoxie généreuse »), le président du Séminaire des Baptistes du Sud aux Etats-Unis, Al Mohler s’inquiète :

« Quand on en vient à des sujets comme l’exclusivité de l’Evangile, l’identité de Jésus-Christ à la fois pleinement Dieu et pleinement homme, à l’autorité des Ecritures comme révélation écrite, ou aux enseignements clairs de la Bible en matière d’homosexualité, ce mouvement refuse tout simplement de répondre aux questions. L’orthodoxie doit être généreuse, mais pas au point de cesser d’être orthodoxe. »

Un témoignage publié sur le site de celui dont il a recommandé l’ouvrage montre clairement la conviction de la mouvance: un homosexuel ne doit pas chercher à être « guéri » mais s’accepter tel qu’il est. Cela est également confirmé par plusieurs articles qui assurent la promotion de la position épiscopalienne (accueillir et aimer tels qu’ils sont les homosexuels) sur le site Explore Faith, dont McLaren recommande la lecture pour son contenu spirituel. Un autre signe convergent: en recherchant sur Google les mots clefs de la spiritualité émergente, on tombe sur une série de sites religieux, libéraux ou New Age, dont l’Eglise Unie du Canada qui avait reconnu en 2000 qu’on pouvait être chrétien et homosexuel. Il n’y a donc pas l’ombre d’un doute: Brian McLaren, au nom de l’accueil et de l’amour, est un libéral pro-homosexuel.

Un auteur faisant la promotion du Nouvel Age

Il a donc recommandé l’ouvrage d’Alan Jones « Réimaginer le christianisme » (Reimagining Christianity) dont la couverture (une croix et un Bouddha ornant un tableau de bord de voiture) met déjà la puce à l’oreille. La table des matières et le préambule d’introduction ne laissent planer aucun doute: nous devons entrer dans une ère de tolérance et dénoncer les chrétiens « littéralistes », cesser de diaboliser notre frère hindou, musulman ou bouddhiste et découvrir la véritable spiritualité, celle qui cherche à comprendre l’autre. « Cette oeuvre m’a stimulé et profondément encouragé », affirme McLaren au dos du livre. Si vous êtes de passage à San Francisco, Alan Jones, doyen de la Grace Cathedral, vous invite à venir cheminer dans l’un des 2 labyrinthes spirituels de son église. Cette nouvelle forme de « méditation en marchant » s’appuie sur ce qu’enseignent les anciennes traditions religieuses un peu partout dans le monde. Vous ressortirez transformés après avoir médité dans ce mandala, pratiqué le yoga et les autres activités de l’église, ainsi qu’en témoignent de nombreux témoignages. Vous apprécierez particulièrement celui d’une dame qui accompagne les mourants pour transformer ce moment dramatique en une cérémonie sacrée. Alan Jones est définitivement un des maîtres spirituels du Nouvel Age, comme l’indique ce séminaire où il a enseigné à leur côté.

Encore des connexions New Age

Il a co-écrit un ouvrage avec Tony Campolo, lequel voit dans le mouvement émergent une réponse adaptée au besoin de renouvellement spirituel de notre époque postmoderne. Campolo a été dénoncé par certains comme un « change agent », personne chargée de « noyauter du dedans les mouvements religieux en y insufflant l’esprit du Nouvel Age, c’est à dire un nouveau mode de pensée, une nouvelle mentalitée imbibée de néo-platonisme, de philosophie Hindoue et de mysticisme oriental », comme disait Alain Choiquier dans son ouvrage Scanner sur le Nouvel Age. McLaren promeut des techniques anciennes de prière et de méditation qui viennent des plus anciennes traditions et pourraient tout aussi bien être du bouddhisme zen ou du tantrisme. Alan Jones et Rick Warren qui, dans son livre « Purpose driven life » au chapitre 10 parle de prières courtes respirées – « Merci Seigneur » – qui nous accompagnent le jour durant et deviennent des mantras chrétiens, sont apparus au côté de maître bouddhistes dans des séminaires. Les techniques et le vocabulaire de McLaren, Jones ou Warren sont les mêmes que celles du livre « The Art of Meditation » d’un gourous New Age proche du Dalaï Lama, Daniel Goleman. Il est intéressant de noter les connexion entre ce « mouvement des labyrinthes » et les mystiques celtes, indiennes hoppi, etc., comme le montre l’abondante littérature du genre. En lien avec la question de la tolérance pour les homosexuels, l’adjointe d’Alan Jones propose aux femmes – et aux hommes – de se reconnecter avec la Mère Divine. Ceci n’est pas sans rappeler le mouvement féministe évangélique qui voudrait réécrire le Nouveau Testament et rendre à Dieu la nature féminine inclusive et égalitaire de Son amour.

