Un abbé intégriste a été mis en examen et écroué mercredi pour «viols aggravés», «tortures» et «actes de barbarie» sur trois enseignantes d’une école privée des Yvelines proche de la Fraternité Saint-Pie X, un mouvement en rupture avec l’église catholique.
La justice reproche à l’ancien directeur de l’école Notre-Dame de la Sablonnière à Goussonville, près de Mantes-la-Jolie, d’avoir violé à l’automne 2010 trois enseignantes et de leur avoir fait subir des sévices, a indiqué le procureur de la République à Versailles Vincent Lesclous.
Selon Le Parisien qui a révélé l’affaire, «le prêtre aurait usé de son influence spirituelle» sur une mère de famille victime d’abus sexuels, en lui faisant subir des séances d’exorcisme avant «de mimer des actes sexuels pour tenter de soigner +le mal par le mal+».
Il aurait fait subir le même traitement aux deux autres femmes. Le quotidien rapporte que lors de son audition, «le prêtre a tenté de minimiser ses actes assurant que les victimes étaient consentantes et qu’il s’était contenté de mimer l’acte sexuel».
L’affaire a éclaté dans une école aux allures d’enclave dans ce village paisible de 600 habitants à 50 km à l’ouest de Paris, entouré de champs de colza en fleur et de blé.
L’établissement situé dans une ruelle abrite l’un des sept lieux cultes de la Fraternité Saint-Pie X dans les Yvelines selon le site internet du mouvement laportelatine.org.
– La figure du prêtre salie –
A 16H30, des mères de familles, visage fermé, venaient chercher leurs enfants, certains en uniformes gris, à la sortie de l’école.
«On ne les voit pas, le portail est tout le temps fermé», explique Jocelyne Brunet, une adjointe au maire, rejoignant les propos de riverains qui évoquent une école vivant en «vase-clos».
Isabelle Magalini, rencontrée dans le quartier, confie qu’elle a déscolarisé ses deux filles, quand elles avaient quatre et sept ans, après avoir constaté «les dérives» de cet établissement.
La quadragénaire raconte qu’au départ de l’ancienne directrice, «une femme très pieuse» qui a dirigé pendant une quarantaine d’années l’établissement, l’ambiance s’est «soudainement dégradée» en 2004.
«Avant il y avait des croyants et des non-croyants, c’était très familial, chaleureux, protecteur», se souvient Mme Magalini. «Puis cette femme a fait don de l’école à la Fraternité Saint-Pie X» et l’atmosphère est devenue «militaire et très stricte».
L’abbé aujourd’hui incriminé est un homme «souriant, charmant, dynamique», selon cette mère de famille. «Il est parti sans qu’on sache pourquoi et a été remplacé par quatre religieuses. Les enseignantes employées par l’ancienne directrice sont elles aussi parties les unes après les autres».
La Fraternité Saint-Pie X est une communauté intégriste proche des milieux d’extrême droite, fondée en 1970 par Mgr Marcel Lefebvre. Elle ne reconnaît pas le Concile Vatican II qui a, selon eux, rompu avec la tradition. Contactée par l’AFP, elle n’a pas donné suite à nos sollicitations.
En 2012, cette fraternité comptait 600.000 fidèles dans 62 pays dont 100.000 en France, selon les chiffres de la Commission Ecclesia Dei, de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
L’évêché de Versailles, «fidèle au pape», précise qu’«il n’existe aucun lien avec ce mouvement» qui est «implanté» dans le département. «Nous ne pouvons qu’être profondément attristés pour les victimes et blessés que la figure du prêtre soit salie».