Le mouvement émergent

Pour être membre de « l’ordre » émergent (qui se veut un monachisme moderne), il faut s’engager à respecter la Création, servir son prochain, se déclarer membre du réseau émergent en public, assister à un pélerinage émergent chaque année, étudier les disciplines chrétiennes classiques telles qu’enseignées par les traditions. Le nom même du mouvement « émergent », est une image de son origine humaine, de sa poussée « hors de terre ». Dans son article sur McLaren dans la revue Témoins, Jean Hassendorfer résume bien l’esprit de la mouvance en concluant par une citation d’un des pères du syncrétisme évolutionniste moderne, Teilhard de Chardin: « Tout ce qui monte converge ». Cette « Babel » religieuse qui sort de terre en voulant se dépouiller des scories de 20 siècles d’obscurantisme littéraliste fait feu de tout bois. Le mouvement veut se concilier les évangéliques épris de Bible mais souffrant du manque de cohérence dans la façon dont les églises vivent son message, et les chrétiens plus traditionnels. Dans son ouvrage « Une orthodoxie généreuse », il dit apprécier la liturgie, vénérer (mais pas adorer) Marie, etc. Comme l’a fort bien montré un ancien dominicain, l’église émergente fait très clairement la promotion du mysticisme oriental et du catholicisme.

Conclusion

A un moment où le mouvement évangélique en francophonie connait une mutation profonde, avec le départ de frères aînés dans la foi, l’entrée massive de jeunes convertis d’horizons divers ayant une culture biblique assez sommaire et une très criante simplification du message, ouvrir sans discernement la porte au message de l’Eglise Emergente est une très lourde responsabilité. La Ligue pour la Lecture de la Bible et l’Alliance Evangélique se sont, en toute bonne foi il ne faut pas en douter, avancés sur un terrain glissant via la création d’une commission « Evangile et Culture ». Cette commission est dirigée par le représentant officiel en France du mouvement émergent, un missionnaire salarié d’International Teams (ITeams), dont le président durant 10 ans fut McLaren lui-même. (Note: Le blog du missionnaire en question, Matthew Glock, semble avoir disparu. On pouvait y lire qu’il était soutenu par ITeams, mais on en retrouve trace ici). Au vu des éléments ci-dessus et d’autres éléments apportés par d’autres évangéliques (comme Pierre Oddon, Christian PietteDavid Cloudun pasteur lyonnais anonymeRichard Bennett, etc.) Il conviendrait maintenant qu’une commission d’experts approfondisse la question et trace des lignes claires.

Nous savons que de telles commissions se noient sous des montagnes de papier pour accoucher au final de souris, aussi je demande personnellement qu’une véritable discipline biblique et évangélique soit appliquée dans cette affaire, le livre retiré de la vente ou en tous cas assorti d’un feuillet de mise au point, et la direction de la Commission Evangile et Culture de l’Alliance Evangélique remise à une personnalité véritablement évangélique, et non à la tête de pont d’un mouvement douteux.Je le dis à tous: une génération abreuvée par ces « non-doctrines » va se lever pour nous faire presque honte de nos pratiques ecclésiales jugées « peu adéquates » à notre société en évolution. Affirmons avec la Bible qu’une véritable conversion s’accompagne d’un amour pour tous les frères, quelles que soient leurs pratiques, et que cèder au « jeunisme » ambiant n’est rien d’autre qu’une solution de facilité. C’est pour cela que fut, il y a 160 ans, créée l’Alliance Evangélique et nous souhaitons que, loin d’être la gardienne du musée poussiéreux d’une église vieillissante, elle continue à élever bien haute la bannière de la foi « transmise aux saints une fois pour toutes ».

Je vous suggère enfin à lire ce que moi, Nicolas Ciarapica, j’ai personnellement reçu dans la prière à ce sujet. Il s’agit juste d’une « révélation » personnelle, et elle n’a pas le poids des arguments ci-dessus.

Archive web: Débat LLB – AEF sur le livre Archive web: « Réinventer l’Eglise » de Brian McLaren

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19/09/2006, Valence – église libre

COMPTE RENDU établi à titre personnel par Pascal-Eric Chomel, le 8 novembre 2006 (dans le texte, ce qui figure en italique précédé de NDR = Note Du Rédacteur, est un commentaire personnel du rédacteur du compte rendu)

‘Présents :

  • P.Berthoud (LLB)
  • M.Deroeux (LLB)
  • S.Lauzet (AEF)

Orateurs :

  • A.Nisus Professeur à la Faculté Libre de Théologie Evangélique (Vaux sur Seine)
  • L.Jaeger Directrice des études à l’Institut Biblique de Nogent
  • D.Brown Pasteur de France-Mission, spécialisé dans les implantations d’églises
  • D.Cobb Professeur à la Faculté Libre de Théologie réformée (Aix en Provence)

Débat conduit par A.Courtial, ancien pasteur de l’église libre de Valence, accueillant le débat dans ses locaux. Une quarantaine de personnes environ étaient présentes.

Durée :
10h15 – 12h15 13h45 – 17h

Interventions magistrales des orateurs : environ 60 % du temps global
Le reste en échanges entre la salle et les orateurs, sans que la LLB ou l’AEF s’impliquent. On peut évaluer entre 10 et 20% le temps qui a pu être utilisé par l’ensemble des personnes dans la salle pour poser leurs questions ou donner leur avis.

Points positifs :
– Manifestement il n’y a pas eu de pression sur les orateurs qui ont pu exprimer librement leur pensée sur le livre « Réinventer l’Eglise » – les orateurs ont eu toute liberté de parole et ont pu critiquer librement B.McLaren et le livre, au point que le pasteur actuel de l’église libre de Valence (Jean-Pierre Civelli) a regretté qu’il n’y ait pas eu d’orateur pour « soutenir B.McLaren » !

Points négatifs :
– la forme du débat (se déplacer au micro) – La LLB et l’AEF ne se sont pas impliquées dans le débat – la demande faite aux orateurs de se cantonner exclusivement au livre RE, alors qu’il eut fallu considérer l’ensemble de l’œuvre de l’auteur, puisqu’il s’agit du premier livre d’une série de 10 – la polémique étant née suite à l’invitation faite à l’auteur de s’exprimer en France début 2006, il ne suffisait pas d’en rester à son livre datant de 2000 – plusieurs personnes assistant au débat se sont exprimées en faisant valoir que la doctrine les intéressait peu, et qu’il fallait même « adapter notre théologie évangélique » au monde d’aujourd’hui; ces interventions se sont cantonnées à exprimer une appréciation positive de B.McLaren en ce sens qu’il pose de bonnes questions. Peu de personnes ont considéré les réponses qu’il apporte (hormis les orateurs à la tribune et 2 intervenants dans la salle) – non prise en compte dans le thème officiel du débat (la croissance de l’Eglise) de la question de fond soulevée par Vigi-Sectes : «En « Réinventant l’Eglise » Brian McLaren reste-il sur le terrain fondamental de la révélation divine? » (voir http://www.vigi-sectes.org/mclaren et http://tinyurl.com/qc8st )

Intervention d’A.Nisus :

Développement en 3 parties : méthodes, auteur, style/fond

1) Méthodes :

AN estime que BML n’est pas un intellectuel rigoureux. C’est un praticien, sans trop de rigueur, de nombreuses faiblesses pouvant être relevées quant à sa clarté intellectuelle. BML utilise de manière non critique des termes philosophiques, présente une argumentation parfois bâclée, et donne des références historiques peu rigoureuses. BML lui-même reconnaît utiliser un effet rhétorique, mais on se demande parfois si ses affirmations sont seulement hyperboliques ou s’il pense vraiment ce qu’il écrit. AN indique avoir également lu le livre plus récent de BML intitulé « Generous orthodoxy » (GO), et que s’il avait eu à donner la critique de ce dernier livre il aurait été beaucoup plus sévère vis-à-vis de BML. Selon AN, BML reconnaît dans GO que son livre est tissé d’exagération, provocateur, obscur, « l’obscurité stimulant davantage la réflexion que la clarté » ! Lorsque BML indique dans « Réinventer l’Eglise » (RE) que « notre théologie ne fonctionne plus », on peut légitimement se demander si BML parle de la manière, du « comment » ou bien du contenu de la théologie évangélique ! BML a une tendance à l’autodérision, plus marquée encore dans GO, qui invite à ne pas être dur envers lui. AN pose la question : ne faudrait-il pas lire RE à la lumière des autres livres plus récents de BML ?

2) Auteur :

Concernant la biographie de BML, AN relève qu’il est globalement en réaction contre les fondamentalistes, et qu’il le reconnaît d’ailleurs ouvertement, surtout dans GO (p.40 de ce livre, BML indique qu’il est plus dur envers les fondamentalistes qu’envers quiconque).

3) Style / fond

Quant au fond du livre RE, AN l’a trouvé très stimulant et très agaçant. Très stimulant parce que posant de nombreuses questions intéressantes, parce qu’optimiste, encourageant le croyant à ne pas avoir peur du monde, parce qu’il montre un souci constant d’atteindre nos contemporains et dans ce but il se propose de développer une église pertinente.

Mais très agaçant parce que trop marqué par une faiblesse argumentative et un manque de rigueur évidents. La thèse du livre se résume à ceci : le monde change (p.16,17…) et donc il faut redéfinir l’église du futur qui doit elle aussi changer (p.24). Mais pourquoi BML ne discute-t-il pas de l’ « ecclesia semper reformenta », église qui est réformée par la Parole de Dieu et non par l’influence du monde qui change ! Le grand ennemi de BML est le statu quo. Il veut tout réinventer, mais est-ce un effet rhétorique ou le pense-t-il ? cela ressemble plus à un slogan publicitaire qu’à une réflexion approfondie. Selon BML, « le changement est un principe de vie immuable » (notez l’oxymore, entre changement et immuable, termes opposés). BML se réfère à F.Schaeffer, mais il s’approprie de manière non critique cette notion de changement en oubliant que la vie c’est aussi la stabilité. Les forces conservatrices sont aussi forces de vie. La vie est faite de continuité et de discontinuité.

AN réfute la notion de postmodernité qui est pourtant au centre du livre. Bien des penseurs français reviennent sur cette notion et estiment que l’on est plutôt en ultramodernité ou en hypermodernité, c’est-à-dire dans une certaine forme de la modernité, mais pas en postmodernité.

AN estime que BML a une approche trop naïve de ce qu’il appelle la postmodernité, en assimilant la vérité à l’honnêteté, l’authenticité, la transparence (p.146). BML ne critique pas ces notions qu’il attribue aux postmodernes, et on peut même penser qu’il y adhère dans la mesure où il accepte aussi sans critique le fait que si « la notion de vérité change, alors la théologie change » (cite p.72 : « quand la notion de vérité change… la théologie change aussi »). BML confond impossibilité de connaître totalement et connaissance authentique. Seul Dieu connaît totalement, mais cela n’empêche que nous pouvons connaître de manière authentique.

Au sujet de l’apologétique, BML critique la formule « la Bible dit que… », et estime que « la Bible doit nous servir moins comme fondement de l’apologétique et plus comme composante du message en soi » (p.77). BML cite Actes 17 où dans le discours de Paul aux athéniens, ce dernier n’utilise par les Ecritures mais cite des auteurs païens. Mais BML oublie que Paul est saturé, imprégné des Ecritures et qu’il parle des idoles, du Dieu créateur et de la résurrection, notions plutôt étrangères à des païens et qui font référence aux doctrines des Ecritures. Si donc BML veut dire qu’il faut que nous soyons plus fins dans l’utilisation de l’Ecriture pour annoncer l’évangile, alors d’accord, mais sinon, AN craint que ce ne soit la mise de côté de la Bible. Crainte confortée par les expressions de BML page 80, lorsqu’il parle de la Bible comme textes poétiques et littéraires…

Conclusion d’AN :

on a l’impression que BML fait très peu d’efforts pour comprendre les conservateurs (NDR : fondamentalistes, non pas au sens politique du terme), alors qu’il en montre beaucoup pour tous les autres. AN fait un développement sur deux notions d’annonce de l’évangile : Selon certains, il faudrait d’abord annoncer le Dieu d’amour avant le Dieu créateur, aller de la grâce au péché. Selon d’autres, il faudrait d’abord présenter le Dieu créateur, la notion de péché, la loi, avant d’annoncer le Dieu rédempteur et la grâce. AN estime que la seconde approche est la bonne, qu’il convient de commencer avec le problème de l’homme (péché) avant d’en venir à la solution divine (grâce). Il reconnaît toutefois que dans un souci pédagogique, on peut être sensible aux capacités d’accueil des auditeurs, et on va aller d’abord au « sauvé pour » avant d’en venir au « sauvé de ». Le problème avec BML c’est qu’il ne semble pas faire de différence entre la logique de l’évangile (d’abord l’annonce du péché puis de la grâce) et la stratégie de mise en œuvre (pédagogie cas par cas). On a l’impression que BML voudrait changer l’interprétation de l’évangile. Dans le concept de postmodernité, on ne justifie pas les fondements, et BML semble se placer dans ce droit fil de n’avoir pas de fondement.

Mini-débat (questions à l’orateur)

Suit un court temps de questions de la salle, non pour débattre mais pour éventuellement demander des précisions à l’orateur. – Question de Matthew Glock : quel était exactement la demande de la LLB et l’AEF aux orateurs ? – Réponse de S.Lauzet : lit la lettre adressée aux 4 orateurs, leur demandant d’analyser le livre RE de BML. – Question/remarque de JP.Civelli (pasteur de l’église libre) : sera-t-il impossible de dialoguer entre postmodernes et modernes ? les paradigmes changent, et l’analyse d’AN est sur un point de vue moderne.

Intervention de Lydia Jaeger :

LJ estime que la façon de procéder de LLB/AEF est la bonne, consistant à ne pas vouloir polémiquer mais à inviter des « experts » indépendants. Elle se présente comme systématicienne, plus philosophe que théologienne praticienne. Elle indique bien ne commenter que le livre RE, dit n’avoir pas lu d’autre livre de BML et donc ne présentera pas d’analyse de la pensée de BML, respectant en cela la commande de LLB/AEF.

Selon LJ, la thèse de BML consiste à changer la façon de vivre l’église et la façon d’annoncer l’évangile. Il affirme que la postmodernité rejette toute connaissance universelle et la toute-puissance de la raison, remplacée par une vision subjective des choses. Du coup on ne demande plus si c’est vrai mais si c’est authentique. 2 questions se posent : 1) son analyse de la situation est-elle juste ? 2) les conséquences pour l’évangélisation sont-elles bonnes ?

1) L’analyse de la situation de BML est-elle juste ?

D’abord, selon LJ ce n’est qu’une partie de la population qui est devenue postmoderne. La science garde une certaine crédibilité (vision moderne donc). BML a fait des études littéraires aux Etats-Unis, et c’est là que des penseurs français ont développé la notion de postmodernité (Foucault entre autres). Le contexte d’église dans lequel évolue LJ l’amène à constater que bien des gens ne sont pas dans la postmodernité (église de banlieue, marquée par des populations antillaises et africaines).

Puis, la postmodernité n’est pas rupture de la modernité, elle l’accompagne en fait. C’est le pôle irrationnel qui accompagne le pôle rationnel de la pensée apostate (sans Dieu). L’idole appelle sa contre-idole, et comme la pensée moderne idolâtre la raison, forcément il y a une revendication d’irrationalité (le romantisme en son temps était déjà une revendication d’irrationalité de ce type). Kant était déjà postmoderne, en ce sens que pour lui aucune connaissance n’était possible en matière de morale ou de religion.

La foi chrétienne n’est ni moderne (rationnelle) ni postmoderne (irrationnelle). BML ne fait pas d’analyse poussée de la postmodernité. On peut être d’accord avec BML lorsqu’il rejette la modernité (rationalité) mais le problème vient du fait qu’il ne rejette pas la postmodernité. LJ considère que la foi chrétienne accepte le fait que la raison autonome n’atteint pas la vérité. BML partage ce constat, mais il en déduit à tort qu’il n’y a donc pas de vérité absolue ou qu’on ne peut connaître de vérité absolue. LJ contredit BML sur ce point. Selon LJ, BML passe à côté du fait que la connaissance de la vérité nous est possible par révélation. Nous pouvons connaître réellement, mais pas complètement.

LJ cite la page 40 de RE où BML dit qu’il n’y a plus de critères pour savoir « qui est chrétien ». Mais LJ estime qu’il y a au moins 2 critères qui demeurent : Etre dans la grâce de Dieu (vise Galates, sans référence – NDR : probablement Galates 5,4 ?) Nos affirmations christologiques, selon 1 Jean 4 Tous ceux qui se disent chrétiens aujourd’hui ne le sont pas, ne remplissant pas ces critères fondamentaux.

LJ relève ensuite que BML exprime une grande méfiance contre la parole, le langage, car le discours fixe la raison. Mais dans la foi chrétienne, Dieu parle, c’est le Logos, et rien ne justifie cette méfiance. LJ rattache cette méfiance à du mysticisme et se dit frappée de ce que le mysticisme ait autant d’entrée jusques dans nos milieux évangéliques. Selon certains, la seule façon d’appréhender Dieu serait dans le silence mystique (NDR : cf. la promotion de la prière contemplative de BML, dans ses livres ou sur son site internet, comme aussi de prières jésuitiques, ou encore des labyrinthes ; ces sujets n’ont pas été évoqués). LJ revendique la prière biblique comme parole exprimée avant tout. LJ fait référence à la page 95 de RE, et s’inscrit en faux : la Parole de Dieu est intelligible. L’hérésie existe, toutes les paroles au sujet de Dieu ne se valent pas. D’après LJ, les formulations doctrinales du passé restent pertinentes (Nicée, Chalcédoine).

2) Les conséquences pour l’apologétique, pour une meilleure communication envers les non-croyants, sont-elles bonnes ?

LJ est d’accord avec BML sur le fait qu’on n’a pas besoin d’amener quelqu’un sur un terrain moderne avant de l’amener à la foi chrétienne (cf. p.146 de RE). Mais BML ne montre pas assez en quoi le postmoderne doit quitter sa postmodernité pour embrasser la foi chrétienne. Le message biblique doit toujours être présenté au postmoderne et à son relativisme pour qu’il se positionne devant le Créateur. LJ préconise une apologétique néo-calviniste (?). LJ affirme qu’il faut croire pour comprendre. La connaissance « insituée » est celle de Dieu et non des hommes, mais Dieu nous la révèle.

Mini-débat (questions à l’orateur)

– Question de P.Berthoud : le piétisme du XIXème siècle n’était-il pas aussi irrationalité (comme le romantisme d’une certaine manière) ?

– Réponse de LJ :
elle rappelle qu’elle est de tradition piétiste (en Allemagne). D’après elle, le piétisme n’est pas irrationalité mais plutôt une pensée pas suffisamment aboutie. Elle rappelle que le mysticisme est une attitude visant la fusion expérimentale au divin, en dépassant la parole. Bien sûr, le mystique parle, mais par contradictions, et pour dépasser la parole.

Pause de midi

Reprise par un débat entre la salle et les 2 orateurs du matin.

– Question/remarque de JP.Civelli : la démarche de BML consiste surtout à expliquer au chrétien ce qu’est un homme d’aujourd’hui, dans le monde postmoderne. BML ne donne pas de réponse ; il faudra le dépasser, le livre RE étant insuffisant. Mais si les théologiens avaient répondu à ces questions que pose BML, ce livre n’aurait pas été nécessaire. Il estime d’ailleurs que l’on ne peut juger la théologie de BML sur ses écrits mais uniquement sur ses fruits (église florissante).

– Réponse d’AN :

cite Matthieu 12,37 : « par tes paroles tu seras justifié, par tes paroles tu seras condamné », donc les paroles et encore plus les écrits peuvent être légitimement examinés pour considérer la théologie d’un chrétien qui enseigne. Si ce que dit BML n’est pas ce qu’il veut dire, il n’avait qu’à ne pas le dire. AN, sur la question posée, revient sur la notion d’autorité de la Bible de BML pour indiquer que le livre RE est flou à ce sujet, ce qui peut être inquiétant.

– Remarque de M.Glock : pense que BML veut que l’église change complètement.

– Question/remarque de PE.Chomel :

remarque que les orateurs ont rempli ce qui leur avait été demandé en examinant le 1er livre de BML, mais fait remarquer que BML en a écrit bien d’autres depuis, et que dans « A new kind of christian » il décrit la pensée émergente à laquelle il se rattache comme se développant en cercles concentriques, chaque nouveau livre englobant et développant le précédent, il aurait été intéressant d’examiner tous les livres de l’auteur pour cerner sa pensée actuelle. Dans ce cadre-là d’ailleurs, les déclarations de BML au sujet de l’autorité de la Bible sont très inquiétantes ! L’intervenant demande aux orateurs si d’après ce qu’ils ont analysé il n’apparaît pas que BML ne veut pas seulement une église dans la postmodernité, mais bien une église postmoderne. BML n’est-il pas lui-même postmoderne, en ce sens qu’il veut en revenir à un tronc commun doctrinal mais n’en donne à aucun moment la moindre définition ?

– Réponse d’AN :

BML dit qu’il veut une église dans la postmodernité ; il provoque, mais c’est vrai qu’il faudrait le lire plus largement. Le livre RE n’est pas vraiment dangereux, AN n’y a pas décelé d’hérésie. AN ajoute : « BML est trop rusé pour cela ». – Réponse de LJ : Elle estime qu’on peut arriver à un jugement pertinent sur un seul livre, sans tout connaître de l’auteur. Sur le tronc commun, s’il s’agit d’un fondement doctrinal tel que celui de l’Alliance Evangélique, d’accord, mais si le tronc commun que veut BML est plus large, alors pas d’accord. LJ indique qu’elle a regardé quelques pages de BML dans un autre de ses livres et en déduit que l’on peut avoir des craintes à ce sujet.

– Question/remarques de D.Oddon :

cite les expressions employées par BML dans son livre « A new kind of christian » au sujet de l’autorité de la Bible, qui montrent à l’évidence que BML ne considère pas la Bible comme LA référence du chrétien : – Le chrétien postmoderne « relativise son propre point de vue moderne » en comprenant que « tout ce qu’il croit à propos de la Bible et du christianisme est seulement relatif et incertain » (« A New Kind of Christian », Brian McLaren, p 35) – « Il est faux et pharisaïque de considérer la Bible comme « l’encyclopédie de Dieu, le livre des lois de Dieu, le livre des réponses de Dieu » (p 52). – « La Bible ne devrait pas constituer notre unique autorité mais seulement une parmi d’autres, comme la tradition, la raison, des personnes exemplaires, des institutions qui ont gagné notre confiance, et l’expérience spirituelle (p 54 s) –  » La Bible n’est pas l’infaillible Parole de Dieu et aucune doctrine ou théologie n’est absolue, aussi devons-nous aborder la Bible de façon moins rigoureuse » (p 56) – « L’autorité de la Bible ne réside pas dans le texte lui-même mais se situe sur un plan mystique, au-dessus et au-delà du texte. » (p 51) Il demande à LJ, philosophe, si la pensée émergente n’est pas éminemment hégélienne, et ne procède pas en ce sens d’une démarche non chrétienne. Il regrette par ailleurs que les orateurs ne s’expriment que sur le 1er livre de BML, et déplore vivement que VS n’ait pas été invité à la tribune, dans la mesure où VS a fait un travail de recherche plus complet sur BML. Un peu plus tard, D.Oddon demandera aussi aux orateurs si BML qui veut unifier la ligne libérale et la ligne conservatrice peut le faire sans apostasier (une personne dans la salle lance: « c’est politique » – NDR : la question n’est évidemment pas politique, et BML ne l’a pas présenté comme politique dans son séminaire à Paris en janvier 2006).

– Réponse A.Courtial :
estime que VS a été invité suffisamment à l’avance et que leur récent mail précisant les raisons de leur non-présence au débat de ce jour ne semblent pas toutes valables. (NDR : voir le courrier de Vigi-Sectes sur http://tinyurl.com/qc8st ) – Réponse LJ : elle indique n’avoir pas lu Hegel et ne pas bien avoir compris la question concernant la pensée hégélienne. Elle précise que s’il s’agit de savoir si BML est hérétique, il est évident que la démarche entreprise, à savoir analyser un livre de l’auteur, n’est pas suffisante. Et que de plus ce n’est pas à elle de le dire (BML n’est pas de son église et n’enseigne pas à l’IBN). LJ n’a pas suivi le détail de la polémique au sujet de BML.

Intervention de David Brown :

Se présente comme praticien plus que comme théologien. Devant la polémique qui est apparue très tôt, il a eu envie de pleurer, car il se sentait placé devant 2 alternatives : Beaucoup de réflexion, mais sans base biblique : BML Des bases bibliques, mais sans réflexion : contradicteurs de BML DB s’est dit agacé par des expressions des polémistes (NDR : on peut supposer qu’il fait référence à VS, mais sans citer expressément), comme par exemple le fait qu’on attribue à BML beaucoup de sagesse humaine en renvoyant à Jacques 3,15 (sagesse « diabolique »), alors qu’il s’agit dans Jacques d’un autre contexte. Comme aussi cette expression « nous ne voulons ni église moderne, ni église postmoderne, mais l’église du nouveau testament ». DB justifie à cet égard BML en indiquant que beaucoup de questions sur notre vécu d’église n’ont pas de réponses directement bibliques.

DB relève 9 points positifs dans RE, et les liste rapidement (donne surtout les titres des chapitres qui lui paraissent pertinents dans les questions que BML pose).

Mais DB a essentiellement 2 critiques importantes à faire et s’y attarde plus longuement.

1) Relations avec la postmodernité : BML s’est « marié avec la postmodernité ».

Avec Don Carson, DB croit que le terme de postmodernité a sa place, mais qu’il faudrait en définir les contours. Il rappelle que le postmodernisme n’existe pas, mais plutôt la postmodernité. En France la postmodernité est la position de repli des gens qui considèrent qu’il n’y a plus d’idéologie valable. Ce n’est donc pas un choix délibéré, et donc pas du « postmodern-isme« . BML voudrait en fait que l’église soit postmoderne, quitte à mettre de côté certains points doctrinaux fondamentaux. S’il ne s’agissait que de mieux cerner la missiologie et l’adapter, on pourrait être d’accord. Il faut certes être adapté à notre culture ambiante, mais il ne convient pas que notre culture change nos fondements. Dans la préface de « Generous orthodoxy », que DB a lu également, l’auteur de cette préface compare BML à Martin Luther et l’église émergente avec la Réforme sur le plan de l’importance du changement opéré ! BML ne refuse pas ces comparaisons dans son livre, donc il les endosse. Il ne se prend pas pour rien! Il veut effectivement opérer un changement en profondeur, qui touche aussi aux points doctrinaux.

2) Doctrine du salut et de la justification :

On ne trouve nulle part la doctrine du salut, de la justification par la foi. Il est vrai que BML n’est pas théologien. Mais quand on lui pose une question « crois-tu à ceci ? », BML répond toujours « oui ». Citant CS.Lewis : « On ne peut savoir ce que quelqu’un croit si on ne sait pas ce qu’il rejette », DB affirme que BML dans son livre « Generous orthodoxy » ne rejette rien, sauf les différents « sola » de la Réforme (sola scriptura… et même un « sola T.U.L.I.P. » inventé par BML !). DB affirme donc qu’il y a un trou béant au centre de la théologie de BML et précise en particulier que nulle part chez BML il n’est fait mention de la mort expiatoire à la croix (substitution pénale). De plus, DB vise les pages 37 et 38 de RE où BML évoque la notion de Royaume de Dieu, plus vaste que l’église. Cette notion de royaume est reprise dans GO où l’on trouve en germe l’hérésie de l’universalisme. DB qui a creusé sur le sujet de l’église émergente, indique que le rejet de la doctrine fondamentale de la substitution pénale est chose très courante dans l’église émergente. Ainsi, Steve Chalke, leader le l’Eglise émergente en Grande-Bretagne, qui est très souvent cité par BML a écrit que la doctrine de la croix est un abus cosmique ou divin envers un enfant. Il a été convoqué par l’Alliance Evangélique Britannique qui s’est séparée de lui. L’absence de ce thème de la substitution et de la propitiation dans un livre qui veut réinventer l’église est très troublante.

Conclusion :

Nous avons en France des gens capables de traiter de tels sujets correspondants aux questions posées par BML. Mais l’absence du sujet du salut dans ce qui se veut refondation de l’église est inquiétante. DB cite Luc Ferry, philosophe non chrétien : « la seule raison de la philosophie, c’est de trouver le salut ; pour cela, ce qu’on a trouvé de meilleur c’est le christianisme, mais c’est trop beau pour être vrai. » DB conclut en espérant que les éditeurs chrétiens réfléchiront bien avant d’éditer d’autres livres de BML, et son espoir est qu’ils n’en éditeront pas d’autres (NDR : cette mise en garde constitue bien une critique indirecte de l’édition de ce premier livre en France).

Intervention de Donald Cobb :
DC situe d’abord le livre dans la collection française Evangile et Culture, dont le but est notamment de faire réfléchir. Il résume ainsi la pensée de BML dans le livre RE : « comment serait une église délestée de l’héritage moderne ». Le mot d’ordre proviendrait de F.Schaeffer (cité dans RE). BML parle des outres et du vin, et cette présentation est juste selon DC. BML passe en revue nos activités ecclésiales pour voir si elles contribuent à diffuser le message, à sa mission au sein du monde. Dans l’ensemble, DC juge que ce sont des pistes intéressantes et stimulantes, poussant à l’innovation et la créativité dans l’église.

Quelques critiques néanmoins :
– BML utilise la caricature, et son ambiguïté dans ses propos irrite et agace. BML demande une appréciation nuancée de la postmodernité alors qu’il n’applique pas lui-même cette « nuance » vis-à-vis des chrétiens. – On n’est jamais vraiment sûr de ce que BML veut vraiment dire. DC n’est pas convaincu que cela aide l’Eglise à formuler le message à annoncer. Ou alors ce pourrait être un message qui passe bien mais qui serait inconsistant. – Dans son analyse de modernité et postmodernité, BML fait preuve de naïveté. D’après BML, les postmodernes croient à la vérité mais ne supportent pas la façon dure dont les chrétiens l’affirment. Mais la postmodernité touche au statut de la vérité. BML : « le terme de vérité absolue n’a plus d’utilité ». C’est là le point le plus contestable du livre RE : la place de la vérité dans l’Eglise. BML dit que les différences, les divisions ecclésiales sont secondaires, et il ne cite que des détails formels dérisoires à l’appui de cette assertion. Le tronc commun doctrinal n’est jamais défini. On en ressort avec l’impression que toutes les spiritualités se valent, si elles se reconnaissent chrétiennes, et la meilleure serait celle qui les met toutes ensemble. DC cite la page 164 où BML fait allusion à un rapprochement du libéralisme et du conservatisme, sur la base d’une relativisation qui impliquerait de fait l’abandon d’éléments doctrinaux essentiels (NDR : cf. la remarque de D.Oddon plus avant). Page 127, BML donne l’impression que l’église ne devrait pas se crisper sur des aspects éthiques importants comme l’homosexualité ou l’avortement. Il met aussi sur le même plan théologie, art, littérature… reléguant la théologie au rang des activités humaines empreintes de subjectivisme et de relativisme.

Conclusion : la collection Evangile et culture vise à nous interroger, et non à nous apporter des réponses, et c’est bien ce que fait ce livre RE.

Débat entre la salle et les 4 orateurs, conduit par A.Courtial, qui pose la première question :

– A.Courtial :

recommanderiez-vous la lecture de ce livre ?

– DB : Non. Les membres de mon conseil ne comprendraient pas grand-chose (1 membre de conseil dans la salle confirme), plus par rapport à la façon de BML de dire les choses.

– AN : je ne le déconseillerais pas. Une lecture critique, par des personnes mûres, peut être féconde car le livre stimule la réflexion. En soi il n’est pas nocif.

– DC : conseille la lecture à un conseil d’église des premiers chapitres qui remettent en cause nos habitudes. Certaines sections ne seraient pas conseillées à la lecture.

– Intervenant inconnu :

Les gens sont plus matures qu’on ne le croit ; qu’ils lisent le livre

– Autre intervenante, du conseil d’église libre de Valence, suédoise d’origine : a lu le livre, non pas sous un point de vue théologique. Selon elle, le livre montre le monde dans lequel on vit. Elle se dit LA protestante dans la chorale catholique valentinoise… Se dit étonnée que la polémique survienne pour ce livre, alors que le livre précédent de la même collection était beaucoup plus révolutionnaire : « L’Eglise autrement ».

– Autre intervenante : attentive aux recommandations faites par les orateurs et les mises en garde, mais a été très encouragée par le livre

– Autre intervenante : ce livre donne de bonnes questions. A entendu parler de relations que BML entretiendrait avec le nouvel age et aimerait savoir ce qu’il en est vraiment pour être plus méfiante le cas échéant.

– M.Glock répond à cette dernière question :
Il précise qu’il connaît très bien BML et qu’il est donc qualifié pour répondre. Il indique qu’une femme joueuse de harpe s’est convertie aux Etats-Unis par le moyen de BML, et il se trouve qu’elle joue de la musique de style new-age et il y a un lien sur ce sujet sur le site de BML. M.Glock confirme que BML partage une certaine conception de la prière contemplative, sans pour autant être new-age. Lorsque BML était à Valence en janvier (à la LLB?) on lui a demandé s’il croyait à ces « gros mots » (sic : expression employée par MG) (NDR : M.Glock, américain, ne trouve plus les mots correspondants, que sont substitution, propitiation, expiation, employés un peu plus tôt par D.Brown ; son expression « gros mots » était très clairement méprisante, indiquant que ces notions n’ont pour lui que peu d’importance!), et BML a répondu qu’il y croyait (NDR : D.Brown a indiqué que BML répond généralement oui à ce genre de question, sans que ce soit déterminant car par ailleurs il montre qu’il ne rejette pratiquement rien, et qu’en ce sens sa doctrine est très floue ; par ailleurs, M.Glock oublie (?) de citer le soutien de BML à Alan Jones, ou encore le lien mis sur le site de l’église de BML vers Spiritual Teachings Directors, site d’œcuménisme syncrétiste ; c’était donc une réponse partielle et biaisée).

– JP.Civelli :
regrette qu’on ait pris de haut BML dans cette journée, notamment les orateurs. Il cite avec enthousiasme la vie d’église de BML, les gens qui vont et viennent avec un café et discutent pendant le culte…

– Réponse de D.Brown :
s’il y a polémique, il faut quand même se demander pourquoi ! Pour lui, la vie d’église de BML n’a rien de révolutionnaire, car sa vie d’église ressemble à cela. En même temps qu’il véhicule des sujets très intéressants, BML véhicule une doctrine qui n’est plus évangélique. Le cœur de la doctrine évangélique n’y est pas.

– JP.Civelli :
ce n’est pas le sujet des livres de BML (NDR : là encore, on peut rectifier : lorsqu’on veut refonder l’église, la réinventer, il est aberrant que la doctrine soit absente, comme évacuée ! par ailleurs, le livre de BML intitulé « Generous orthodoxy » n’est pas plus explicite sur le tronc commun doctrinal, et pourtant, le titre même « orthodoxy » montre que BML se place lui-même sur le terrain doctrinal mais sans rien définir, ce qui explique que DB pense que BML n’est plus sur le terrain évangélique).

– AN :
a beaucoup de respect pour le ministère de pionnier… mais il y a aussi des docteurs, placés dans l’Eglise pour garder le bon dépôt, et là il faudrait faire attention que les évangéliques ne méprisent pas trop ce ministère de docteur, à leur détriment. Il cite ensuite un chapitre du livre de Bernard-Henri Lévy « American vertigo » intitulé « L’église de Willow Creek » dans lequel BHL exprime son profond étonnement d’avoir trouvé une église sans aucun sens du sacré, du mystère, qui ressemble plus à une banque, sans le sens de la dignité et de la présence de Dieu (et BHL n’est pas a priori chrétien). – JP.Civelli regrette qu’il n’y ait pas eu d’orateur pour défendre vraiment BML. – LJ conclut en appréciant la démarche de la LLB et l’AEF d’avoir invité des théologiens et des praticiens, et non des polémistes (« d’ailleurs la polémique nous intéresse-t-elle ? » ajoute LJ).

S. Lauzet donne une conclusion générale, en remerciant la douceur des intervenants, même ceux du sud plus « enthousiastes ». Il rappelle la seule raison du livre à ses yeux : que nos églises se posent la question de savoir à quoi elles servent.

PE Chomel